[2020 dans le viseur] Nos 30 films les plus attendus (2/3)

Posté par redaction, le 12 janvier 2020

Black Widow de Cate Shortland

Reset. L'univers Avengers est achevé. Et Natasha Romanoff aka Black Widow s'était sacrifiée. Pourtant, nous la retrouvons dans ce premier film du nouveau cycle Marvel. Une manière de tester la "vista" de Kevin Feige avec une super-héroïne qui méritait son film depuis longtemps.

Druk de Thomas Vinterberg

Ce sont les retrouvailles du réalisateur danois avec Mads Mikkelsen, huit ans après La chasse. Ce drame autour de l'alcool, et de ses conséquences, s'il devait être présenté dans un grand festival, devrait décourager certains de finir la soirée bourrés.

Annette de Leos Carax

Un projet forcément excitant sur le papier. D'abord parce Leos Carax est l'un des cinéastes les plus singuliers et audacieux. Ensuite parce qu'il réunit Adam Driver et Marion Cotillard. Enfin, pour son premier film en anglais, il réalise un musical autour du couple, sur des chansons des Sparks.

Nomadland de Chloe Zhao

Bien sûr, la réalisatrice de The Rider est attendue pour un gros blockbuster, Les Eternels, made in Marvel. Mais c'est son autre film, Nomadland que l'on attend le plus, avec Frances McDormand. Un drame entre road-movie et crise économique, bref une autre facette de l'Amérique.

Eté 84 de François Ozon

Ozon nostalgique? Le voici qui livre un teen-movie dans une station balnéaire en Normandie durant les années 1980, où un ado se révèle à lui-même. Melvil Poupaud, Valeria Bruni Tedeschi, Benjamin Voisin, Philippine Velge et celui qui sera le centre du film, Félix Lefebvre sont au générique.

Stillwater de Tom McCarthy

Après l'Oscar du meilleur film pour Spotlight, le réalisateur s'oriente vers une nouvelle aventure, qu'il a scénarisé par Jacques Audiard, Thomas Bidegain et Noé Debré. Matt Damon incarnera un père qui doit aller en France pour aider sa fille, arrêtée pour meurtre.

Peninsula de Yeon Sang-ho

Quatre ans après avoir pris le Dernier train pour Busan, le virus zombie s'est répandu à travers la Corée. Yeon Sang-ho veut faire de cette suite surprise une extension de l'univers. Cela se passe après les événements de Busan, mais pas avec les mêmes personnages.

The French Dispatch de Wes Anderson

Autant dire qu'on est un peu surexcité à l'idée de cette histoire française par le plus stylé des cinéastes américains. Surtout que le casting de ce scénario-puzzle réunit Timothée Chalamet, Léa Seydoux (qui avec le James Bond et le Dumont s'offre une belle année), Tilda Swinton, Saoirse Ronan, Benicio Del Toro, Frances McDormand, Kate Winslet et Bill Murray.

#Jesuislà d'Eric Lartigau

Si on devait retenir une comédie populaire françaie, ce serait celle-là. Parce q'Alain Chabat (et Blanche Gardin). Parce que la Corée du sud. Parce que Lartigau, comme Nakache/Toledano, maîtrise généralement bien ses scénarios.

Mort sur le Nil de Kenneth Branagh

Le film d'énigme redevient à la mode. En reprenant la moustache et l'accent belge d'Hercule Poirot, Branagh (qui réalise aussi Artemis Fowl cette année), s'offre de nouveau Agatha Christie et un casting chic (Gal Gadot, Armie Hammer, Annette Bening, Tom Bateman, Letitia Wright , Sophie Okonedo, Jennifer Saunders, Ali Fazal...) pour rebooter ce classique policier.

[2019 dans le rétro] 40 talents au top

Posté par vincy, le 31 décembre 2019

Le cinéma serait une grande famille. Mais alors façon Downton Abbey. Bien recomposée. Cette année, nombreux sont ceux qui ont su s'imposer dans nos mémoires de cinéphiles, au box office, et surtout à l'écran. Sur les écrans devrait-on dire. Le grand et celui chez soi. Il n'y a plus vraiment de distinction avec la déferlante Netflix, la hausse de la VàD et le succès de masse de certaines fictions télévisuelles. Sans oublier l'écran web, où Adèle Haenel a révélé la première grande affaire #MeToo du cinéma français. Son courage et sa clairvoyance en ont fait un événement marquant de l'année, rebattant les cartes des rapports hommes/femmes dans la profession. Adèle Haenel a été un symbole, pas seulement parce qu'elle a été la jeune fille en feu mais bien parce qu'elle (nous) a mis le feu. Ouvrant les portes anti-incendie à une nécessaire mise à plat. Elle n'a pas joué, cette fois-ci, ni misé pour voir. Elle a abattu ses cartes et déjoué les bluffs de certains.

Trois mondes

Ce sont les patronnes de l'année. Des impératrices dans leur genre. Olivia Colman, avec un Oscar en février pour La favorite, a incarné une reine au bord de la folie, avant de nous éblouir dans les habits d'une autre reine dans la troisième saison de The Crown. Régnante indétrônable sur le cinéma français, Catherine Deneuve continue inlassablement de tourner. Et pour ceux qui doutent encore de sa maestria, il suffit de la voir dans La vérité, où elle déploie tout son talent, sans se soucier de son image, dans une fausse mise en abime d'elle-même. Quant à Scarlett Johansson, elle a brillé (tragiquement) dans le dernier Avengers, plus gros hit de l'année, mais c'est bien son éclectisme qui la rend si spécifique par rapport au reste du cast de Marvel, tournant un second-rôle dans la comédie décalée Jojo Rabbit et poussant son niveau de jeu vers les plus grandes dans Marriage Story.

