[We miss Cannes] Les 7 merveilles de Pedro Almodovar

Posté par vincy, le 19 mai 2020

Tandis que Ciné+ Emotion diffuse actuellement un Cycle Almodóvar, et Canal + propose son dernier film Douleur et Gloire, repassons-nous ses 7 films sélectionnés à Cannes. Seulement sept. "Je me souviens que Pedro Almodovar m'en a longtemps voulu de n'avoir pas sélectionné à Cannes Femmes au bord de la crise de nerfs. Je ne lui donne pas tort" écrivait Gilles Jacob dans Les pas perdus en 2013. Jacob se rattrapera en le nommant membre du jury en 1992.

Mais il aura donc fallu attendre 1999 pour voir le 13e film du cinéaste espagnol à Cannes. Pedro Almodovar fêtait cette année-là ses 50 ans.

Si Cannes n'a pas eu deux de ses chefs d'oeuvres - Femmes au bord de la crise de nerfs et Parle avec elle -, le festival a rarement manqué le rendez-vous avec celui qui deviendra le président du jury en 2017. Le cinéaste espagnol le plus récompensé dans le monde depuis quatre décennies n'est pourtant reparti qu'avec trois trophées : le prix de la mise en scène (Tout sur ma mère), un prix du scénario et un prix d'interprétation féminine collectif (Volver) et un prix d'interprétation masculine (Douleur et gloire l'an dernier). Cela peut sembler injuste, sous-estimé. On gage qu'il aura un jour une Palme d'honneur à défaut d'avoir eu la Palme d'or.

1999 - Tout sur ma mère (compétition)

A coup sûr, une Palme d'or n'aurait pas été superflue pour cet immense mélodrame au féminin, qui remportera au cours de l'année Goyas, César, Oscar... Avec Cecilia Roth, Marisa Paredes, Candela Peña, Antonia San Juan, la jeune Penélope Cruz et Toni Cantó, ce récit généreux et tragique, sur le don et la perte, a marqué un virage dans la filmographie du cinéaste, l'emmenant vers des territoires plus mâtures, et des récits plus complexes.

2004 - La mauvaise éducation (hors-compétition, ouverture)

Un film noir par excellence. Almodovar aborde à la fois l'abus sexuel, l'emprise de la religion et les séquelles psychologiques des victimes. Gael García Bernal, Fele Martínez, Daniel Giménez Cacho, Lluís Homar et Javier Cámara composent toutes les nuances de cette passion sombre, où, pour la première fois, les femmes sont complètement absentes.

2006 - Volver (compétition)

Cette fois-ci, il revient avec un film choral au féminin, conviant son ancienne muse - Carmen Maura - et sa nouvelle - Penelope Cruz. Avec un sens impeccable de la mise en scène, du cadrage à la lumière, cette histoire de meurtre et de fantômes, de passé et de présent, de secrets et de mensonges, bouleverse de nouveau le public et place le cinéaste au-dessus du lot, une fois de plus.

2009 - Etreintes brisées (compétition)

Entouré de fidèles - Penélope Cruz, Lluís Homar, Blanca Portillo, José Luis Gómez, Lola Dueñas, Rossy de Palma - ce drame aux multiples références cinématographiques (principalement américaines) renvoie aux films d'Almodovar des années 1990, quand il se cherchait entre fiction et autobiographie, entre films noirs et récits obsessionnels. Une quête permanente où il tatonne à l'aveugle, comme son héros.

2011 - La Piel que habito (compétition)

Sans doute son plus grand film fantastique, à la fois terrifiant et tourmenté, avec le grand retour d'Antonio Banderas devant la caméra de Pedro. Le casting mélange nouvelles têtes et habitués: Elena Anaya, Marisa Paredes, Jan Cornet, Blanca Suárez, Roberto Álamo et Bárbara Lennie. Une fois de plus, Almodovar ne parvient pas à créer un personnage masculin sympathique dans cette histoire d'emprise et d'identité glaçante. Mais le cinéaste relève le défi d'un thriller psychologique de haute volée.

2016 - Julieta (compétition)

Film plus humble, et dans la lignée de ses récits tragico-romantiques, cette histoire de retour dans le passé, de regrets et de pardon, est porté par des acteurs assez neufs dans l'univers du cinéaste, qui cherche alors, sans doute, à se renouveler: Emma Suárez, Adriana Ugarte, Daniel Grao, Inma Cuesta, Michelle Jenner, Darío Grandinetti et Rossy de Palma. Le réalisateur parvient surtout à prouver qu'il est un expert dans les récits voyageant dans le temps, sans perdre le fil des névroses de ses personnages.

