BIFFF 2013 : retour sur le palmarès

Posté par kristofy, le 16 avril 2013

ghost graduationPour sa 31ème édition, le Brussels International Fantastic Festival a réussi à présenter en 12 jours plus de 110 films, répartis en différentes sections. Freddy Bozzo, le vice-président du festival, a indiqué que lui et son équipe ont vu plus de 600 films pour proposer le meilleur de la production de films fantastiques du moment.

Le BIFFF veut offrir un panorama le plus large possible avec plus d’une vingtaines de films en avant-première internationale, mais aussi dépasser ces considérations d’exclusivité pour proposer des titres immanquables qui ont déjà pu être remarqués ailleurs mais inédits en Belgique (et inédits pour la plupart en France aussi), comme le remarquable Excision de Richard Bates Jr (avec Traci Lords en pieuse mère de famille et John Waters en prêtre) déjà passé par le Festival européen du film fantastique de Strasbourg.

Il y a forcément une petite part de subjectivité dans le choix de la présence de tel ou tel film en compétition ou hors-compétition et dans la répartition des différentes sections. Par exemple, la catégorie reine de la compétition internationale proposait 13 films très différents les uns des autres dont : Kiss of the Damned de Xan Cassavetes (vu à Venise), Upside Down avec Kirsten Dunst dont la sortie a été longtemps retardée (au cinéma le 1er mai), The human race de Paul Hough (le fils du célèbre John Hough qui a pour l’occasion été fait chevalier de l’Ordre du Corbeau au BIFFF), des comédies comme l’espagnol Ghost Graduation, des films beaucoup plus sanglants comme American Mary, et le thriller Chained de Jennifer Chambers Lynch qui, figurant parmi les films les plus réussis de 2012, était un favori.

Le BIFFF n'a malheureusement pas pu offrir à ses spectateurs le film le plus intriguant et le plus fascinant de ce printemps : Upstream Color, découvert à Berlin en présence de son réalisateur Shane Carruth (de retour après le culte Primer), et qui aurait été bienvenu dans la compétition.

Le palmarès de la Compétition Internationale :confessions of murder

- Corbeau d’Or, Grand Prix : Ghost Graduation de Javier Ruiz Caldera
- Corbeau d’Argent, Prix Spécial du Jury ex aequo : Abductee de Yudai Yamaguchi
- Corbeau d’Argent, Prix Spécial du Jury ex aequo : American Mary de Jen Soska et Sylvia Soska
(remis par le jury de la Compétion Internationale présidé par Roland Joffé entouré des réalisateurs Iain Softley et Frédéric Fonteyne, et de l’actrice Marina Anna Eich)

Le palmarès des autres sections :

- Méliès d’Argent : May I Kill U? de Stuart Urban
- Mention spéciale : Earthbound de Alan Brennan
(remis par le jury Européen, composé de Adrian Politowski, John Engel, Stéphane Streker, Myriam Leroy, Marie-Hélène Dozo, Pauline Duclaud-Lacoste et David Mathy)

- Prix Thriller : Confession Of Murder de Jung Byung-gil
(remis par le jury Thriller composé de Paul Cleave, Patrick Ridremont et Eric Godon)

- Prix du 7e Parallèle : Blancanieves de Pablo Berger
- Mention spéciale : Vanishing Waves de Kristina Buozy
(par le jury 7ème Parallèle, composé de Patricio Lagos, Christophe Bourdon, Jean-Michel Vovk et Charles Tatum Jr.)

-Prix du Public : Ghost Graduation de Javier Ruiz Caldera

american maryC’est donc le film espagnol Ghost Graduation qui est le grand gagnant de cette 31e édition du BIFFF avec le doublé idéal Corbeau d’or du jury et Prix du Public. Récompenses que l’on avait déjà pronostiquées en cours de festival, même s'il est un peu surprenant que ce soit une comédie qui remporte le prix le plus important et non un film plus sombre comme Chained de Jennifer Chambers Lynch, curieusement absent du palmarès.

La compétition étant assez inégale, il est en revanche logique que le film American Mary et ses victimes (volontaires pour certaines, pas du tout consentantes pour d’autres) d’opérations chirurgicales radicales ait été distingué : c’est peut-être le film qui prend le plus aux tripes. Plus étonnant, un prix pour Abductee qui repose juste sur un début de bonne idée: un homme seul est kidnappé et se retrouve dans un container de métal; Autour de lui, il y a d’autres containers avec d’autres personnes kidnappées. Tous sont transportés vers… une fin de film ennuyeuse.