Les combattants

Ils sont à la fois au sommet du côté du box office, dans leur genre, et engagés, par leurs choix cinématographiques comme par leur parole en promo. Ainsi Adèle Haenel n'a plus sa langue dans sa poche, et fait preuve d'une franchise salutaire, tout en étant sublimée en amoureuse énigmatique dans Portrait de la jeune fille en feu, plus beau film LGBT de l'année. Corinne Masiero affirme ses idées de gauche, cartonne avec son Capitaine Marleau sur France 3 et dans Les Invisibles au cinéma, film sur les exclus. Ladj Ly prend sa caméra pour nous tendre un miroir sur notre société en décomposition avec Les Misérables, sans juger. François Ozon, auréolé d'un grand prix à Berlin avec Grâce à Dieu, a aussi livré un film qui ouvre les yeux, cette fois-ci sur les abus sexuels dans l'Eglise catholique, et leurs conséquences sur l'existence des victimes. En s'aventurant chez les Juifs ultra-orthodoxes de Tel Aviv, Yolande Zauberman, avec M, ne montre pas autre chose: abus sexuels, dévastation psychique, rejet des victimes... De la même région, avec sa fable burlesque et absurde, It must be Heaven, Elia Suleiman poursuit son inlassable lutte pour la paix des peuples dans un monde de plus en plus aliéné et sécuritaire. Avec courage, Waad al-Kateab a filmé Alep sous les bombes dans Pour Sama, exposant l'horreur de la guerre en Syrie.

Naissance des pieuvres

De nombreux nouveaux talents ont émergé, soit autant de promesses cinématographiques. Côté réalisateurs, Levan Akin et Kirill Mikhanovsky, révélés à la Quinzaine des réalisateurs avec respectivement Et puis nous danserons et Give Me Liberty,  ont justement soufflé un vent de liberté autour de "marginaux" avec une vitalité jouissive, que ce soit pour aborder l'homosexualité dans un pays homophobe ou l'exclusion du rêve américain. Côté animation, deux coups de maîtres très loin des standards hollywoodiens ont emballé la critique et fait preuve d'un renouveau esthétique et narratif:  Jérémy Clapin avec J'ai perdu mon corps et Ayumu Watanabe avec Les enfants de la mer. Côté acteurs, on retiendra, la beauté et le charisme de Luca Marinelli dans Martin Eden et Maud Wyler, actrice touche-à-tout et sensible vue dans Alice et le maire, la série Mytho et surtout Perdrix. Sans oublier Mati Diop, qui, avec Atlantique, est l'incarnation de cette promesse de cinéma tant souhaitée, en mariant la fable fantastique, l'épopée romantique et le drame socio-politique avec audace. C'est d'ailleurs le mot qui leur conviendrait le mieux, à chacun.

En liberté !

Ils sont déjà bien installés en haut de l'affiche, et pourtant, ils parviennent encore à nous surprendre. Ils ont tous ce grain de folie nécessaire pour accepter des projets divers ou des films sans barrières. Ils ont tous excellés à des niveaux différents. Qui aurait pu deviner il y a quelques mois qu'Eva Green en astronaute dans Proxima trouverait son plus beau rôle ou que Chiara Mastroianni dans Chambre 212 serait étincelante comme jamais avec un personnage pas très moralement correct? De la même manière, le futur Batman, Robert Pattinson, avec le radical et barré The Lighthouse, et l'éternel OSS 117, Jean Dujardin, hors des sentiers battus dans Le Daim et parfait en contre-emploi dans J'accuse, ont démontré que leur statut ne les bridait pas dans leurs envies de cinéma. Car c'est bien à cela qu'on reconnaît les grands: passer d'une famille à l'autre, sans se soucier des étiquettes. A l'instar d'Anaïs Demoustier (Alice et le maire, Gloria Mundi) et d'Elisabeth Moss (La servante écarlate, Us, Les Baronnes, Her Smell) qui sont à chaque fois justes et convaincantes, peu importe le genre. C'est ce qu'a fait durant toute sa carrière Fanny Ardant, rare césarisée pour un rôle de comédie, dont on perçoit le bonheur de jouer dans La belle époque, elle qu'on ne considère plus comme "bankable". Cette liberté que chacun s'autorise a permis d'ailleurs à la réalisatrice Rebecca Zlotowski de signer à la fois Une fille facile, véritable œuvre personnelle sur le féminin contemporain, et Les sauvages, l'une des meilleures séries françaises, qui plus est politique, de ces dernières années.

120 battements par minute

Ils nous ont fait vibrer avec leur "cinéma". Evidemment, Bong Joon-ho, Palme d'or avec Parasite, est le premier d'entre eux. Son thriller social, dosé parfaitement avec un zest d'horreur et un soupçon de comédie, a été le film palpitant de l'année. Dans le mélange des genres, entre western et drame social, Kleber Mendonça Filho n'est pas en reste avec Bacurau, où le spectacle et le culot sont toujours au service du récit. Tout comme Diao Yinan qui n'hésite pas à revisiter le film noir pour en faire une œuvre d'art avec Le lac aux oies sauvages. Ces films, sous leurs aspects politiques, démontrent qu'il y a encore du grand cinéma possible. C'est d'ailleurs ce que rappelle Martin Scorsese avec son ambitieux The Irishman, coûteux, long, surdimensionné, et presque grandiose, et avec ses prises de paroles coup de poing qui ont créé un débat passionnant sur le 7e art, entre industrie et vision d'auteur. Cette vision intime et personnelle, on la retrouve chez Nadav Lapid qui nous a enthousiasmé avec son film puzzle, Synonymes (Ours d'or), où chaque scène, chaque plan étonne par son imprévisibilité. Et puis, on aurait pu citer Pedro Almodovar, mais c'est son double, Antonio Banderas qui reste dans nos rétines. Douleur et Gloire lui offre une variation infinie sur le même thème, renouant ainsi avec la quintessence de son métier, tout en se révélant sans pudeur, et avec maturité.

