Une forte hausse de films réalisés par les femmes, mais des inégalités fortes persistantes

Posté par vincy, le 8 mars 2019

Le CNC vient de publier une étude sur la place des femmes dans la réalisation de films en 2017. 23,3% des longs métrages agréés ont été réalisés par des femmes, soit une progression de 62,8% depuis 2008. Le chiffre monte à 31,8% pour les courts métrages (avec une baisse de 9,6% depuis 2009).

45 réalisatrices ont tourné 3 ou 4 films en 10 ans

Le CNC révèle aussi que 37% des films aidés sont des projets de réalisatrices (la moyenne sur 10 ans étant de 38,7% pour 32,6% de projets candidatés par des femmes). Globalement, en 2017, 31,9% des premiers longs concernent des réalisatrices (contre 27,5% pour des deuxièmes long métrages).

Sur la période 2008-2017, 11 femmes ont réalisé au moins 4 films pendant les dix années étudiées, contre 71 hommes. 3 d’entre elles-dont deux actrices déjà installées-ont réalisé leur premier film (Valérie Donzelli, Mélanie Laurent, Marie-Castille Mention-Schaar). 39 femmes ont réalisé au moins 3 films entre 2008 et 2017. 14 d’entre elles ont réalisé leur premier film pendant cette période et plus d’un quart des femmes ayant réalisé au moins trois films : Sophie Letourneur, Amanda Sthers, Hélène Cattet, Fanny Ardant, Aida Bagic, Valérie Donzelli, Pelin Esmer, Katell Quillévéré, Rebecca Zlotowsky et Axelle Roppert. La championne toute catégorie este Anne Fontaine avec 6 films en dix ans.

La France derrière la Scandinavie mais devant l'Europe du sud

Globalement, en moyenne, depuis 5 ans, un film sur quatre est réalisé par une femme en France. C'est moins qu'en Suède (30,9%), en Norvège (27,9%), en Allemagne (25,9%) en Finlande (25,4%) et au Danemark (25%), mais bien plus qu'en Espagne (14,2%), au Royaume-Uni (12,1%) et en Italie (10,1%). Mais avec 370 films réalisés par des femmes sortis en salles entre 2012 et 2017, la France représente à elle seule plus du tiers (35,8 %) de l’ensemble des films réalisés par des femmes sortis sur la période dans les neuf pays européens étudiés.

Inégalités salariales encore fortes

Dans la production cinématographique de fiction, 15208 femmes ont travaillé à la production de fictions cinématographiques, soit une sous-représentation loin de l'égalité des sexes (43,2% de femmes, 56,8% d'hommes). Les métiers de scriptes, costumières, coiffeuses-maquilleuses, mais aussi les postes comptabilité-juridique-communication sont largement féminisés. Les stéréotypes sont persistants il y a ainsi peu de femmes chez les machinistes, électriciens-éclairagistes, mixeurs, preneurs de sons...). Pire, le salaire moyen d’une réalisatrice de long métrage, s'il a augmenté entre 2009 et 2017, reste inférieur de 42,3% à celui d’un réalisateur (un record tous postes confondus dans le cinéma). Et le tableau par métiers révèlent d'importants écarts chez les interprètes (8,8% en défaveur des femmes), les chargés de productions (38,9% d'écart) ou les directeurs/directrices de la photographie (13,2%).

Pourtant, 12 films réalisés ou coréalisés par des femmes ont dépassé le million d'entrées entre 2008 et 2017, avec en tête LOL de Lisa Azuelos, seul film de réalisatrice classé dans le Top 25 de la période, La rafle de Roselyne Bosch et Polisse de Maïween Le Besco. Ce sont les trois seuls succès au dessus de 2 millions d'entrées. Au total, 40 films de réalisatrices ont passé le cap des 600000 spectateurs, certaines cinéastes cumulant plusieurs titres entre 2008 et 2017 telles Maïwenn Le Besco, Anne Fontaine, Nicole Garcia, Lisa Azuelos, Carine Tardieu, Danièle Thompson.

Budgets et distribution toujours en faveur des réalisateurs

Malgré tout, avec un devis moyen de 3,47M€, les budgets des films des réalisatrices est inférieur de 37,1% par rapport à un film de réalisateur. Cependant, cet écart a tendance à diminuer. En dix ans le budget moyen des films d’initiative française réalisés par des femmes augmente très légèrement (+4,3 %) tandis qu’il a baissé de 24,1% pour les hommes. Sur dix ans, l'écart est visible par budgets de films: seulement 21 films de plus de 10M€ ont été filmés par des femmes, contre 211 (dix fois plus!) par des hommes. Plus généralement, au dessus de 7M€ de devis, les femmes sont largement sous-représentées.