A noter que le thriller Confession Of Murder de Jung Byung-gil s’éloigne des nouveaux maîtres étalons coréens (The Chaser, I saw the Devil…) en évitant de montrer du sang ou de la torture, mais en se concentrant surtout sur les scènes d’action, avec un scénario qui joue au chat et à la souris avec quelques rebondissements improbables.

Il montre notamment en guise d’introduction une scène de poursuite à pied, filmée à travers les vitres d’un bâtiment à un autre, et surtout deux grosses scènes de courses-poursuites sur route, impliquant différents véhicules et personnages qui vont de l’un à l’autre à toute vitesse, et deux généreuses séquences de cascades à faire applaudir les Wachowski’s époque Matrix Reloaded.

Maintenant, il reste à découvrir si, auréolés de ces différents prix, les lauréats du BIFFF 2013, Ghost Graduation en tête, bénéficieront d'une sortie en salles françaises.

BIFFF 2013 : le fantastique cinéma espagnol

Posté par kristofy, le 11 avril 2013

the endEn 2012, la fin du monde prévue par les mayas était aussi au cinéma (de Take Shelter à 4h44 Dernier jour sur Terre…), et également  en Espagne avec le titre le plus simple : The end (Fin) (photo) réalisé par Jorge Torregrossa. Une homme engage une escort-girl pour lui faire jouer le rôle de sa petite amie lors d’un week-end de retrouvailles entre plusieurs couples d’amis dans une maison isolée. Après un étrange bang dans le ciel la nuit, il n’y a plus du tout d’électricité, pas même dans les batteries des téléphones et des voitures inutilisables, et un des amis a disparu... Film d’apocalypse et de mystère avec très peu d’effets spéciaux, l’histoire repose sur un groupe d’acteur et différents paysages vides, dont Maribel Verdu également présente au BIFFF avec Blancanieves de Pablo Berger.

Le BIFFF démontre la vivacité du cinéma espagnol lié au fantastique, qu’il s’agisse de la fin du monde donc ou de fantômes dans une école avec Ghost Graduation (qui aura un remake américain), et d’autres encore. Pourtant l’Espagne connaît une période de grave crise économique, crise qui touche bien entendu la culture avec une baisse terrible du nombre de films produits et aussi du nombre de spectateurs en salles. Invité à présenter son film Afterparty (photo ci-dessous), le réalisateur Miguel Larraya confirme que seul Pedro Almodovar arrive à réunir le budget qu’il veut pour ses films, les autres cinéastes ont plus de difficultés.

Le ‘cinéma de genre’ espagnol fonctionne  souvent à l’international dans d’autres pays, et Miguel Larraya a réussi à avoir des fonds en voulant faire « un film avec  du sang, du sexe, et de la drogue », en fait un slasher en huis-clos. Une vedette de la télévision est entraînée dans une fête dans une grande villa, au réveil le lendemain matin toutes les issues sont verrouillées et plus de moyens de communication vers l’extérieur : il est enfermé avec quatre autres personnes de la fête. Un mystérieux tueur masqué commence à tuer… Les personnages sont toujours en train de se séparer dans le labyrinthe de la maison, le temps de deviner l’identité de qui tue il n’y aura presque plus personne de vivant.

L’Histoire espagnole est aussi un élément souvent exploité dans leurs films fantastiques (L’échine du diable puis Le labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro, Balada triste de trompeta de Alex de la Iglesia, Insensibles de Juan Carlos Medina…), et le BIFFF a fait découvrir un point de vue plus controversé.

Le réalisateur Oscar Aibar est venu défendre son film The Forest (El Bosque) (photo ci-dessous) : l’héroïne est la femme d’un sympathisant fasciste, et ce sont les communistes qui ont le mauvais rôle de persécuteurs…

the forestL’histoire se déroule sur plusieurs années avec les ‘rouges’ qui décident de gérer la nourriture avec des bons distribués, la présence de militaires américains qui portent d’ailleurs l’étoile rouge et qui sont là pour combattre avec eux, plus tard la déroute des ‘rouges’ et l’arrivée de militaires ‘maures’.

Ce sont ainsi plusieurs périodes de la guerre d’Espagne qui sont ravivées dans le film centré autour de la grande maison de l’héroïne dont tout le monde recherche le mari. Celui-ci pour ne pas se faire capturer a décidé de pénétrer dans la mystérieuse lumière verte qui apparaît deux fois par an sur leur terrain, et deux fois par an le mari revient un moment avant de repartir vers un ‘ailleurs’…

Il s’agit de l’adaptation d’un roman de Albert Sanchez Pinol, le film évoque la guerre avec un microcosme de quelques personnages (qui parlent d’ailleurs le matarrani, dialecte espagnol en voie de disparition) et un élément fantastique extraordinaire. Pour Oscar Aibar « chaque réalisateur espagnol se doit de faire un film avec en toile de fond la guerre civile. En ce moment avec la crise en Espagne c’est miraculeux de produire un film, la culture c’est un luxe ».