Les ogres

Chacun à leur manière, ils ont dévoré l'écran, à chacune de leurs apparitions. Joaquin Phoenix est littéralement le Joker. Le perfectionnisme de l'acteur et la folie de son personnage sont d'ailleurs palpables chez Lupita Nyong'o (Us, Little Monsters) ou chez Christian Bale (Vice, Le Mans 66). Leur exigence n'a rien à envier à ceux qui suivent, mais ils captent la lumière, envahissent l'image et contribuent beaucoup à la réussite de leurs films. On pourrait donc en dire autant, dans des registres un peu moins flamboyants de Mahershala Ali (Green Book, True Detective, Alita : Battle Angel) et de Adam Driver (Marriage Story, The Dead don't die, Star Wars IX). Tous s'imposent par leur prestance physique et leur précision de jeu, peu importe le style de films ou la nature de leurs personnages. Mais en dehors des acteurs, il y a aussi d'autres métiers qui exigent gourmandise, leadership et puissance. On ne peut pas ignorer parmi cette famille Kevin Feige, patron des films Marvel, qui en trois films a rapporté 5 milliards de dollars dans le monde, affirmé son emprise sur le line-up de Disney (y compris Star Wars) et semblé avoir trouvé la martingale pour transformer les super-héros en machines à cash.

Confession d'un enfant du siècle

Guillaume Canet aura réussi un brelan d'as avec Nous finirons ensemble (2,8M d'entrées, 3e plus gros succès de sa carrière), Au nom de la terre (2M d'entrées), et La belle époque (1,3M d'éntrées). Réalisateur ou acteur, cette année fut la sienne, sans qu'il se compromette dans des comédies aux affiches bleutées et criardes. En incarnant un agriculteur dépressif, il a su toucher un large public provincial qui va rarement au cinéma. Après le carton du Grand bain, l'an dernier, il s'est imposé comme l'un des rares talents bankables du cinéma français devant et derrière la caméra. On lui a depuis confié les manettes du prochain Astérix.

Les héros ne meurent jamais

Qu'il soit astronaute au premier plan dans le crépusculaire Ad Astra de James Gray ou doublure cascade d'une vedette sur le déclin dans le jubilatoire Once Upon a Time in Hollywood de Quentin Tarantino, Brad Pitt, 56 ans, est toujours aussi magnétique, beau et cool. Une star de catégorie A, qui remplit un peu toutes les cases précédentes, à la fois ogre et libre, combattant et enfant du siècle (précédent). Il a son style. Capable de s'exhiber torse-poil comme au temps de Thelma et Louise ou de rivaliser avec "Bruce Lee" dans une séquence de combat culte. Il ne semble pas vieillir. Mais il choisit ses films (il se fait rare, a refusé toutes les productions avec super-héros) et surtout ses cinéastes (sa filmographie devient un panthéon assez admirable). De la même manière, comme producteur avec sa société Plan B, il sélectionne des projets engagés, politiques ou sociétaux à l'instar du beau Si Beale Street pouvait parler de Barry Jenkins, du percutant Vice d'Adam McKay et du touchant Beautiful Boy de Felix Van Groeningen.

« Grâce à Dieu » pourra sortir le 20 février dans les salles

Posté par vincy, le 18 février 2019

Grâce à Dieu de François Ozon, Grand prix du jury à Berlin samedi, a été autorisé par la justice à sortir en salles mercredi 20 février, selon les avocats de la défense.

Le réalisateur avait été assigné en référé par l’un des avocats du père Preynat, homme d'église suspecté d’avoir abusé d’enfants dans le diocèse de Lyon, pour obtenir un report de la sortie du film. Le prêtre est suspecté d’avoir abusé de dizaines de jeunes scouts dans les années 1980 et 1990 mais il n’a pas encore été jugé pour les faits qui lui sont reprochés (et filmés comme avérés dans Grâce à Dieu). La date du procès n'est pas encore connue et la présence de messages au début et à la fin du film rappelant l'absence de jugement "suffit à garantir" les droits des présumé innocents.

Selon le juge, "la demande de report n’était « pas proportionnée » à l’atteinte à la présomption d’innocence du père Preynat que pouvait représenter le film."

Quand François Ozon a commencé le tournage du film l'an dernier, tout le monde pouvait penser que le verdict tomberait avant sa sortie. Le litige est dans l'usage des vrais noms de trois présumés innocents. En effet, cette fiction basée sur des faits réels n'a pas modifié le nom de trois "accusés" le cardinal Barbarin, dont le jugement pour « non-dénonciation d’atteintes sexuelles » sera rendu le 7 mars par le tribunal correctionnel de Lyon, le père Preynat et Régine Maire, ex-membre du diocèse de Lyon. Tous les autres noms ont été changés.

L'accusation avait demandé que le film sorte après le procès du père Preynat, ce qui retardait de plusieurs mois la sortie du film.

Celui-ci met en valeur le rôle de l’association La Parole libérée. C'est la construction des liens entre les victimes, de la constitution de cette communauté d'hommes abusés sexuellement qui est au cœur de Grâce à Dieu.

Le film devrait sortir dans plus 300 salles, distribué par Mars films.

Berlinale 2019: Synonymes et Grâce à Dieu grands vainqueurs du palmarès

Posté par vincy, le 16 février 2019

Alors que le Festival se termine avec des températures printanières et un grand ciel bleu, la soirée de la remise des prix de la 69e Berlinale a commencé avec une ombre, la mort de l'acteur suisse Bruno Ganz. Une ovation debout a salué celui qui fut l'un des plus grands comédiens de théâtre et de cinéma germanophones. Et puisqu'on était dans les adieux, ça a aussi été l'occasion de voir un film hommage et un prix honorifique pour le directeur Dieter Kosslick, qui cède les rênes de la Berlinale après 18 ans de service.

Les prix des autres palmarès de la 69e Berlinale
Le bilan de la compétition

Il y a eu un consensus entre le jury et le public puisque la coproduction franco-soudanaise Talking about trees, prix du public Panorama plus tôt dans la journée, a été couronné par le jury, toutes sélections confondues du Prix du meilleur documentaire.

Mais on note surtout que le cinéma allemand s'en sort bien cette année avec l'Ours d'or du court métrage et le Prix du meilleur premier film (toutes sélections confondues). Mais aussi l'Ours d'argent de la réalisation pour Angela Schenalec et le prestigieux Prix Alfred Bauer (pour des films qui ouvrent des perspectives) décerné à une autre réalisatrice: Nora Fingscheidt.