2019 - Douleur et gloire (compétition)

Sans aucun doute, son film le plus personnel, le plus intime, et le plus audacieux. Formellement, avec toutes sortes d'astuces de mise en scène. Narrativement avec des ellipses et des allers retours dans différentes époques. Et bien entendu dans cette réalisation aride où Antonio Banderas, à son meilleur niveau, incarne son double et transmet tout ce qu'il faut d'émotion et de pudeur. Ne négligeons pas la lumière dans cette noirceur: une ode au cinéma, un hommage à sa mère (sublime Penelope Cruz) et un hymne proustien sensuel sur les origines du désir. Enfin cette panne d'inspiration lui permet de filmer les hommes avec un autre regard.

Bonus: 2014 - Les Nouveaux sauvages (compétition) - producteur

Film à sketches argentin sur la rage et la colère qui régissent le monde contemporain, les inégalités et les injustices qui poussent à se révolter quitte à réveiller l'animal en soi, cette comédie noire de Damián Szifron s'avère hilarante sous sa moquerie et assez cynique si on gratte le vernis de ce délire jouissif. Avec El Deseo, Almodovar et son frère Agustin sont des producteurs respectés: ils ont notamment financé les films L'ange (Un certain regard), El Clan (Venise) ou La femme sans tête (en compétition à Cannes).

BAFTA : Les britanniques préfèrent Coco au Prophète

Posté par vincy, le 22 janvier 2010

Les BAFTA, équivalent des César en Grande-Bretagne, ont cette particularité qu'ils sont souvent plus Américains que les Oscars. Dans la catégorie meilleur film, un seul film anglais est cité parmi les cinq.  Une catégorie meilleur film britannique a même été créée pour valoriser le cinéma local. On y retrouve An Education, Fish Tank (adoré à Cannes), In the Loop, Moon (coup de coeur de notre directeur artistique) et Nowhere Boy (sélectionné au prochain festival de Sundance).

Le cinéma britannique, sinon, est très peu présent dans les catégories principales - réalisateur, scénario, acteur, seconds rôles... Une honte quand on sait le talent de leurs comédiens. A force de singer Hollywood...

Notons que dans la catégorie meilleur film en langue étrangère, Morse, Le Ruban blanc, Etreintes brisées, Un prophète et Coco avant Chanel se disputeront le prix. Deux films français qui ont chacun des mérites. Un prophète est le film français le plus primé de l'année depuis son Grand prix du jury au Festival de Cannes. Il est retenu parmi les 9 films pouvant coucourrir à l'Oscar du meilleur film étranger. Coco avant Chanel est le film français le plus populaire à l'export avec bientôt 6 millions d'entrées en dehors de la France.

Il est intéressant de noter que le film d'Anne Fontaine a aussi reçu d'autres nominations : meilleur costume, meilleur maquillage, et surtout meilleure actrice pour Audrey Tautou. Un prophète  n'est nommé qu'une seule autre fois avec Tahir Rahim, pour le prix Orange du meilleur espoir. Il a en face de lui une certaine Kristen Stewart...

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Toutes les nominations

Almodovar snobé par les Goyas

Posté par vincy, le 12 janvier 2010

Les Oscars espagnols ont révélé leurs nominations. Grand favori, sans trop de surprise, Cellule 211 qui cumule 16 nominations dans à peu près toutes les catégories. Le 4e film de Daniel Monzon, qui sortira en mai en France, a été l'un des trois gros succès nationaux au box office espagnol. Agora, champion local du B.O., d'Alejandro Amenabar, est aussi en très bonne position, y compris avec Rachel Weisz dans la catégorie de la meilleure actrice, avec 11 nominations. L'autre candidat cumulard c'est le film argentin Le secret de tes yeux, avec 9 nominations.

On constate surtout que les Goyas ont complètement snobbé Pedro Almodovar malgré la beauté entêtante d'Etreintes brisées. Il a été retenu dans les catégories meilleure actrice (Cruz), meilleurs costumes, meilleure musique, et meilleur scénario original.

Côté meilleur film étranger, la France oppose sa Palme d'or (Entre les murs) et son plus gros succès populaire (Bienvenue chez les Ch'tis) au multi-oscarisé Slumdog Millionaire et au film fantastique le plus primé de ces dernières années, Morse.

