Vesoul 2018 : Paroles (et actes) de femmes

Posté par kristofy, le 6 février 2018

Le mouvement #MeToo popularisé par des actrices américaines depuis octobre continue de s'étendre : à propos de diverses violences aux femmes (harcèlement, agression...), depuis octobre, les révélations et autres bad buzz, tribunes et contre-tribunes féministes s'enchaînent. Il est beaucoup question partout de 'libération' de la parole de la femme, mais pas assez encore de questions à propos d'égalité salariale ou d'une meilleure représentation au sein de plusieurs instances dirigeantes (en politique tout comme dans des entreprises, mais aussi dans les structures de financement de films).

#MeToo n'est pas un phénomène uniquement occidental. Par exemple, depuis début janvier, il y a de plus en plus de #YeWoShi en Chine. Le Festival des Cinémas d'Asie de Vesoul avait prévu depuis plusieurs mois une sélection thématique "Paroles de femmes" avec plus d'une vingtaine de films à (re)découvrir dont plusieurs en avant-première. Si depuis quelques mois on parle de plus en plus aux Etats-Unis, ça fait plusieurs années qu'en Asie, non seulement on parle, mais en plus on agit comme par exemple en Inde, au Népal ou en Iran. Les problématiques sont bien plus complexes que le comportements de prédateur de quelques hommes : l'oppression est subie par l'organisation du pouvoir politique et religieux, les notions de liberté ou d'égalité sont encore à conquérir...

En 2011 la star asiatique Michelle Yeoh est dirigée par Luc Besson pour The Lady, un film biographique en hommage au combat de Aung San Suu Kyi assignée à résidence (emprisonnée chez elle, et isolée de sa famille) durant plusieurs années pour la tenir à l'écart des élections en Birmanie. On y entend cette phrase-clé : "Vous ne pensez peut-être pas à la politique, mais la politique elle pense à vous". Depuis, la Prix Nobel est au centre des critiques pour son ambiguïté sur le génocide et l'exil des Rohingyas.

La réalisatrice israélienne Elite Zexer s'est fait connaître avec un premier film passé au festival de Berlin en 2016 après avoir gagné un Grand prix du jury à Sundance pour Tempête de sable.

Des traditions patriarcales permettent à un homme de prendre une seconde épouse, de répudier la première s'il le désire, et surtout d'interdire à sa fille de fréquenter l'élu de son cœur pour la marier à un autre homme qu'il aura lui-même choisi. Le "tu ne peux pas me garder enfermée ici" de la jeune fille sera bien faible par rapport au "tu épouseras qui je te dirais" de son père. Le rôle du père est plus subtil qu'il n'y parait car il est 'obligé de' et 'forcé de' suivre les traditions, et son ainée qui souhaite autre chose finira par s'y plier pour l'honneur de sa famille, avec l'illusion (vaine) que ça ne se reproduira pas pour sa petite sœur...

Cette liberté refusée de se marier librement est d'ailleurs le sujet de biens d'autres films, comme le récent Noces de Stephan Streker en Belgique à propos d'une famille originaire du Pakistan.

Une lycéenne est déjà enceinte, sans l'avoir dit à sa famille. Pourtant, on lui a choisi trois jeunes hommes du Pakistan comme potentiel futur mari : "elle ne rentre pas, elle a dit que si on ne l’obligeait pas à se marier alors elle rentrait, elle ne veut pas se marier, et tant qu’on veut la marier elle ne rentre pas". Son frère la comprend un peu tout en suivant davantage le point de vue de son père. Sa grande soeur qui a vécu la même situation l'incite à obéir à ce mariage prévu avec un inconnu approuvé par les parents : "évidement que c’est injuste, on est des femmes qu’est ce que tu crois, on ne peut se révolter que si on peut changer les choses, sinon il n’y a qu’une seule chose a faire, c’est accepter". Là encore un renoncement. A noter que Noces est nommé pour le César du meilleur film étranger et qu'il vient de recevoir en Belgique le Magritte de la meilleure actrice dans un second-rôle pour Aurora Marion. A Angoulême, il avait réussit un doublé : meilleure actrice pour Lina el Arabi et meilleur acteur pour Sebastien Houbani.