On note la même inégalité sur la distribution. Entre 2008 et 2017, les coûts de distribution moyens des films d’initiative française réalisés par des femmes sont de 408,0 K€, soit 34,4 % de moins que ceux des films réalisés par des hommes. Sur la période, les films réalisés par des femmes sortent en moyenne dans 118 cinémas en première semaine, contre 170 établissements pour ceux réalisés par des hommes. En 2017, l'écart était plus dramatique avec 169 cinémas pour un film de femme contre 251 pour un film d'homme.

Les choses évoluent aussi dans les genres. Ainsi deux films d'animation agréés ont été réalisés par des femmes l'an dernier, et un troisième coréalisé avec une femme. C'est une première. 9 films documentaires ont été réalisés ou coréalisés par une femme. Sur dix ans, le drame (30,6%), le documentaire (23,1%), la comédie (22,8%) et la comédie dramatique (20,3%) restent les genres dominants pour les réalisatrices. Par rapport aux hommes, la proportion diffère. Plus présents dans le thriller/policier et l'animation, ils le sont surtout davantage dans la comédie (26,7%).

Edito: Hollywood-sur-Yangtsé

Posté par redaction, le 5 avril 2018

C'est un petit phénomène qui amène de grandes répercussions. Le box office du marché chinois a dépassé, pour la première fois, celui du marché nord américain au premier trimestre. Les recettes en Chine ont atteint 3,17 milliards de dollars contre 2,85 milliards de $ en Amérique du nord. Et pour enfoncer le clou, Ready Player One, le dernier Spielberg a rapporté 62M$ durant ses premiers jours d'exploitation en Chine contre 53M$ en Amérique du Nord.

Le déclin de l'Empire américain? Oui, certainement. La démographie joue en faveur des marchés émergents et particulièrement de l'Asie, qui s'équipe à grande vitesse en multiplexes tout en produisant des films à gros budgets locaux. En 2017, selon le rapport tout chaud de la MPAA, le box office mondial a atteint un record de 40,6 milliards de dollars de recettes (seulement les ventes de tickets, on ne parle pas de pop corn et de sodas). Une hausse de 5%, à relativiser puisque le nombre d'écrans a augmenté de 8%. La Chine a porté cette dynamique alors que le marché nord américain fléchissait de 2% (11,1 milliards de $) où un tiers des recettes nord-américaines provient dues films du top 10. Une concentration inquiétante.

Pire, le nombre de billets vendus aux USA et au Canada est en baisse de 6% (1,24 milliard d'entrées), soit le plus bas niveau depuis 1995, tandis que le marché des loisirs à domicile progressait de 11% entre 2016 et 2017. La hausse du prix du billet - et notamment des films 3D - de 24% en 10 ans a limité la casse pour les studios qui affichent les recettes et non les entrées, mais elle a aussi fait fuir des spectateurs, et notamment les plus jeunes qui se détournent des salles. Le cinéma reste un loisir plus populaire (3 nord-américains sur quatre ont été au ciné l'an dernier) que les parcs d'attraction et les stades sportifs, mais rivalisent de moins en moins avec les plateformes de streaming à la maison. Une autre donnée est à souligner: ce sont les caucasiens qui vont le moins souvent au cinéma. Et les hispanophones et asiatiques qui y vont le plus.

A l'inverse les marchés chinois, japonais, indiens et sud-coréens, tout comme les marchés britanniques et français, continuent d'être attractifs: le cinéma y reste un loisir dominant. L'Asie voit ses recettes progresser de 44% en cinq ans! Hors USA-Canada, sur les 20 pays les plus "cinéphages", 7 sont en Asie, 9 en Europe, 3 en Amérique latine et un en Océanie.

Résultat, le marché nord-américain ne représente plus que 27% du box office mondial contre 30% en 2013. Bien sûr, Hollywood reste dominant. Depuis le début de l'année, sur les 17 films ayant dépassé les 100M$ de recettes mondiales, 13 sont produits ou coproduits par un studio américain. Mais 4 sont chinois. Operation Red Sea et Detective China Town 2 ont rapporté plus de 500M$ de recettes, loin devant Cinquante nuances plus claires ou le Labyrinthe 3. Jusque là ce genre de recettes monstrueuses étaient réservées aux productions US. Ce n'est plus le cas.