Bilan 2009 : 200,85 millions d’entrées en France

Posté par vincy, le 7 janvier 2010

Qui a dit que le piratage menaçait le cinéma? Les chiffres sont là pour démentir les pythies. Avec 200, 85 millions d'entrées en France en 2009, le cinéma a fait son meilleur score en 27 ans! Malgré tous les concurrents : Canal +, VOD, Internet, jeux vidéos, la TNT... sans parler de la grippe A. Finalement tout cela ne décourage pas les spectateurs de sortir de chez eux, et de partager ce loisir collectif en 2009. Pas si ringard que ça d'aller au cinéma. Et la tendance est générale : la hausse du box office est explosive en Chine, incroyable en Allemagne, impressionnante en Espagne. Et aux Etats-Unis le cinéma a davantage rapporté en salles qu'en achat et location de DVD.

Cette année, le cap des 200 millions a donc été franchi. + 5,7% par rapport à l'an dernier.  Presqu'ausisi bien qu'en 1982, quand Canal + n'existait pas et que Première, Positif et Les Cahiers monopolisaient le débat critique.

C'était d'autant plus inattendu que l'an dernier, avec le phénomène Bienvenue chez les Ch'tis, personne neétait très optimiste sur la fréquentation des salles cette année. Deux semaines avant Noël, les prévisionnistes espéraient un chiffre aux alentours de 198 millions de spectateurs. C'était sans compter le phénomène Avatar. Le mois de décembre et, en général le second semestre, a été plus que dynamique. Avatar va d'ailleurs finir largement au dessus des 10 millions d'entrées, devenant le leader annuel. Cela confirme l'énorme impact de la 3D, renforcé par le dauphin du podium, L'âge de glace 3, précédent détenteur du record de fréquentation de salles 3D. Le dessin animé de la Fox, avec Harry Potter 6,  Là-haut et Public Enemies, a permis au mois de juillet d'attirer 10% des entrées de 2009.

Du coup, la part du cinéma français diminue fortement (37% contre 45%). Arthur et les Minimoys 2 n'a pas renversé la tendance. Le Petit Nicolas restera la seul gros succès national de l'année, devant le dessin animé de Besson et LOL.L'absence de 3D dans la production nationale pourrait causer rapidement un véritable fossé avec les plus jeunes spectateurs, désormais habitués au format.

Les productions américaines ont capté la moitié des billets vendus et les films d'autres pays ont réussi à séduire un spectateur sur huit, avec en tête le suédois Millénium, le sud africain District 9, l'espagnol Etreintes Brisées et le japonais Ponyo sur la falaise.

Mais ces beaux chiffres ne doivent pas masquer une dure réalité. Ce sont les multiplexes qui en ont le mieux profité (+8%). Là encore, grâce à la 3D. Les petites salles ont même vu leurs chiffres stagner. Les moyennes salles ont connu une croissance, certes, maisdeux fois moins fortes que les complexes de plus de 450 000 entrées. Leur crise financière risque d'en voir disparaître beaucoup, au profit d'une concentration toujours plus vorace. Elle menace donc un rapport à la proximité mais aussi à la diversité des oeuvres.

On peut se réjouir du triomphe d'Avatar, des 50 films qui ont dépassé le million d'entrées. On peut s'inquiéter de la disparition d'un cinéma plus confidentiel et moins spectaculaire. Il ne faudrait pas que le cinéma devienne de l'opéra comme le prophétisait en 1998 un certain... James Cameron.

Les European Film Awards confirment Le Ruban Blanc

Posté par vincy, le 13 décembre 2009

12 décembre, au coeur de l'Allemagne industrielle, les Oscars européens, appelés European Film Awards, ont été décernés dans la plus grande discrétion. Michael haneke en sort grand gagnant. Il avait déjà emporté le trophée en 2005, avec Caché. Son Ruban blanc remporte les trois récompenses les plus convoitées : film, réalisateur, scénario. Il ne laisse au Prophète d'Audiard que l'intérprétation masculine et un prix d'excellence pour le son. Avec les honneurs pour Loach et Huppert, on aurait pu se croire dans une filiale du Festival de Cannes.

Le public, sans surprise, a voté poru Slumdog Millionaire. Aussi coloré et vif, contemporain et musical que Le Ruban blanc est en noir et blanc, contemplatif, historien et philosophique.