C’est tout de même étrange que tant de films espagnols si variés, avec des scénarios ambitieux et peu de moyens, voient le jour, quand en France l’argent sert à réunir une multitude de stars sur la même affiche avec un scénario inconsistant...

BIFFF 2013 : Ghost Graduation marque des points en compétition

Posté par kristofy, le 9 avril 2013

ghost graduationLa compétition internationale du BIFFF réunit 13 films que le jury va devoir départager.

Celui-ci est composé de personnalités éclectiques qui ont comme point commun de tous parler un peu français : le président en est le réalisateur Roland Joffé (multi-primé pour Mission, La cité de la joieLes amants du nouveau monde) et il est accompagné de l’actrice Marina Anna Eich, et des réalisateur Frédéric Fonteyne et Ian Softley.

A mi-parcours de ce 31e BIFFF, un des favoris du public est l’espagnol Ghost Graduation (Promoción fantasma). Il met en scène une école dont la réputation est entachée d’incidents en tout genre qui font réduire les effectifs. Un nouveau prof pourrait bien aider. Car lui voit des morts… et les fauteurs de troubles sont justement cinq élèves morts depuis longtemps et devenus des fantômes.

C’est une comédie très rythmée et très drôle qui mélange de manière subtile plusieurs histoires d’amour maladroites et touchantes, des cascades de répliques humoristiques, quelques gags spectaculaires, quelques situations potaches, des musiques irrésistibles... un vrai petit concentré de bonne humeur.

Le réalisateur Javier Ruiz Caldera et le scénariste Adolfo Valor (photo ci-dessous) se sont livrés aux questions des festivaliers avec la même bonne humeur communicative que celle de leur film. Le scénario a en fait d’abord été écrit pour le plaisir, sans aucun contrat ni engagement, et ce n’est qu’après avoir une version jugée bonne qu'a débuté la recherche d’un producteur.

Adolfo Valor (l’un des deux scénaristes) avait ghost graduation déjà vu et bien aimé le film Spanish movie (qui était déjà une parodie de films fantastiques) de Javier Ruiz Caldera, alors il a voulu qu’il dirige cette histoire.

Le réalisateur explique : " on avait peu de budget et on devait montrer cette relation spéciale qu’ont certains personnages avec les fantômes : on a d’abord tourné la scène avec l’acteur fantôme puis on l’a refait avec le personnage seul, au montage on a alterné les prises quand il est seul et quand il est avec, et ça fonctionne tout à fait sans aucun effets spéciaux. Le film est réussi parce qu’on joue le jeu de la comédie. Visuellement, il y a des éléments américains comme dans les vêtements par exemple, mais dans mon école c’était un peu comme ça déjà, je voulais faire comme un de ces films américains des années 80, j’ai été élevé avec ces films plus qu’avec mes parents."

Pour les rôles principaux des adultes de l’école ils ont choisis les acteurs qu’ils avaient en tête en commençant par Raúl Arévalo, vu auparavant dans Balada triste de trompeta de Alex de la Iglésia et à l’affiche dans Les amants passagers de Pedro Almodovar, Alexandra Jiménez, et aussi Carlos Aceres dont les premiers pas au cinéma (après de la télévision) ont déjà eu lieu dans le film précédent de Javier Ruiz Caldera et qui depuis est très demandé :  Carlos Aceres est lui aussi au générique de Balada triste de trompeta et des amants passagers, et aussi dans les films fantastiques Extraterrestre et Lobos de Arga (comédie avec des loups-garrous) déjà passés par le BIFFF. Pour les rôles des élèves fantômes de l’école il y a eu là un casting pour trouver les bonnes personnes, en particulier la fille qui chante.

Le scénariste est lui ravi de leur succès : "quand on fait une comédie comme celle-ci en Espagne on entend que certaines choses ne peuvent pas forcément fonctionner ailleurs. Le film est 100% espagnol avec certains éléments typiques du pays, et on a été surpris de la qualité des sous-titres qui font que certaines blagues ont encore mieux marché dans d’autres pays comme au festival de Toronto et ici à Bruxelles qu'en Espagne. Il se pourrait bien qu’il y ait un remake américain, les droits ont été achetés par Will Smith qui veut le produire."