En 2017, sur les 33 films ayant franchi le cap des 300M$ de recettes mondiales, seulement deux ont rapporté davantage en Amérique du nord que dans le reste du monde et 10 ont fait plus de 75% de leurs recettes hors Amérique du Nord. Depuis le début de l'année, parmi les 15 plus grosses recettes, seul Black Panther a rapporté davantage en Amérique du nord (51,1% de ses recettes), mais 8 films ont fait l'essentiel de leur box office hors Amérique du nord.

Tout cela va contribuer à des choix stratégiques pour les studios: casting multi-ethniques, tournages à l'extérieur du pays, coproductions avec l'Asie et l'Amérique latine, mœurs acceptables dans les autres cultures. Ce renversement de "pouvoir" ne sera pas anodin pour les blockbusters. Désormais les dollars se lèvent à l'Est.

Le duo Philippe Lacheau – Tarek Bouladi champion de la rentabilité en 2017

Posté par vincy, le 26 février 2018

philippe lacheau tarek boudali épouse-moi mon pote

Le duo Philippe Lacheau / Tarek Boudali remportent les médailles d'or et d'argent des films les plus rentables en salles en 2017 selon le calcul opéré par le Film Français. Alibi.com et Epouse-moi mon pote, tous deux distribués par StudioCanal, affichent ainsi une rentabilité de 157%, loin devant la médaille de bronze, Patients, réalisé par Grand Corps Malade et Mehdi Idir, qui se "contente" d'une rentabilité de 107%.

Ce trio de tête fait apparaitre quelques éléments intéressants: d'une part, les cinéastes sont issus d'une même génération, (les quatre sont nés entre 1977 et 1980). Deux de ces trois longs métrages sont des premiers films. Enfin, aucun des réalisateurs n'a été formé dans une école de cinéma: ils viennent de la télévision ou de la musique.

Au total, il y a 29 films qui affichent un quotient de plus de 25% de rentabilité, ce taux où l'on considère que l'amortissement d'un film est réalisé, mais qui ne permet pas de déterminer les gains réels des producteurs, selon les estimations du magazine de la profession. De plus, un film se rentabilise de multiples manières sur la longueur: , entrées internationales, vidéo à la demande, dvd/blu-ray, passages télévisés. Enfin, les trois ont bénéficié de budgets moyens (entre 4 et 8 millions d'euros).

Peu de grosses productions se distinguent dans ce classement: Le sens de la fête (8e, 68%), Raid Dingue, le film le plus cher de l'année hors productions Europacorp (13e, 44%), Au revoir là-haut (21e, 34%) et Sahara (25e, 30%) sont des exceptions. A l'autre bout du spectre, des films au devis supérieur à 10M€ se sont plantés: Happy End, D'après une histoire vraie, Mes trésors, Le redoutable, Stars 80 la suite, Zombillénium et Gangsterdam.

Parmi les petits budgets (inférieurs à 3M€), quelques uns ont raflé la mise : Mon garçon (6e, 70%), Corporate (19e, 37%), Jeune femme (22e, 32%), Pour le réconfort (27e, 29%), Un beau soleil intérieur (28e, 29%).

Côté distributeurs, enfin, certains démontrent un beau savoir-faire. Studiocanal classe 5 films dans les 29 premiers (en plus des deux premiers, , Ce qui nous lie, Sahara), Gaumont 4 (outre le 3e, Le sens de la fête, Au revoir là-haut, Marie-Francine), tout comme Diaphana (Mon garçon, La villa, Aurore, Corporate). Quelques distributeurs indépendants font aussi une belle opération comme Pyramide (Petit paysan, 10e), Memento (120 battements par minute, 11e, Sage-femme, 20e), Shellac (Jeune femme), UFO (Pour le réconfort), et Ad vitam (Un beau soleil intérieur).

Edito: Le retour de l’Europe

Posté par redaction, le 15 février 2018

Alors que la Berlinale se lance dans sa 68e édition, et avec elle le marché du film européen et des coproductions, l'Observatoire européen de l'audiovisuel rend ses premiers bilans pour 2017. 985 millions de billets ont été vendus l'an dernier, soit 6,6 millions de moins qu'en 2016, année record. C'est une bonne nouvelle en soi. D'autant qu'aux Etats-Unis, la tendance est toujours à la baisse. Aujourd'hui, si on prend en compte l'ensemble du continent (incluant la Russie et la Turquie), l'Europe fait jeu égal avec les Etats-Unis. Malgré la concurrence du petit écran, des réseaux sociaux, du jeu vidéo, le cinéma reste un bien culturel et social attractif.

