Fin de tournage mouvementé dans une Tunisie bouleversée pour La soif noire

Posté par vincy, le 19 janvier 2011

La révolte tunisienne risque de ne pas faire les affaires du producteur Tarak Ben Ammar, neveu de l'épouse de l'ancien président Habib Bourguiba. Exilé en France depuis que sa tante a été répudiée par le régime de l'époque, il a pu revenir en grâce auprès du pouvoir tunisien, dans son pays de coeur, au début des années 2000 grâce à son portefeuille et ses relations : ainsi il fait venir le tournage de Star Wars dans le sud-tunisien. Copropriétaire de la chaîne de télévision Nessma (avec Silvio Berlusconi), actionnaire principal du groupe Éclair, fondateur du groupe Quinta Communications (distributeur, spécialiste en post-production), il a aussi lourdement investit dans les studios de cinéma d'Hammamet, l'Empire Studios, qui s'étendent sur 10 hectares pour accueillir les productions internationales les plus massives. C'était ici que furent tournés en leurs temps Le Messie de Rossellini, Les Aventuriers de l'arche perdue de Spielberg, Jésus de Nazareth de Zeffirelli, La Dernière Légion de Doug Lefler, Pirates de Roman Polanski ... Il en a fait le QG des tournages des séries des télévisions et des plus importants budgets cinématographiques italiens de Silvio Berlusconi comme Baaria, de Giuseppe Tornatore.

Cependant, ces liaisons dangereuses risquent de lui coûter cher.

Actuellement, son principal souci n'est pas la fuite de son "ami" Zine el Abidine Ben Ali. Il a beau jeu sur Europe 1 (hier matin) de trouver "salutaire" la révolte tunisienne. Mais ce proche des princes des Emirats et d'Arabie Saoudite a bénéficié des décisions de Ben Ali, notamment en 2004 quand il a pu lancer sa chaîne de télévision. Si aujourd'hui il se félicite de cette "révolution populaire exceptionnelle" et s'il justifie sa ferveur en soulignant qu'il a donné la parole sur sa chaîne de TV à des opposants et des journalistes censurés, il aurait aussi signé une pétition en août 2010 appelant Ben Ali à un nouveau mandat en 2014. Mais c'est aussi vrai que sa chaîne de télévision a été la première à diffuser des images du soulèvement dans la rue.

Face à ses paradoxes, Ben Ammar  a envoyé un communiqué de presse, voulant sans doute rassurer ses partenaires financiers sur sa production actuelle, La soif noire (Black Gold), de Jean-Jacques Annaud (voir actualité du 18 mai 2010). Manière de dire : "tout va bien, Madame la Marquise" et de protéger ses intérêts en Tunisie. D'autant qu'avant la révolte, il avait déjà du gérer le délicat problème d'un décès de figurant sur le plateau, en novembre.

40 millions d'euros, la Warner et Universal en distributeurs internationaux et un casting hollywoodien (Antonio Banderas, Tahar Rahim, Freida Pinto, Mark Strong) : voilà l'un des films les plus périlleux de l'année.

Les émeutes révolutionnaires ont "officiellement" peu affecté le tournage. Le clap de fin devait être donné il y a quelques jours. Finalement, il a pris un peu de retard. Deux jours selon le producteur, qui devraient servir à des scènes intérieures.

Si Pinto est restée sur place, Banderas en a profité pour quitter la Tunisie, pour raisons professionnelles. Et avec Ben Ammar, ils ont été contraints à un "plan média" très select, là encore pour rassurer, et se mettre dans le bon camp.

Ironiquement le film traite des conflits de la Péninsule Arabe au moment de la découverte de l'or noir, quand tradition et modernité, religion et capitalisme commençaient à s'affronter.

Le tournage a donc continué, vaille que vaille, vendredi (quand Ben Ali s'est enfui) et samedi avant d'être interrompu en début de semaine, pour reprendre jeudi 20 janvier. Les équipes n'étaient pas coupées des événements, mais la pression était suffisamment intense pour ne pas se déconcentrer. Antonio Banderas a déclaré il y a quelques jours à CNN, sur son lieu de travail, qu'il espérait une issue pacifique et que le pouvoir prendrait en compte les aspirations de ces jeunes générations qui feront la Tunisie de demain. "Il faut qu'ils croient en eux et il faut qu'ils se battent pour ça."

From Montfermeil with love…

Posté par vincy, le 16 octobre 2008

Du côté de Montfermeil, bourgade de la "banlieue" parisienne, ça chauffe. Luc Besson a affirmé mercredi que "si la sécurité n'est pas assurée", il repoussera ou annulera le tournage du film From Paris with love produit par sa société Europacorp, après l'incendie volontaire lundi de dix voitures de la production.

Pourtant ce thriller semblait déjà être le parfait modèle d'intégration. Besson, qui ne ménage pas ses efforts pour sortir les cités de leur destin fatal de zones oubliées, avait lancé une grande campagne auprès de la presse : John Travolta (et Jonathan Rhys Meyers) vont tourner dans la cité des Bosquets. Mais Besson, producteur du film de Pierre Morel (Banlieue 13, Taken) est venu annoncer aux figurants recrutés parmi les habitants qu'il annulait le tournage, considérant que les conditions de sécurité n'étaient pas réunies.

Le maire (UMP), Xavier Lemoine, a souhaité que cette décision soit réversible, et affirmé que cette situation le mettait "dans une situation difficile à gérer" en générant une énorme frustration parmi les habitants, et des tensions. Un rédacteur de France 2 a été roué de coups mardi à la mi-journée par trois personnes près des lieux de l'incendie des voitures, et son caméraman s'est fait dérober sa caméra.

Europacorp a officiellement suspendu le tournage et avoue rechercher un autre site. Le plan de travail a été changé pour s'adapter à l'agenda, serré, de Travolta. Pourtant l'idée était belle. Une centaine de personnes (figurants et jeunes chargés de la sécurité) avaient été recrutés. Certes, le maire peut invoquer la colère des habitants, mais qui a incendié les voitures ? Une dizaine de gamins selon le producteur.

Besson, sur Europe 1, a déclaré : "Les équipes travaillent avec les gens de Montfermeil depuis deux mois. On essaie de faire de l'emploi au maximum, mais je ne suis pas l'Etat . Je suis un chef d'entreprise. Il y a 80 techniciens qui travaillent sur le film. Une maquilleuse, quand elle vient le matin, ce n'est pas pour se prendre une pierre. Imaginez que quelque chose se passe et que quelqu'un se prenne une pierre...".

Selon The Independent, la police enquête sur un gang local qui essayait d'extorquer Europacorp afin d'assurer la protection des lieux. Un film dans le film.