En avant-première au FICA (après être passé par Cannes) et en attente d'une future date de sortie, Marlina la tueuse en quatre actes serait en Indonésie une version de western féministe, et filmé par une femme Mouly Surya (d'après une histoire inspirée par Garin Nugroho , venu à Vesoul en 2013).

Une jeune veuve dans sa maison isolée voit arriver chez elle un gang de sept hommes, leurs intentions sont claires : lui voler tout son bétail pour le revendre, et chacun va la violer. Ils ont l'habitude de faire ça, mais cette femme-là va se défendre: elle va d'ailleurs couper la tête du chef avec un sabre ! Marlina est en route en emportant sous le bras la tête coupée pour porter plainte à un service de police. Parmi le gang, cinq hommes sont morts tandis que les deux autres seront à sa poursuite...

Enfin, finissons avec un film symbolique de paroles de femmes (et de l'actualité de ces dernières semaines): le documentaire No land's song de Ayat Najafi est à (re)voir.

En Iran, les femmes ont interdiction de chanter seules. Entre 2010 et 2013, la caméra suit les démarches entreprises par la musicienne Sara Najafi qui voudrait contrer cette censure en organisant un concert où plusieurs femmes chanteraient devant un public : début du projet, rencontres avec différentes chanteuses à Téhéran et à Paris (avec Jeanne Cherhal, Elise Caron), répétitions, difficultés diplomatiques, arrivée en Iran du groupe, ... Le concert est interdit avant d'être tout de même toléré: "dans ce pays pour beaucoup de choses, on ne donne pas de raisons à un refus"... La loi en vigueur veut qu'une femme ne doit pas parler avec un homme non-intime, ni chanter seule en public, et que la voix chantée d’une femme ne doit pas dépasser une certaine limite dans le cadre du travail et ne pas provoquer de désir. Bref, une femme ne peut plus chanter comme soliste sur une scène depuis des dizaines d'années et le documentaire aborde en parallèle la vie culturelle du pays d'avant 1979. Des femmes voudraient chanter, d'autres (avec le récent mouvement du 'mercredi blanc') voudraient ne plus avoir l'obligation de porter un voile. C'est d'autant plus courageux qu'elles mettent leur vie en péril. Ne l'oublions pas.

Vesoul 2017 : Des femmes et des bébés au palmarès

Posté par kristofy, le 15 février 2017

Le 23ème Festival des Cinémas d’Asie de Vesoul s'est terminée avec sa chaleureuse convivialité habituelle et beaucoup de promesses pour le rendez-vous de l'année prochaine. La manifestation prend de plus en plus d'ampleur localement (avec des lycéens, d'autres salles dans d'autres villes proches, incluant même un débat en duplex, et une programmation post-festival à Paris et ailleurs) et à l'international (au festival de Busan en Corée, on parle autant de Vesoul que de Berlin, pour beaucoup d'invités la ville vosgienne restera leur première étape de découverte de la France...), tant et si bien que de nombreuses séances ont affiché 'complet'. Sur une semaine il y a eu tout de même environ 150 séances et il a fallu en rajouter pour satisfaire la demande.

Nos films préférés

C'est au FICA de Vesoul que l'on voit en avant-première des films comme Tunnel de Kim Seong-hun (sortie le 3 mai), Après la tempête de Kore-eda Hirokazu (découvert à Cannes, sortie le 26 avril), The Bacchus Lady de Lee Je-yong (en ce moment au festival de Berlin), et surtout la riche sélection des films en compétition dont la plupart n'ont pas encore de distributeurs.

Parmi nos préférés il y avait Hotel Salvation de Shubhashish Bhutiani (Inde), Reseba-The Dark Wind de Hussein Hassan (Irak), Baby Beside Me de Son Tae-gyum (Corée du Sud), et 500m 800m de Yao Tian (Chine), ce dernier étant d'ailleurs étrangement complémentaire avec un des films les plus fort d'une autre sélection Blind Mountain de Li Yang...

Le prix du public pour Reseba-The Dark Wind

Comme on le pressentait déjà Reseba-The Dark Wind a fait forte impression sur les festivaliers et repart avec deux prix : prix du public et prix des lycéens.

Mais c'est 500m 800m de Yao Tian qui a gagné le Cyclo d'or du jury international (la cinéaste iranienne Rakhshan Bani-Etemad comme présidente, la réalisatrice géorgienne Rusudan Chkonia, le réalisateur sri lankais Vimukthi Jayasundara et la réalisatrice mongole Byambasuren Davaa) : ce film chinois risque d'ailleurs de ne pas être vu dans son propre pays tant il critique la politique de l'enfant unique en Chine (qui a été assouplie depuis 2016).