Le jury de Juliette Binoche avait à remettre 6 autres prix pour les 14 films restants. Tout résidait plus dans la hiérarchie des prix que dans le choix des films primés. Le film de Wang Xiaoshuai a récolté les deux prix d'interprétation, s'offrant ainsi une belle victoire sans être dans le haut du tableau. Mais on soulignera avant tout que c'est le cinéma français le grand vainqueur de cette Berlinale, avec l'Ours d'or et le Grand prix du jury distinguant le film le plus parisien de Nadav Lapid et le film de François Ozon, deux films engagés. Déjà primé à Berlin pour 8 femmes (un prix d'ensemble pour ses actrices), il reçoit là le plus important prix de sa carrière alors que l'on saura lundi si son film sortira en salles mercredi.

Que Synonymes soit sacré par un Ours d'or, alors qu'il s'agit d'un film audacieux, aussi burlesque que tragique, drôle que dramatique. C'est aussi la première fois qu'un cinéaste israélien remporte la récompense. Et par le même coup, on souligne que le jury a oublié Dieu existe, son nom est Petrunya, l'un des favoris. Il faut croire que le jury a été sensible au discours de Nadav Lapid: ouvrez les frontières!

Tout le palmarès

Ours d'or: Synonymes de Nadav Lapid
Grand prix du jury: Grâce à Dieu de François Ozon
Prix Alfred Bauer: Systemsprenger (System Crasher) de Nora Fingscheidt

Interprétation féminine: Yong Mei dans Di jui tian chang (So Long, My Son) de Wang Xiaoshuai
Interprétation masculine: Wang Jingchun dans Di jui tian chang (So Long, My Son) de Wang Xiaoshuai

Mise en scène: Angela Schanelec pour Ich war zuhause, aber (I Was at Home, But)
Scénario: Maurizio Barucci, Claudio Giovannesi & Roberto Saviano pour La paranza dei bambini (Piranhas)
Contribution artistique: Rasmus Videbæk pour l'image de Out Stealing Horses réalisé par Hans Petter Moland.

Ours d'or du court métrage: Umbra de Florian Fischer et Johannes Krell, Allemagne
Prix du jury du court métrage: Blue Boy de Manuel Abramovich, Argentine
Prix du court métrage Audi: Rise de Barbara Wagner et Benjamin De Burca, Brésil

Meilleur premier film: Oray de Mehmet Akif Büyükatalay, Allemagne (Perspektive Deutsches Kino)

Meilleur documentaire: Talking About Tree de Suhaib Gasmelbari, Soudan (Panorama)

Berlinale 2019 : une compétition en petite forme

Posté par MpM, le 16 février 2019


Avec sa dernière sélection, Dieter Kosslick ne laissera pas un souvenir impérissable. On le remarque d’année en année, le compétition berlinoise est inégale, souvent décevante, quand ce n’est pas faible, et c’est dans les sections parallèles que l’on fait le plus couramment de belles découvertes, à défaut de retrouver les grands films des mois à venir.

Mais le directeur de Berlin depuis 2001 n’est pas seul à blâmer dans la demi-teinte de sa compétition 2019. Car où sont-ils, ces grands films ? On le répète souvent, même avec la meilleure volonté du monde, aucun sélectionneur ne peut inventer des films qui n’existent pas. Il ne peut pas non plus forcer les réalisateurs de premier plan à venir chez lui quand le si couru Festival de Cannes a lieu à peine trois mois plus tard. D’autant qu’il se murmure sur la Potzdamer Platz que Thierry Frémaux a déjà réservé beaucoup de films pour son édition 2019, parmi lesquels on imagine d’incontournables pointures.

Et puis Kosslick n’a pas eu de chance avec le retrait soudain de l’un des films les plus attendus de cette 69e édition, signés par l’un des rares grands noms de la compétition, One second de Zhang Yimou, officiellement pour des « raisons techniques », et officieusement pour cause de censure pure et simple. De quoi Pékin a-t-il menacé Berlin ? Toujours est-il que le film a été retiré de la sélection trois jours avant sa présentation à la presse. Ceux qui ont la chance de l’avoir vu assurent que le film est excellent, évidemment éminemment politique (il aborde la période de la R"volution culturelle) mais aussi pensé comme une déclaration d’amour au cinéma. On espère réussir à le voir très vite sur les écrans français, et on se prend à rêver d’un coup de force de Cannes, habitué à montrer les films « interdits ». L’ironie de l’histoire est que la Berlinale avait réussi à présenter il y a deux ans Have a Nice day de Liu Jian, alors que le festival d’Annecy avait dû le retirer de sa compétition après que la production du film ait été soumise à de fortes pressions officielles. On ne peut pas gagner à tous les coups, mais l'incident berlinois ne présage rien de bon pour le cinéma chinois dans les mois à venir.

Films à thèmes

Néanmoins, plutôt que d’épiloguer sur les absents, penchons-nous sur ce que l’on a vraiment vu durant cette 69e Berlinale, à savoir seize films venus principalement d'Europe et d'Asie. La compétition 2019 avait quelque chose d’uniforme (pas d’animation, aucun documentaire) et de presque caricatural par rapport à la réputation « politique » de Berlin, dans la mesure où de nombreux films étaient clairement « à thèmes », de la pédophilie dans l’Eglise (Grâce à Dieu de François Ozon) à la famine volontairement provoquée par Staline en Ukraine au milieu des années 30 (Mr Jones d'Agnieszka Hollad), en passant par l’enfance sacrifiée (Systemsprenger de Nora Fingscheidt) ou la mafia (La paranza dei bambini de Claudio Giovannesi).

On a aussi droit à plusieurs de ces fresques historiques dont la Berlinale est également friande, à nouveau Mr Jones (qui s'intéresse à un épisode marquant de la vie du journaliste Gareth Jones) ou So long, my son de Wang Xiaoshuai (la vie de plusieurs couples d'ouvriers chinois sur une trentaine d'années), et à des portraits plus intimes, mais à la volonté d'édification tout aussi élevée, tels que Out stealing horses de Hans Petter Moland (un vieil homme se souvient d'un épisode marquant de son adolescence), The golden glove de Fatih Akin (l'histoire vraie d'un serial killer sordide dans un quartier ultra-populaire de Hambourg), Elisa y Marcela d'Isabelle Coixet (l'histoire vraie d'un couple lesbien dans l'Espagne du début du XXe siècle) ou encore A tale of three sisters d'Emin Alper (portrait d'une famille réunie dans un petit village isolé de montagne, sur fond de mépris de classe).

