The swimmer : la course d’une vie ressort en salles

Posté par Sarah, le 25 novembre 2010

« Je dois rentrer à la maison à la nage. »

On nous avait prévenus avant le début du film, The Swimmer est un ovni magnifique. On s'attend donc à un film compliqué, métaphysique ou tout simplement incompréhensible. En fait, c'est le contraire. Certes, le film est original. Ned Merrill, interprété par l'imposant Burt Lancaster, un homme d'une quarantaine d'année habitant une banlieue huppée du nord de New York, apparaît dans le jardin de ses voisins. Il ne les a pas vus depuis longtemps, et tous ses amis lui font la fête. Soudain, il lui prend l'envie de rentrer chez lui à la nage, allant ainsi de piscine en piscine à travers la région. Il est athlétique, radieux et son idée l'enthousiasme dès le début. Mais, petit à petit, Ned va déchanter. Les voisins et la nature vont devenir de plus en plus hostiles, il va se fatiguer plus qu'il ne le pensait et les dernier kilomètres se feront dans la douleur.

Résumé ainsi, on comprend que l'histoire en elle-même est originale. Le film, réalisé par Frank Perry, est tiré d'une nouvelle écrite par John Cheever, et date de 1968. La mise en scène  est époustouflante. Tout est filmé dans le but de décrire l'état intérieur de Ned Merrill : la lumière, la nature et la musique rythment ses mouvements, illustrent ses pensées. La caméra suit le corps athlétique et le sourire charmeur de Burt Lancaster, alternant les champs, les piscines, la forêt et les fêtes mondaines. On comprend rapidement que Ned est un homme complexe. Il a une femme et deux filles, beaucoup de charme et d'argent. Même si personne ne le dit ouvertement, il a eu récemment de sérieux ennuis. Tout le monde le sait, sauf lui apparemment. A mesure qu'il se rapproche de chez lui, les gens se font hostiles, inamicaux. Il tombe sur sa maîtresse, qui le rejette violemment. Ned Merrill a beaucoup occulté la vérité sur sa propre vie.

La joyeuseté, la candeur, la vitalité et l'émerveillement du personnage au début du film donnent un étonnant contraste avec la fatigue, l'amertume, la peur et la tristesse de la fin. Ned Merrill a toujours voulu croire à son bonheur, mais peut-être que ce n'était qu'une vérité arrangée. Beaucoup de critiques de l'époque insistaient sur la suffisance et l'arrogance d'un personnage qui finit par payer les dettes de sa vie. Il n'a que ce qu'il mérite, penseront certains. On peut aussi voir ce retour à la nage comme le retour d'un homme sur sa vie. Quand on est jeune, les rêves et l'espoir font vivre en quelque sorte. Au fur et à mesure, la vie prend certaines routes, certaines impasses que l'on ne veut pas voir. Ned Merrill traverse sa vie à la nage, et le réveil se fait glacial. Oui, le temps passe vite, et l'être humain peut être cruel. On comprend mieux son cheminement lorsqu'il dit à un petit garçon laissé seul par ses parents dans une maison vide (est-ce son reflet?) : « si tu crois très fort que quelque chose est vrai, alors cela devient vrai pour toi ». Ned a certainement trompé son monde, mais il s'est surtout trompé lui-même. La scène finale en atteste, et c'est certainement une des plus tragiques qui soit.

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The swimmer de Frank Perry
Avec Burt Lancaster, Janet Landgard, Janice Rule...
Reprise en salles à partir du 24 novembre