Yao Tian, fils unique, Cyclo d'or

Le réalisateur Yao Tian qui était présent à Vesoul avait expliqué que «Je suis né dans les années 80 et je n'ai pas eu de petit frère ou petite sœur à cause de cette injonction de l'enfant unique. Ce n'était pas possible car sinon il y avait une très grosse amende impossible à payer, de plus pour qui avait un travail de fonctionnaire c'était le renvoi de cet emploi. Si jamais une seconde grossesse arrivait tout de même c'était comme dans le film 500m 800m, pas possible de donner naissance à un deuxième enfant, il n'y avait pas vraiment de limite au nombre de mois de grossesse pour un avortement (ndlr : comme une séquence marquante du film). Cette politique de l'enfant unique a durer longtemps et au bout d'un moment il y a eu un vieillissement de la population, c'est pourquoi ça a été changé début 2016 avec l'autorisation d'un deuxième enfant. »

Le titre du film 500m 800m évoque deux endroits voisins où s'est construit le barrage des Trois Gorges : dans le village rural à plus de 800 mètres d'altitudes un second enfant était permis sous certaines conditions (si le premier enfant était une fille, il fallait attendre 3 ans après sa naissance...) mais ses habitants apprennent qu'on leur ordonne de déménager pour être reloger ailleurs, dans des logements plus modernes, plus bas, sous 500 mètres d'altitude... La décision de tout quitter pour les plus âgés est dure, les autres sont séduits par l'avantage d'avoir enfin une école. Une femme du village au dessus des 800 mètres déjà maman d'une petite fille se retrouve enfin enceinte d'un second enfant (ce qui est permis) et la famille bon gré-mal gré déménage donc, mais là où ils arrivent c'est l'application stricte de la politique de l'enfant unique : il lui est interdit de garder son bébé à naître...

reseba the dark windGrossesses, viols, avortements, traditions, maternité: la femme dans tous ses états

A noter que la grossesse était un sujet de société et un sujet de débat dans de nombreux films du FICA de Vesoul cette année, dont certains se retrouvent dans le palmarès. En Chine dans 500m 800m il y a des avortements forcés dans le cadre de la politique de l'enfant unique, dans Blind Mountain il y a des jeunes femmes qui sont vendues et retenues prisonnières et violées pour enfanter dans certains villages avec une majorité d'hommes qui désirent eux une descendance... Le viol est d'ailleurs un drame collatéral en période de guerre comme dans This is my moon de Asoka Handagama ou dans Reseba-The Dark Wind de Hussein Hassan. Dans La belle-mère de Samanishvili de Edgar Shengelaia le remariage d'un patriarche implique un futur bébé possible et donc la menace que son héritage soit divisé: on lui cherche une femme stérile. À l'inverse dans The Hunt de Vasantha Obeysekere un bébé né d'une liaison incite une femme à retrouver l'homme géniteur pour l'obliger à sa promesse de se marier avec elle. Quand une femme d'un certain âge se retrouve de nouveau enceinte cela provoque beaucoup de questionnements chez ses proches dans Emma (Mother) de Riri Riza et même des scandales dans Walls Within de Prasanna Vithanage. C'est donc compliqué de décider d'avoir ou pas un enfant, d'ailleurs le débat sur l'avortement est le thème central du film iranien Being Born de Mohsen Abdolvahab , Grand prix du jury, avec en balance des dépenses supplémentaires, le poids de la religion, un épanouissement contrarié... Certaines femmes n'arrivent pas à assumer leur bébé, confié à l'adoption dans The Bacchus Lady de Lee Je-yong parce que sa mère prostituée coréenne a accouché d'un bébé métis suite une relation avec un soldat américain..., dans Baby Beside Me de Son Tae-gyum, Prix Emile Guimet, une mère disparaît du foyer en abandonnant son bébé à son compagnon qui ayant un doute sur sa réelle paternité envisage de le faire adopter.