Ce qui est frappant avec ces films, c'est qu'ils ont en commun une approche classique, parfois même académique pour les moins inspirés, et se rattachent à un "genre" bien défini, immédiatement identifiable, on dirait presque : sans surprise. Et s'ils sont souvent ancrés dans un contexte économique ou politique spécifiques, on a l'impression qu'ils évitent les problématiques ultra-contemporaines (montée des extrêmes, dérives totalitaires, tragédie des réfugiés, urgence climatique...) pour se cantonner prudemment à des thèmes plus généraux, quasi atemporels.

Cela ne remet aucunement en cause leurs qualités (notamment pour les sensibles So long, my son et A tale of three sisters), mais cela renforce l'impression d'une compétition en demi-teinte, aux films parfois un peu interchangeables avec ceux des années précédentes. Et puis certains sont tout de même très faibles, trop faibles pour une compétition de cette envergure. On pense à l’anecdotique Out stealing horses, au maladroit Systemsprenger, au complaisant The golden golve, au bancal The feet on the ground de Marie Kreutzer, et surtout à l’insupportable Elisa y Marcela, qui gâche un sujet en or avec des effets de caméra ridicules et des scènes d’amour totalement kitschs.

Cinq films à retenir

Heureusement, cinq films se distinguent nettement du lot, justement par leur singularité et leur approche cinématographique. Nous avons déjà dit tout le bien que nous pensons du très beau Öndög de Wang Quan'an, qui mêle le conte et l'humour, au service d’une histoire d’amour et de vie, ainsi que de Répertoire des villes disparues de Denis Côté, qui est le seul film en compétition à aborder frontalement la question des réfugiés et le risque du repli sur soi, et à le faire non seulement avec finesse, mais aussi avec humour. Il s'agit très clairement des deux longs métrages les plus excitants de cette course à l'Ours d'or (on les voit haut placés dans le palmarès, avec un grand prix à la clef), avec la merveilleuse comédie grinçante Dieu existe, son nom est Petrunya de Teona Strugar Mitevska, qui propose un portrait au vitriol de la société macédonienne misogyne et craintivement inféodée à l'Eglise.

On ne résiste pas au plaisir de vous en dire plus sur le film, dont l’héroïne Petrunyia est une jeune trentenaire diplômée en histoire qui ne parvient pas à trouver un emploi. On comprend à demi mot qu’en Macédoine, c’est une matière assez superflue, surtout lorsqu’elle n’est pas employée à chanter les louanges du pays (on pense alors au court métrage Bigger Than Life d’Adnan Softic dont nous vous parlions lors du festival de Winterthur).

Après quelques scènes d’exposition piquantes, qui mettent en valeur le nihilisme résigné du personnage, Petrunyia assiste par hasard à une cérémonie religieuse au cours de laquelle une croix sacrée est jetée dans le fleuve (glacé) afin que le plus téméraire plonge pour la ramener. Sur une impulsion, la jeune femme saute à l’eau et remporte la croix. Problème : la tradition veut que seuls les hommes puissent participer à la cérémonie. S’ensuit alors un imbroglio absurde et franchement comique durant lequel la police tente de récupérer l’objet sacré, sans avoir de raison légale de le faire puisqu’elle ne l’a pas volé, tandis qu’un groupe de fanatiques religieux assiège le commissariat pour faire payer à Petrunya son impudence. C’est évidemment à la société macédonienne patriarcale que s’attaque Teona Strugar Mitevska, de même qu’au poids toujours prégnant de l’Eglise dans les affaires politiques ou judiciaires (on notera que l’Eglise en tant qu’institution est bien présente dans cette Berlinale, protégeant les prêtres pédophiles dans Grâce à Dieu, et s’insurgeant de l’histoire d’amour entre Elisa et Marcela). Avec ses dialogues incisifs, son personnage haut en couleurs, et son propos profond sur le pays, Dieux existe, son nom est Petrunya a presque une place assurée au palmarès (ne serait-ce qu’avec un prix d’interprétation), malgré ses problèmes de rythme, et son incapacité, par moments, à aller assez loin dans la satire.

Autre film qui surprend, voire déroute, le survitaminé Synonymes de Nadav Lapid, qui met en scène un jeune homme ayant fui Israël, et souhaitant tout rejeter (jusqu’à la langue) de son pays natal. Il s’agit d’une charge violente contre l’état d’Israel, pour lequel le personnage principal trouve une succession de qualificatifs allant d’odieux à fétide. Elliptique, absurde, drôle et cruel, le film part dans plusieurs directions à la fois, en abandonne en cours de route, digresse, n’allant jamais là où on l’attend. C’est évidemment du cinéma exigeant, peu confortable ou pas très flatteur pour le spectateur, auquel il donne parfois l’impression de passer à côté d’une partie de l’intrigue. Mais on ne peut en même temps déplorer l’aspect uniforme d’une partie de la compétition, et ne pas être sensible à cette expérience cinématographique qui propose quelques scènes fulgurantes, et des dialogues extrêmement brillants que ne peuvent gâcher les moments de creux ou les lourdeurs. Ce serait justice de voir le film au palmarès, même si on ne l’imagine pas sur la plus haute marche du podium (mais au petit jeu des pronostics, on se trompe presque tous les ans).