Le Ruban blanc : meilleur film ; meilleur réalisateur (Michael Haneke) ; meilleur scénario

Un prophète : meilleur acteur (Tahar Rahim) ; prix d'excellence pour le son

The Reader : meilleure actrice (Kate Winslet)

Slumdog Millionaire :  Prix du public ; Meilleure photographie (ex-aequo)

Antichrist : Meilleure photographie (ex-aequo)

Etreintes brisées : Meilleure compositeur musical (Alberto Iglesias)

Katalin Varga : Prix de la découverte

Mia et le Migou : Meilleur film d'animation 

Poste Restante : meilleur court-métrage

The Sounds of Insects - Record of a Mummy : prix ARTE du meilleur documentaire

Tatarak : prix FIPRESCI de la critique

Prix pour l'ensemble d'une carrière : Ken Loach

Prix pour la contribution européenne au cinéma mondial : Isabelle Huppert

Meilleur film européen : le public est appelé à voter

Posté par vincy, le 1 septembre 2009

L'European Film Academy va fêter son 22e anniversaire et décernera ses prix le 12 décembre prochain, à Bochum, en Allemagne. D'ici là, les européens peuvent voter en ligne sur www.peopleschoiceaward.org pour choisir le meilleur film européen. Si Slumdog millionaire part largement favori, il faudra se méfier du très populaire Millénium. Parmi les nominations, on trouvera étrange la représentation française par Coco avant Chanel et pas par Un Prophète, la présence incongrue du Transporter 3 et l'absence du Ruban Blanc, Palme d'or. De quoi discréditer l'événement et ne pas forcément crédibiliser le palmarès auprès des cinéphiles.

Allemagne : The Baader Meinhof Complex ; Belgique : Fly me to the Moon ; Espagne : Etreintes brisées ; France : Coco avant Chanel ; Italie : Le déjeuner du 15 août ; Royaume Uni : The Duchess, Slumdog Millionaire, Transporter 3 ;  Suède : Millénium, Morse

Le nombre d’or : 18 679

Posté par vincy, le 22 mai 2009

Il y a en effet 18 679 spectateurs qui ont vu Etreintes brisées, de Pedro Almodovar, lors de son premier jour d'exploitation à Paris et environs. C'est moins que Volver en 2006. C'est aussi un peu moins que La nuit au musée 2 sorti le même jour. Mais c'est beaucoup plus que Vengeance, sélectionné à Cannes lui aussi (4 503 spectateurs). Cela faisait du film espagnol, le deuxième film le plus vu ce jour-là.

Cannes 2009 : Qui est Tamar Novas ?

Posté par vincy, le 19 mai 2009

cnz_tamarnovas.jpgDans Etreintes brisées, il est le lien : celui entre le réalisateur aveugle et la vie visible, entre sa mère et le cinéaste, entre le présent qu'il regarde et le passé qu'il n'a pas connu. Il est celui à qui l'on raconte une histoire, celle d'une passion qui brûla ses protagonistes. Tamar Novas a des airs de Banderas quand il était jeune. Pedro Almodovar en a fait le jeune parmi les vieux (Lluis Homar, Blanca Portillo). Il n'a pas encore 23 ans quand il monte les marches du Festival de Cannes pour ce film.

En 1999, il joue un second rôle, un gamin, dans La lengua de las mariposas, prix Goya du meilleur scénario (parmi 13 nominations) et prix du public au festival de Cinespana de Toulouse. Il avait participé à un casting dans sa ville, Saint Jacques de Compostelle, et avait été choisi. Voilà comment il a fait ses premiers pas dans le milieu artistique.

On ne le reverra que cinq ans plus tard. Mais pas n'importe où. Alejandro Amenabar l'engage pour jouer dans Mar Adentro, où il devient le neveu de Javier Bardem. Magie du cinéma. Vue par 4 millions de spectateurs en Espagne, cette oeuvre sur l'euthanasie, où l'émotion vous submerge, a gagné l'Oscar du meilleur film étranger, deux European Film Awards, de multiples récompenses dans les festivals, le Grand prix au festival de Venise, une nomination aux César... et 14 prix Goyas (parmi 15 nominations)! Et Tamar Novas ne repart bredouille puisqu'il gagne un Goya du meilleur nouveau talent.

Avec son allure de top-model, il joue dans quelques courts, un rôle d'apprenti dans Les fantômes de Goya (de Milos Forman), quelques appairtions à la télévision... Il fait ses armes avec 60 épisodes de la série "A Vida por diante" et revient sur grand écran en 2008 avec un comédie d'horreur, ¡Maldito bastardo!. Le film est présenté au festival de Sitgès, mais pas encore diffusé au cinéma. Nul ne doute que le distributeur va profiter de la notoriété de Novas, en couverture d enombreux magazines après la sortie des Etreintes brisées en Espagne. Le film est, pour l'instant, le 2e film espagnol le plus vu dans son pays cette année.