Le Palmarès du Fica de Vesoul 2017 :

- Cyclo d'Or : 500M 800M de Yao Tian (Chine)
- Grand prix du Jury International : BEING BORN de Mohsen Abdolvahab (Iran)
- Prix du Jury International : GOING THE DISTANCE de Harumoto Yujiro (Japon)
- Mention spéciale du Jury International : Hiromi Hakogi dans HER MOTHER de Sato Yoshinori (Japon)

- Prix du Jury NETPAC : GOING THE DISTANCE de Harumoto Yujiro (Japon)
- Prix de la critique : HOTEL SALVATION de Shubhashish Bhutiani (Inde)
- Prix Emile Guimet : BABY BESIDE ME de Son Tae-gyum (Corée du Sud)
- Coup de cœur du Jury Guimet : GOING THE DISTANCE de Harumoto Yujiro (Japon)
- Prix INALCO : EMMA (Mother) de Riri Riza (Indonésie)
- Coup de coeur INALCO : 500m  800m de Yao Tian (Chine)

- Prix du public du film de fiction : THE DARK WIND de Hussein Hassan (Iraq)
- Prix du Jury Lycéen : THE DARK WIND de Hussein Hassan (Iraq)
- Prix du Public du film documentaire : UN INTOUCHABLE PARMI LES MORTS de Asil Rais (Inde)
- Prix du Jury Jeune : LE CRI INTERDIT de Marjolaine Grappe & Christophe Barreyre (France / Chine)

Vesoul 2013 : Rencontre avec Kamila Andini

Posté par kristofy, le 11 février 2013

Vesoul 2013Le 19e Festival International des Cinémas d'Asie de Vesoul propose un Regard sur le cinéma indonésien composé de 22 films, du classique Après le couvre-feu de Usmar Ismail datant de 1954 à la première de The Blindfold, le dernier film de Garin Nugroho, le président du jury.

« Le cinéma indonésien est en pleine renaissance et fait preuve d'une grande effervescence créative » a ainsi expliqué Jean-Marc Thérouanne, délégué général du FICA de Vesoul. Des premiers films de jeunes cinéastes qui feront le cinéma indonésien de demain sont d'ailleurs présentés durant la semaine.

La jeune réalisatrice Kamila Andini est l'un de ces nouveaux talents à suivre en Indonésie. Son premier film The mirror never lies s’intéresse aux ‘gitans de  la mer’, la tribu Bajo dans le petit archipel de Wakatobi; dont le mode de vie est d’ailleurs méconnu de la plupart des Indonésiens. Il s’agit de nomades qui font de la mer leur maison, et qui ont construit au milieu de la mer des huttes sur pilotis au-dessus de l’eau. Cette communauté s’étend d’ailleurs jusqu’en Malaisie et aussi aux Philippines (là où d’ailleurs Brillante Mendoza a filmé son dernier film Thy Womb).

The mirror never lies suit une fillette d’une douzaine d’année qui voudrait voir dans un petit mirroir un reflet de son père, signe qu’il n’est pas mort après avoir disparu en mer. En parallèle, son meilleur ami voudrait lui dire qu’il est amoureux d’elle en utilisant la chanson d’un copain, sa mère dissimule ses émotions avec de la poudre blanche sur le visage, et un étranger en provenance de Jakarta arrive chez eux et dans leurs vies…

Rencontre avec la réalisatrice Kamila Andini.

Ecran Noir : La production de votre film The mirror never lies a duré 3 ans avant son tournage, quelles en ont été les étapes ?

Kamila Andini : En tant que cinéaste indépendante qui faisait son premier long métrage, le premier objectif était de trouver le financement, ce qui est difficile quand c’est un premier film, ça a pris beaucoup de temps. La deuxième chose concernait le lieu de tournage du village en mer qui est en fait plutôt éloigné de l’Indonésie. Pour mes recherches et la préparation j’ai fait plusieurs voyages aller-retour entre là-bas et le pays. A un moment où on était prêt à commencer le tournage il y a eu des complications de la météo, il nous fallait un beau temps calme et ensoleillé et il y a eu des tempêtes et plusieurs ouragans. La météo a ainsi été une cause de report du tournage à l’année d’après. Or, les enfants initialement choisis avaient changé et mué, on a dû recaster des enfants deux semaines avant de tourner.

EN : Comment la tribu Bajo qui vit en pleine mer a réagi en voyant arriver une équipe de cinéma ?