Déformation de la narration

Enfin, I was at home but... d’Angela Schaenelec tranche lui aussi avec le reste de la sélection. Très formel, il affirme presque agressivement son rejet d’une narration conventionnelle, ce qui l’amène souvent à être une caricature du genre de films qu’il tente d’être. Il ne se donne donc pas la peine de raconter quoi que ce soit, et juxtapose des scènes qui sont autant de moments de creux, ou de parenthèses. Parfois, on croit saisir un embryon d’intrigue (d’où revient ce garçon particulièrement sale ? Qui est ce couple qui se dispute à la fin du film ?), et puis on s’aperçoit qu’il n’en est rien. L’intrigue se joue hors champ, et il ne nous est permis que d’en observer des échos déformés et incompréhensibles. Dommage que la réalisatrice soit si appliquée à laisser le spectateur le plus loin possible du film, et s’évertue à aligner des plans poseurs qui sentent l’exercice de style un peu vain. Sans ces affèteries agaçantes, ce sentiment que le film se croit plus intelligent que nous, on aurait pu apprécier cette déformation de la narration, cette alternance de creux et de non-dits avec des extraits de Shakespeare, cette volonté de déconstruire le film lui-même pour parler de la déconstruction d’une famille et de la perte de repères d’une femme. Cette recherche-là mérite d’être soulignée, et pourquoi pas récompensée par un prix plus modeste, comme celui du jury, ou le tarte à la crème prix Alfred Bauer pour l’innovation, qui va rarement à un film réellement innovant, et pour cause.

Mais une fois évoqués ces 5 films qui sortent véritablement du lot, il faut rappeler qu’évidemment le classicisme n’empêche en rien une récompense, et encore moins la qualité. C’est pourquoi on peut aussi imaginer Grâce à Dieu de François Ozon au palmarès (un prix collectif pour le casting masculin ? Un prix de scénario ?), de même que So long, my son (qui brille lui aussi par son casting, son écriture et sa mise en scène) ou encore A tale of three sisters qui malgré ses tendances au didactisme et à la surenchère, évoque efficacement les rapports de classe en Turquie. Lui aussi bénéficie d’un joli casting, et d’une mise en scène tout en retenue. Et puis il mérite également d’être distingué ne serait-ce que pour la longue conversation durant laquelle deux sœurs parlent de sexualité, suivie par la séquence où celle qui est mariée se jette littéralement sur son mari. On ne voit pas ça tous les jours au cinéma, et encore moins dans un film turc.

Les femmes toujours au centre

On l’aura d'ailleurs compris, les femmes brillaient une nouvelle fois par leur propension à dynamiter les clichés sur l’éternel féminin dans cette compétition berlinoise. Rappelons que l’héroïne d’Öndög prend elle aussi les choses en mains quand il s’agit de sexualité, mais aussi de protection ou de défense (c’est symboliquement elle qui est armée dans la steppe), ou encore qu’Elisa y Marcela raconte le destin incroyable de deux jeunes espagnoles ayant tout sacrifié à leur passion amoureuse.

Ce sont également des femmes qui sont au centre de I was at home, but..., The Kindness of strangers de Lone Scherfig, et The feet on the ground, et une petite fille d’une dizaine d’années dans Systemsprenger. Elles jouent à part égale avec les hommes dans Repertoire des villes disparues, et sont en revanche plus anecdotiques dans des films comme Synonymes, Mr Jones, Out stealing Horses...

Leur sort est enfin moins enviable dans The golden golve de Fatih Akin, puisqu’elles sont les victimes systématiques d’un tueur misogyne et tortueux qui les frappe, les viole et les démembre quasiment dans l’indifférence générale. Il faut bien reconnaître que c’est le seul film de la sélection à aller sur ce terrain, au départ avec une forme d’humour satirique, et de plus en plus complaisamment au fil des meurtres. Le pire est que le comédien du film, Jonas Dassler, pourrait lui parfaitement repartir avec un prix d’interprétation (le rôle semble avoir été écrit pour ça, et c'est vrai qu'il est méconnaissable). Il a tout de même un peu de concurrence dans les films déjà cités, ainsi que dans La paranza dei bambini, dans lequel le comédien principal, Francesco Di Napoli, a un charisme impressionnant.

Une vision d’ensemble des 16 films donne ainsi le sentiment d’un échantillon représentatif d’être humains en quête de quelque chose de concret pour donner de la valeur et du prix à leur vie. Dans un monde où la religion n’est plus un secours (voire une menace), où l’état est inexistant ou au contraire intrusif, et où les idéologies ont prouvé leur inanité, les personnages se tournent vers l’engagement militant (Grâce à Dieu), l’amour (Alicia et Marcela), l’argent (La paranza dei bambini), la famille (So long, my son), la réussite professionnelle à tout prix (The Feet on the ground) ou encore l’espoir que quelque chose arrive enfin (Petrunya). En cela, au-delà des pays et des époques, ils nous sont tous terriblement contemporains.

Berlinale 2019 : Grâce à Dieu de François Ozon, reconstitution sensible rattrapée par l’actualité

Posté par MpM, le 8 février 2019

Première entrée française de cette 69e Berlinale, Grâce à Dieu, le nouveau film de François Ozon aborde la question de la pédophilie dans l'Eglise en relatant l'histoire des victimes du prêtre Bernard Preynat accusé d'attouchements sexuels sur de jeunes scouts dans la région de Lyon. Le film, qui s'est fait en secret, arrive au moment-même où le cardinal Barbarin et Régine Maire, psychologue au service du diocèse, attendent le verdict du procès dans lequel ils sont accusés d'avoir couvert les agissements du prêtre, et avant même que le principal accusé n'ait été jugé. Un recours a d'ailleurs été déposé pour reporter la sortie du film, prévue le 20 février, afin qu'il ne soit pas sur les écrans avant la fin de la procédure judiciaire.

Et le film, dans tout ça ? On comprend que les accusés (qui bénéficient jusqu'au verdict de la présomption d'innocence) ne soient pas particulièrement ravis d'y apparaître sous leur véritable nom, sans le voile pudique de la fiction pure (d'autant que les victimes, elles, n'apparaissent pas sous leur véritable identité). La narration est en effet un mélange de reconstitution quasi documentaire et d'enquête minutieuse racontant comment le premier plaignant a porté plainte contre le prêtre Preynat après avoir tenté une conciliation avortée avec l'Eglise, puis comment d'autres victimes se sont jointes à son combat en montant l'association "la parole libérée".