A l'Est, la croissance

Bien sûr, pays par pays, tout ne vas bien. Le marché italien s'effondre (-12,9%), passant sous les 100M de spectateurs, et derrière le marché espagnol, tandis que les spectateurs sont plus nombreux en République Slovaque (+18,1%), en Roumanie (+11,3%), Russie (+9,7%), Pologne (+8,7%) et aux Pays-bas (+5,3%). Hors Union européenne, les entrées en Turquie ont bondit de 22,1% (ce qui profite aux films turcs qui représentent 56,5% des entrées!). La Russie consolide sa position de leader européen en nombre d'entrées (213,6M) devant la France qui en comptabilise 209,2M)

Parts de marché nationales

Car cette bonne fréquentation profite surtout aux productions américaines (qui ont bien compris leur intérêt à cibler l'international pour compenser la baisse de fréquentation sur leur territoire), et principalement aux blockbusters, qui semblent les films les plus fédérateurs, peu importe la langue, la culture, etc... La part de marché des films nationaux a diminué dans 13 pays et augmenté dans 11. La France et le Royaume Uni (qui comprend des productions soutenues par des sociétés américaines) peuvent s'enorgueillir d'une part de marché nationale de 37,4%. Les Finlandais, les Allemands, les Russes, les Polonais et les Tchèques résistent aussi très bien à l'invasion américaine avec plus d'un spectateur sur cinq, voire un spectateur sur quatre qui va voir un film "local".

Une production en surchauffe

Dans le même temps, l'Observatoire européen de l'audiovisuel a rendu public une autre étude sur la production cinématographique au cours des 10 dernières années. On constate une hausse de 47% du nombre de films produits en 10 ans! En 2007 on produisait en Europe 1 444 longs métrages. En 2016, ce chiffre s'élève à 2 124. Le plus surprenant est le doublement du nombre de films documentaires (un tiers des films produits désormais).

Plus d'un film sur deux est produits par le Royaume-Uni (en baisse), la France, l’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie. Mais les plus fortes sont enregistrées dans des pays comme la Russie (+40%), ou la Turquie (+180%).

La France championne des coprods

Un film sur cinq est une coproduction. Et l'étude montre bien l'intérêt de ce mécanisme financier. L'industrie française l'a bien compris. La France est championne des coprods avec 566 films coproduits en 10 ans, devant l'Espagne, l'Allemagne, et la Suisse. Mais il y a encore du chemin à faire pour parler de cinéma européen. 40% des interactions sont faites avec des pays non-européens, principalement avec les Etats-Unis. Sinon ce sont les coproductions France/Belgique , puis Royaume-Uni/États-Unis, Italie/France, France/Allemagne et Belgique/France qui sont les plus fréquents.

Des coprods bien plus performantes que les films nationaux

Si les indicateurs sont à la hausse, on constate au final qu'entre 2010 et 2015, les coproductions ont représenté 24,2% de l’ensemble de la production de films en Europe, attirant 1,6 milliard d’entrées, soit 50,3% des entrées totales des films européens sur la période, soit trois fois plus que le nombre d’entrées récoltées par les films européens uniquement nationaux. On résume: un quart des films sont des coprods et ils génèrent un billet vendu sur deux. C'est plutôt rentable, en tout cas largement plus qu'un film 100% national.

Cela tient à un fait très simple: une coprod a plus de chance d'être diffusée dans un autre pays: 69% des coprods majoritaires sont sorties dans un autre pays que celui d'origine. Seuls 39,5% des films nationaux ont eu cette possibilité. En moyenne, avec 6,4 territoires où elles sont distribuées, les coproductions européennes circulent près de deux fois plus que les productions seulement nationales.

Des succès nationaux peu exportés

C'est désormais tout l'enjeu véritable du cinéma européen: la coproduction, les financements transnationaux sont acquis. Hormis des comédies (l'humour reste très chauvin), tous les autres genres profitent de ces apports financiers extra-nationaux. Mais tant qu'un grand plan pour la diffusion des films européens, qui comprendrait le doublage et le sous-titrage, une aide à la distribution (y compris sur les plateformes streaming), des aides pour les exploitants et les festivals qui valoriseraient les films européens, on restera enfermés dans nos frontières. Qui a vu, en dehors de leur pays d'origine, Fuck You Goethe 3, 2e plus gros succès allemand en 2017 ou Come un gatto in tangenziale, plus gros hit italien de l'année, ou Perfectos desconocidos, film le plus populaire en Espagne (et 4e du box office annuel)? Là encore, le modèle français fait exception puisque les films hexagonaux sont plutôt bien exportés, grâce aux coprods et à l'action d'Unifrance, entre autres.