KA : Mes différents voyages chez eux ont justement permis une connexion de confiance avec eux avant le tournage, j’avais une petite caméra pour filmer des choses et le leur montrer ensuite, ils savaient ce que je faisais et que je voulais réaliser un film avec eux. La deuxième année ils attendaient que le tournage commence, ils étaient très content d’en faire partie, ce sont ceux qui y vivent qui sont mes acteurs. Le bouclage du financement tardait et eux me demandaient quand les gens de Jarkarta viendraient filmer. Notre équipe était composée de 25 personnes venant de Jakarta et les autres personnes de l’équipe étaient des pêcheurs. Plusieurs scènes du film sont devenues meilleures que ce que j’avais imaginé grâce à la participation des Bajo. Pour un endroit où j’avais besoin d’un bateau, il y en avait une cinquantaine qui arrivaient pour participer, du coup j’ai une longue file de bateaux à l’image et c’est magnifique. Pour moi le film c’est moins mon travail que notre travail collectif avec eux

EN : Ces enfant de l’île s’imaginent quitter la mer pour un jour aller dans les villes du continent, tandis que la plupart des gens en Indonésie ignorent tout de la façon de vivre de ces gens sur la mer, et pourtant certaines personnes comme vous rêvent d’aller là-bas…

KA : Oui, chaque endroit est en quelque sorte une oasis pour les gens d’un autre endroit, tout le monde s’imagine un ailleurs plus agréable. La perception de ce qui est mieux est différente pour chacun. Le plus grand problème des enfants de la mer est qu’ils n’ont vraiment pas beaucoup d’options pour ce qui est de quoi faire quand ils grandiront, c’est soit pêcheur ou soit enseignant pour d’autres enfants. C’est pour ça que les jeunes veulent aller dans une ville ou même dans un autre pays, ils souhaitent quelque chose de nouveau à vivre. Pour moi, en tant que femme qui vit dans une ville très urbaine, quand j’arrive chez eux je me dit que le bien-être est là-bas. Eux, ils n’ont pas vraiment besoin d’argent pour vivre, la nourriture est vraiment sous leur pied avec les poissons. Dans une ville on est dépendant de beaucoup de choses pour vivre, eux n’ont pas ce genre de besoin ce qui les rend peut-être plus libre, ils ont une sorte d’indépendance que j’aime, et particulièrement la relation qu'ils ont avec la nature.

EN : Pour votre second film The Seen and Unseen vous avez le soutien de la Résidence Cinéfondation du Festival de Cannes, ça se passe comment ?

KA : Il y a une centaines de postulants et ils choissent moins d’une dizaine de projets pour ensuite retenir six cinéastes qu’ils vont aider avec un séjour à Paris, un peu comme une bourse. Cette année il y a moi d’Indonésie, une personne du Costa Rica, du Brésil, un américain qui vit en Chine, un autre du Sri-Lanka, et aussi du Kirghizstan. Ils nous donnent accès à tous les cinémas, moi en Indonésie je ne peux pas voir autant de films différents. Ici à Vesoul c’est extraordinaire de voir autant de films de chaque partie de l’Asie alors j’en profite pour en voir beaucoup. En Indonésie, je n’ai jamais eu l’occasion de voir tous ces films du festival, chez moi il n’y a pratiquement aucun film de pays voisins. Vivre un peu en France avec cette Résidence je découvre d’autres films, et aussi l’art en général comme les peintures des musées, ça aide beaucoup pour notre créativité, on peut rencontrer différentes personnes qui travaillent dans le cinéma comme des producteurs ou des distributeurs. D’ailleurs mon film The mirror never lies n’a pas de distributeur français, alors qu’il y en a un par exemple pour une sortie au Japon. C’est difficile pour un film asiatique d’avoir un distributeur européen, j’espère que ça sera le cas pour mon prochain film.

Vesoul 2013 : Sinema Indonesia, un cinéma en suspens

Posté par kristofy, le 10 février 2013

Vesoul 2013Le 19e FICA de Vesoul a su organiser une sélection unique avec le Regard sur le cinéma indonésien : 1954 – 2013 dont son délégué général Jean-Marc Thérouanne souligne qu'elle est  "la première depuis 30 ans en France' et constitue "l'événement majeur du festival avec 22 films clés de l'histoire cinématographique de l'Indonésie".