La première partie du film consiste ainsi notamment en un échange épistolaire (lu en voix-off) entre Alexandre Guérin (Melvil Poupaud) et Régine Maire d'une part, et le cardinal Barbarin d'autre part. Les enjeux y sont clairement posés, entre le besoin qu'éprouve la victime de voir le responsable sanctionné et la volonté de la hiérarchie religieuse d'amener l'affaire sur le terrain du pardon et de la repentance. Ces allers et retours entre les deux "camps", par le biais des lettres et des rencontres, se font sans temps mort, dans une forme de sécheresse narrative qui laisse très peu de place pour la fiction. Du personnage principal, on ne saura que ce qui a rapport à l'affaire, toute digression étant bannie, ou laissée hors champ.

François Ozon dresse ainsi en creux le portrait de l'accusé (pas vraiment à son avantage) mais aussi de Barbarin et de son équipe, présentés comme les gardiens d'une énorme machine rigide et froide qui ne pense qu'à sa propre sauvegarde. Le film décortique alors la stratégie d'évitement du cardinal, ainsi que l'incompréhension agacée, dénuée du moindre tact, de ceux qui l'entourent : "Pourquoi toujours remuer ces vieilles histoires ?" s'exclame l'un des responsables du diocèse.

On suit ensuite successivement deux autres personnages (interprétés par Denis Ménochet et Swann Arlaud) ayant été abusés par le prêtre, qui poursuivent le travail commencé par Alexandre Gérin. Le premier se met en quête d'autres victimes, en créant l'association "la parole libérée", et le second s'engage dans le mouvement, y trouvant un moyen de reconstruire sa vie. Le film bascule plus clairement dans le format de l'enquête, sans céder pour autant aux sirènes du sensationnalisme. L'aspect très clinique de la première partie laisse place à une fiction plus classique, avec quelques scènes qui permettent d'en savoir plus sur les personnages, et notamment d'appréhender les traces laissées, dans leur vie d'adulte, par les abus subis dans leur enfance.

François Ozon propose ainsi un récit sensible et pudique (malgré des flashbacks répétitifs qui n'apportent pas grand chose au récit) sur une tragédie humaine qui est celle des victimes de Lyon, mais qui pourrait être plus largement celle de toutes les victimes d'abus sexuels. Toutefois, difficile de nier que le film se fait plus précisément à charge contre l'Eglise en tant qu'institution toute-puissante qui n'a pas été capable de prendre la mesure de ce qui se passait dans ses rangs, et contre tous ceux qui ont été, volontairement ou non, les complices des agissements du prélat.

Quitte, parfois, à flirter avec un certain didactisme dans son propos. D'autant que les témoignages proposés par le film, ainsi que le récit qui est fait des agissements du cardinal Barbarin ou de ses proches, n'amènent pas vraiment le spectateur à douter de leur culpabilité, ce qui pose un vrai problème éthique. Car si on ne peut reprocher au réalisateur d'avoir voulu raconter "sa" vérité, qui est celle des victimes, on ne peut s'empêcher de s'interroger sur la pertinence de laisser le verdict de fiction s'exprimer avant celui de la justice.

Berlin 2019: François Ozon, Fatih Akin, Denis Côté en compétition

Posté par vincy, le 13 décembre 2018

On connait la présidente du jury, Juliette Binoche, le film d'ouverture, The Kindness of Strangers. Voici les premiers films retenus par la Berlinale pour sa 69e édition.

En compétition, on trouvera Der Boden unter den Füßen (The Ground Beneath My Feet) de Marie Kreutzer, Der Goldene Handschuh (The Golden Glove) de Fatih Akin (photo), Grâce à dieu de François Ozon, Ich war zuhause, aber (I Was at Home, but) de Angela Schanelec, A Tale of Three Sisters de Emin Alper, et Répertoire des villes disparues (Ghost Town Anthology) de Denis Côté.

Par ailleurs le Festival a déjà annoncé trois films hors-compétition dans le cadre de ses soirées de gala: Gully Boy de l'indien Zoya Akhtar, Brecht de l'allemand Heinrich Breloer, et Watergate, documentaire américain de Charles Ferguson.

Swann Arlaud, Melvil Poupaud, Eric Caravaca et Denis Ménochet dans le nouveau film de François Ozon

Posté par vincy, le 9 mars 2018

Cela fait trois semaines que François Ozon est en tournage. Le 12 février dernier, le réalisateur a repris le chemin des plateaux pour son 18e film, Alexandre.

Selon Le Film français, le cinéaste a rassemblé un casting inédit: Melvil Poupaud, un de ses acteurs fidèles (Le temps qu’il reste en 2005, Le refuge en 2010), Swann Arlaud, récent César du meilleur acteur pour Petit paysan, Denis Ménochet (avec qui Ozon avait tourné Dans la maison en 2012 et Eric Caravaca, nommé aux César pour son documentaire Carré 35.

Poupaud, Ménochet et Arlaud interprètent respectivement "Alexandre le catholique, François le baroudeur et Gilles l'écorché vif". En pleine crise de la quarantaine, ils se retrouvent et font le bilan de leur vie.

Alexandre sera produit par Mandarin, déjà en charge des six derniers films de François Ozon, dont le dernier, L'amant double, en compétition à Cannes et l'un de ses pires échecs (390000 entrées en France).

Mars distribuera le film.

Les films de Cannes dominent les nominations aux European Film Awards 2017

Posté par vincy, le 6 novembre 2017

Comme chaque année, les films nordiques et de la "Mittle-Europa" dominent les nominations des European Film Awards. Mais cette année, le cinéma français est particulièrement bien représenté avec 4 films nommés dans trois catégories (film, découverte, animation) et cinq artistes dans les catégories acteur, actrice et scénario. Joli doublé d'ailleurs côté comédiens puisque les Français s'octroient deux nominations côté masculin et côté féminin. Doublé également pour le cinéma français dans la catégorie animation.

Plus globalement, la Palme d'or The Square domine le nombre de citations avec 5 nominations. Dans la catégorie meilleur film, trois films cannois et deux berlinois se disputeront le prix suprême. Le Festival de Cannes est une fois de plus particulièrement bien représenté avec 15 nominations dans les 5 catégories principales révélées hier.