Alors que la politique européenne et son versant économique font douter de nombreux citoyens, le cinéma, de par son impact culturel, pourrait être un formidable moyen de mieux partager nos valeurs et de mieux connaître nos voisins.

Rebond de la fréquentation en 2017 pour la Cinémathèque française

Posté par vincy, le 3 février 2018

expo goscinny © vincy thomas380 000 entrées en 2017. La Cinémathèque enregistre une belle hausse de sa fréquentation (+8%). Les moins de 26 ans représentent désormais 22% du public grâce à une politique orientée vers le jeune public.

Tout va mieux du côté du parce de Bercy. Les salles sont mieux remplies (44% contre 40% en 2016) avec des taux de remplissages parfois étonnants (la rétrospective Tarkovski a fait quasiment salles pleines avec 95%, devant les rétros Visconti et Vigo, 75% chacune).

Les expositions et le musée du cinéma ont séduit 120000 personnes, loin des records passés comme l'expo Tim Burton (plus de 350000 visiteurs). L'expo Goscinny et le cinéma, toujours en cours jusqu'au 4 mars et qui ira à Angoulême à partir de juin, a attiré 42000 visiteurs durant le dernier trimestre. Les expositions produites par la Cinémathèque ont rayonné dans le monde avec 30000 visiteurs de Turin à Lausanne, en passant par l'Espagne.

Quant au site internet de la Cinémathèque, il enregistre également une hausse de fréquentation de 12,5%, avec 1,5 million de visiteurs.

Enfin, le Festival international du film restauré, Toute la mémoire du monde, a connu un joli succès avec 73% de taux de remplissage. Cette année, la 6e édition aura lieu du 7 au 11 mars, avec Wim Wenders en parrain de la manifestation et Stefania Sandrelli en invitée d'honneur.

L'année 2018 accueillera aussi une exposition Chris Marker à compter du 2 mai (puis à Bruxelles à partir du 19 septembre), des rétrospectives Tod Browning, Rainer Wener Fassbinder, Robert Bresson et William Wyler, un cycle spécial dédié à la première sélection de la Quinzaine des Réalisateurs (celle de 1969)

Edito: Le grand blues

Posté par redaction, le 18 janvier 2018

Paraît que lundi c'était le jour le plus déprimant de l'année. Le Blue Monday. Le grand blues est aussi du côté de l'auteur du Grand bleu. Enfin presque, car Luc Besson a quand même touché 4,44 millions d'euros pour Valerian et la cité des mille planètes (4 millions d'entrées en France, 2e film français le plus vu donc, près de 29 millions d'entrées dans le monde). C'est donc logiquement le réalisateur le mieux payé en France, devant Dany Boon (3,5 millions d'euros), Guillaume Canet (2,5 millions d'euros), Christian Duguay  et Alain Chabat (1, 26 million d'euros), et Olivier Marchal (1 million d'euros), selon Cinéfinances.info.

EuropaCorp est ainsi le producteur et l'exportateur le plus actif à l'international. Le chiffre d'affaire a été boosté grâce au film de science-fiction du cinéaste.

Et pourtant le "champion" va mal. Le groupe va d'ailleurs supprimer 22 emplois sur 79. Besson est le professionnel le plus riche du cinéma français, mais sa société est déficitaire et un tiers des effectifs va se retrouver à Pôle Emploi. On veut pas être "populiste" mais...

Depuis quelques semaines, EuropaCorp vend aussi les bijoux de la couronne. L'activité de production de séries en France et en Europe a été cédée (et finalement reprise cette semaine par Mediawan, la société de Matthieu Pigasse, Xavier Niel et Pierre-Antoine Capton), tout comme le catalogue d’édition musicale et son activité d'exploitant.

La société veut désormais se concentrer sur ses franchises existantes et se recentrer sur ce qu'elle sait faire: des thrillers et des films d’action à moins de 30M$. Car, or Valerian, son programme, assez varié, n'a pas cartonné en France (2,3 millions d'entrées avec six films et aucun millionnaire).