Cette rétrospective unique en son genre a été accompagnée pour l’occasion du documentaire tout aussi unique Sinema Indonesia, un cinéma en suspens réalisé par Bastian Meiresonne et qui pour la première fois aborde le cinéma indonésien en mettant en perspective à la fois les problématiques de son passé et les perspectives futures. On y trouve notamment des interventions de Riri Riza (Atambua 39° celcius) et de Gareth Evans (The Raid).

Plusieurs générations de cinéastes indonésiens invités Garin Nugroho à montrer leurs films à Vesoul, dont Garin Nugrobo (The blindfold) [photo de droite], Kamila Andini (The mirror never lies), Nia Dinata (Love for share) et Sammaria Simanjuntak (Demi ucok), se sont par ailleurs réunis lors d’une table ronde publique pour mieux faire connaître le cinéma de leur pays .

Depuis les années 1910, époque de l’adaptation de pièces de théâtre et de légendes populaires, le cinéma indonésien a gagné en popularité. Après la guerre et l’indépendance du pays, la plupart des films se partageaient entre deux courants : le cinéma au service du gouvernement, et le cinéma commercial de divertissement.

Le nombre de films produits chaque année a progressivement baissé pour deux raisons : l’arrivée des films américains et ceux de Hong-Kong qui étaient beaucoup mieux et visibles gratuitement à la télévision, et les règles imposées par le gouvernement pour autoriser la production de films. Pendant longtemps, il a fallu d’abord soumettre son scénario à un comité, puis demander l’obtention d’une autorisation de tournage (avec des techniciens imposés), et enfin soumettre le film terminé à un autre comité…

Ainsi, jusqu’au début des années 2000, peu de films indonésiens se produisent et circulent. Pourtant, en moins de cinq ans, un renouveau s'est opéré (une vingtaine de films en 2002, plus de 80 films en 2008) en même temps que le retour du public dans les salles car les films sont bien meilleurs.

Néanmoins, l’Indonésie est toujours confrontée à un manque de structures à développer : il faut plus de circuits de distributions de films (les producteurs doivent eux-mêmes s’occuper de placer leurs films) et il faut plus de salles (environ 600 écrans pour plus de 260 millions d’habitants, une seule société gère tous les multiplexes). Bastian Meiresonne remarque même que ce sont les cinéastes de son documentaire et ceux invités à Vesoul qui font la promotion du cinéma indonésien et non le gouvernement du pays qui n’est pas assez impliqué dans la promotion et la défense de son identité culturelle (sur 2800 films produits depuis 1926 seulement 250 sont conservés dans une cinémathèque).

Garin Nugrobo se souvient de l’époque où faire un film était un combat :  "On n’était ni libre de choisir ses techniciens ni libre d’envoyer nos films dans des festivals étrangers, il fallait passer par les ambassades. Les années 90 ont été une période de transition économique, politique, et cinématographique. Pour faire des films il fallait dire Non au gouvernement. En 1998 mon film Feuille sur un oreiller a été sélectionné à Cannes mais je n’y suis pas allé car  je faisais parti du mouvement pour la destitution de Soeharto au pouvoir depuis 20 ans. On n’avait pas non plus accès aux connaissances du monde et pas aux films d’ailleurs. En 1994, j’ai reçu un prix dans un festival où dans le jury il y avait Quentin Tarantino et Pedro Almodovar, mais je ne savais pas qui ils étaient à ce moment-là."

Sammaria Simanjuntak est confrontée à d’autres difficultés : "pour produire mon film j’ai fait appel au crowfunding avec la participation au budget des internautes, mon film n’est pas assez commercial pour l’Indonésie et il n’est pas assez exotique pour les festival." Kamila Andini qui représente la nouvelle génération avec un second film en préparation à 26 ans a également une analyse pertinente : "Avant se posait la question de l’existence de notre cinéma, maintenant il s’agit de celle de sa consistance. On peut traiter de n’importe quel sujet mais il est difficile de s’imposer avec face à nous les films américains. On va se heurter au problème de la distribution de nos films face au poids de ceux de Hollywood et aussi face au poids grandissant d'internet où on peut tout trouver."

Toutes les cinéphilies asiatiques mènent à Vesoul

Posté par kristofy, le 6 février 2013

Vesoul, la préfecture de la Haute-Saone, devient une nouvelle fois une capitale du continent asiatique. La 19e édition du Festival International des Cinémas d'Asie (FICA) de Vesoul se déroule jusqu'au 12 février, soit une semaine de rencontres et de découvertes autour de 90 films. Les films se partagent entre huit sections, dont bien entendu des longs-métrages inédits (17) en compétition pour remporter le Cyclo d’or du jury.