Film européen :
120 battements par minute de Robin Campillo (France)
The Square de Ruben Östlund (Suède)
Faute d’amour d’AndreÏ Zvyagintsev (Russie)
Corps et âme, de Ildikó Enyedi (Hongrie)
De l'autre côté de l'espoir d’Aki Kaurismäki (Finlande)

Réalisateur européen :
Ildikó Enyedi pour Corps et âme
Aki Kaurismäki pour L’autre côté de l’espoir
Yórgos Lánthimos pour pour Mise à mort du Cerf sacré
Ruben Östlund pour The Square
Andrey Zvyagintsev pour Faute d’amour

Actrice européenne :
Juliette Binoche pour Un beau soleil intérieur
Paula Beer pour Frantz
Isabelle Huppert pour Happy End
Florence Pugh pour The Young Lady
Alexandra Borbély pour Corps et âme

Acteur européen :
Nahuel Pérez Biscayart pour 120 battements par minutes
Colin Farrell pour Mise à mort du Cerf sacré
Claes Bang pour The Square
Josef Hader pour Stefan Zweig, Adieu l’Europe
Jean-Louis Trintignant pour Happy End

Scénariste européen :
Ildikó Enyedi pour Corps et âme
Yórgos Lánthimos et Efthymis Filippou pour Mise à mort du Cerf sacré
Andrey Zvyagintsev et Oleg Negin pour Faute d’amour
Ruben Östlund pour The Square
François Ozon pour Frantz

Documentaire européen :
Austerlitz de Sergei Loznitsa (Allemagne)
Communion d’Anna Zamecka (Pologne)
Stranger in Paradise de Guido Hendrikx (Pays-Bas)
The Good Postman de Tonislav Hristov (Bulgarie)
La Chana de Lucija Stojevic (Espagne)

Comédie européenne :
King of the Belgians de Jessica Woodworth et Peter Brosens (Belgique, Pays-Bas, Bulgarie)
The Square de Ruben Östlund (Suède)
Vincent et la fin du monde, de Christophe van Rompaey (Belgique)
Willkommen bei den Hartmanns de Simon Verhoeven (Allemagne)

Découverte européenne-prix Fipresci :
Petit paysan de Hubert Charuel (France)
Godless de Ralitza Petrova (Bulgarie)
The Young Lady de William Oldroyd (Royaume-Uni)
Été 93 de Carla Simón (Espagne)
The Eremites de Ronny Trocker (Allemagne)

Film d’animation européen :
Ethel & Ernest de Roger Mainwood (Royaume-Uni)
Louise en hiver de Jean-François Laguionie (France)
La passion Van Gogh de Dorota Kobiela et Hugh Welchman (Pologne, Royaume-Uni)
Zombillénium d’Arthur de Pins et Alexis Ducord (France)

Cannes 2017: quels habitués pourraient revenir sur la Croisette?

Posté par vincy, le 7 avril 2017

Dans quelques jours, Thierry Frémaux va présenter le programme de la sélection officielle cannoise. Un peu plus tôt que prévu pour un festival qui commencera un peu plus tard que d'habitude, élection présidentielle française oblige. Il y aura des habitués, des espoirs montants et des auteurs réputés. Le cocktail habituel.

Les "abonnés" du Festival sont nombreux à être dans la course, mais ils ne seront pas tous élus. Ainsi le film Mektoub is Mektoub d'Abdellatif Kechiche ne pourra certainement pas faire le déplacement puisque sa saga familiale a donné finalement deux films (Les dés sont jetés, Pray for Jack) et sort ainsi de la zone contractuelle avec son financeur, France Télévisions. Une procédure risque d'empêcher le cinéaste palmé d'être à Cannes cette année. De même rien ne dit que Amant double de François Ozon ne soit prêt.

Pour le reste, les films suivants ne seront pas tous en compétition, ou même en sélection officielle. Certains opteront aussi pour une première plus tardive à Venise ou Toronto, quand d'autres ne trouveront tout simplement pas leur place dans le menu équilibriste du sélectionneur.

La bataille française va faire rage, comme chaque année. Car, aux titres suivants, il faut ajouter ceux que nous mentionnerons dans nos articles autour des étoiles montantes ou des grands auteurs (plus rares sur la Croisette): Jeannette de Bruno Dumont, Redoutable de Michel Hazanavicius (qui pourrait être un film d'ouverture), Les fantômes d'Ismaël d'Arnaud Desplechin, Barbara de Mathieu Amalric, Nos années folles d'André Téchiné et D'Après une histoire vraie de Roman Polanski sont les grands noms les plus propices à entrer dans la compétition.

Côté européen, on attend du poids lourd avec de multiples palmés et primés cannois: The Killing of a Sacred Deer de Yorgos Lanthimos, Submergence de Wim Wenders, The Square de Ruben Östlund, You Were Never Really Here de Lynne Ramsay, A Gentle Creature de Sergei Loznitsa, Happy End de Michael Haneke (on peut parier sur celui-là), In The Fade de Fatih Akin, Loveless d'Andreï Zyaguintsev, Thelma de Joachim Trier, Superfluous Man de Kornel Mundruczo et Wild Pear Tree de Nuri Bilge Ceylan.

D'Asie, on attend A Radiance (Hikari) de Naomi Kawase, The Third Murder de Hirokazu Kore-eda, Before We Vanish de Kiyoshi Kurosawa et La caméra de Claire de Hong Sang-soo. Ce dernier film est, avec le Hzneke et le Bozon, l'un des trois films avec Isabelle Huppert qui pourrait monter les marches.

D'Afrique, on pourrait revoir Mahamat-Saleh Haroun (Une saison en France).

Enfin, des Amériques, le contingent d'abonnés n'est pas en reste: Wonderstruck de Todd Haynes, The Beguiled (Les proies) de Sofia Coppola, Downsizing d'Alexander Payne (même si rien n'est certain sur l'achèvement du film qui nécessite pas mal d'effets spéciaux), Logan Lucky de Steven Soderbergh, et bien sûr Wonder Wheel de Woody Allen (forcément hors-compétition). Plus au sud, Zama de Lucrecia Martel, April's Daughter de Michel Franco et Where Life is Born de Carlos Reygadas tiennent la corde. Comme on le verra au fil de cette série ce pourrait être une année très mexicaine.