On y attend des réalisateurs de tout horizon comme Reis Celik (turc), Nia Dinata (indonésienne), Mani Haghighi (iranien), Kobayashi Masahiro (japonais), Riri Riza (indonésien), Emily Tang (chinoise), Prasanna Vithanage (sri lankais)…

Le réalisateur coréen O Muel sera présent pour son film Jiseul sélectionné en compétition : celui-ci vient d’ailleurs tout juste d’être primé d’un grand prix du jury au festival américain de Sundance (la première fois qu’un film coréen remporte cette récompense). Jiseul sera vu à Vesoul avant sa sortie en salles de Corée du Sud prévue fin mars.

Le jury est présidé par le réalisateur indonésien Garin Nugroho, qui s'est vu remettre un Cyclo d'or d'honneur lors de la soirée d'ouverture hier soir.

Le FICA de Vesoul c’est aussi des films de Japanimation, une sélection de documentaires en compétition, des débats avec le public après les films... C'est le plus ancien et le premier Festival de cinéma asiatique, 30 000 spectateurs sont venus aux projections l’année dernière. Rendez-vous incontournable des passionnés de cinéma et de curieux des cultures asiatiques en général, Vesoul cette année encore propose un programme très riche :

Regard sur le cinéma indonésien : 1954 – 2013

Ce sont 22 films qui seront présentés dont 20 sont inédits, dont des films en présence de leurs auteurs Garin Nugrobo, Kamila Andini, Riri Riza, Nia Dinata, Sammaria Simanjuntak.

Cent ans de cinéma en Inde : 1913 - 2013

Le cinéma indien fête officiellement ses 100 ans d’existence, une célébration qui sera ensuite aussi reprise durant le prochain Festival de Cannes. A Vesoul c’est avec une dizaine de films et presque autant de langages : marathi, hindi, tamoul, manipuri, bengali, oriya, malayalam, kannada, assamais !

Francophonie d’Asie : L’Arménie et les studios Armenfilm

Depuis quelques mois, en octobre 2012, l’Arménie est désormais membre de l’Organisation Internationale de la Francophonie (avec le Cambodge, le Laos, le Liban et le Vietnam). Vesoul propose donc une introduction à ce cinéma avec 7 films phares des studios Armenfilm avec en particulier les années 60-70…

Thématique : Sur les routes d’Asie

18 films qui ont comme thématique celle du voyage

Hommage à Leslie Cheung (1956 – 2003) (photo)

Dix ans après la mort de l’acteur Leslie Cheung, le Fica lui rend hommage à travers 10 films emblématiques de sa carrière qui sont en même temps devenu pour la plupart des classiques à voir et à revoir : ils sont signés notamment par John Woo, Wong Kar-Wai, et Tsui Hark !

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19 édition du Festival international des cinémas d'Asie de Vesoul
Du 5 au12 février
Informations et programme sur le site de la manifestation

Le cinéma LA CLEF ouvre à nouveau ses portes

Posté par Claire Fayau, le 8 septembre 2010

Le cinéma LA CLEF (34 de la rue Daubenton, Paris 5ème, métro Censier–Daubenton) sera ouvert sept jours sur sept à partir de 29 septembre 2010.
Autrefois appelé « Images d’ailleurs », le cinéma s'est refait une beauté :les deux salles de 120 et 65 places ont été rénovées, et sont équipées en 35 mm Dolby et vidéo. Elles passeront au numérique dès 2011.
Côté programmation, du beau, du rare, de l'écolo... mais aussi des thématiques sociales ou politiques.
Menu alléchant, avec pour mise en bouche le 29 septembre, la sortie nationale du documentaire de Jocelyne Lemaire-Darnaud, Moi, la finance et le développement durable.

En octobre / novembre , l’Argentine et l’Uruguay seront mis à l'honneur dans le cadre du cycle «Cinéma du Rio de la Plata» organisé pour le 13è festival « Paris Banlieue Tango » .
En novembre, ATTAC fera son festival annuel, « Images Mouvementées / ATTAC » pendant toute une semaine.
Et en décembre, deux jours seront consacrés au cinéma indonésien ....