Son gros coup cette année sera Taxi 5, assurément, diminuant ainsi l'exposition et le risque pour la 3e saison de Taken, Kursk de Thomas Vinterberg, Eva de Benoît Jacquot ou encore The Old Man and the Gun de David Lowery.

Ne nous réjouissons surtout pas de la mauvaise santé d'Europacorp : ce n'est pas une bonne nouvelle pour le secteur en France, de par son poids international qui assure l'essentiel de nos exportations cinématographiques. Luc Besson n'a pas d'autres choix que de reprendre la barre du navire. Au point de concentrer sans doute trop d'activités. Il est désormais P-DG de la société depuis la non reconduction du précédent, le 3e depuis 2008. Le cinéaste prévoit un long métrage (Anna, avec Sasha Luss, Helen Mirren et Luke Evans) et développe la série The French Detective dont il réalisera le pilote, adaptation des aventures de Luc Moncrief imaginées par James Patterson, avec Jean Dujardin dans le rôle principal pour la chaîne ABC.

C'était sans doute une "blue week" pour Luc Besson.

Lady Bird grand vainqueur des National Society of Film Critics

Posté par vincy, le 7 janvier 2018

Le National Society of Film Critics a choisi Lady Bird de Greta Gerwig comme meilleur film, mais aussi comme meilleur réalisation, meilleur scénario et meilleur second-rôle féminin pour Laurie Metcalf. Une belle razzia. Si le palmarès historique de cette association de critiques a rarement été en phase avec les Oscars (4 "matchs" entre 1980 et 2010), soulignons que ces deux dernières années ils ont touché juste en récompensant Spotlight et Moonlight.

Il ne reste donc que quelques miettes pour les autres films. Daniel Kaluuya (Get Out) reçoit le prix du meilleur acteur, Sally Hawkins (La forme de l'eau) comme meilleure actrice et Willem Dafoe (The Florida Project) comme meilleur second-rôle masculin.

Les critiques de la NSF ont récompensé le documentaire d'Agnès Varda et JR, Visages Villages, Roger Deakins pour l'image de Blade Runner 2049 et le film roumain de Cristian Mungiu Baccalauréat pour le film étranger. Le documentaire de Ben Russell Good Luck a été distingué comme film expérimental.

Les actus et les critiques de films les plus lues sur Ecran Noir en 2017

Posté par vincy, le 31 décembre 2017

10 films

  1. La La Land
  2. L'autre côté de l'espoir
  3. The Boyfriend. Pourquoi pas lui?
  4. Tous en scène
  5. Raid dingue
  6. Un sac de billes
  7. La communauté
  8. De toute mes forces
  9. Patients
  10. Nocturnal Animals

10 actualités

  1. Le nouveau film avec John Travolta annulé 10 jours avant sa sortie
  2. Le cinéaste tunisien Karim Belhadj arrêté pour « homosexualité »
  3. Valérie Lemercier ira chercher le cœur de Céline Dion
  4. Disparition de la monteuse Marie-Josèphe Yoyotte, trois fois césarisée
  5. Daily Cannes: Des proies et pas de régime
  6. Pierre Deladonchamps et Vincent Lacoste vont se plaire chez Christophe Honoré
  7. opé par John Wick 2, Keanu Reeves retrouve son sex-appeal à Hollywood
  8. Keira Knightley chante « Le tourbillon de la vie » de Jeanne Moreau
  9. Après une tentative ratée, Benedict Cumberbatch et Jake Gyllenhaal se lancent dans un autre projet
  10. Ce que l’on sait de James Bond 25

Mon film de l’année: L’autre côté de l’espoir, conte idéaliste et bienveillant

Posté par vincy, le 29 décembre 2017

Ours d'argent de la mise en scène à Berlin, L'autre côté de l'espoir est peut-être le dernier film d'Aki Kaurismäki. Si ce film surclasse les autres en fin d'année, et n'a pas déçu mes attentes, c'est aussi parce qu'il résonne avec l'actualité. Son intensité, derrière son apparente simplicité, provient de deux destins qui s'entrechoquent: l'homo occidentalus, âgé et sur le déclin, face un jeune réfugié syrien qui fuit la guerre.

Alors que les pays occidentaux se débattent dans leurs positions autour de l'immigration provenant d'Afrique et du Proche et Moyen orient, le cinéaste finlandais imagine une fable où le "vivre ensemble" ne serait pas un simple slogan creux. Le mot "bienveillance" a été utilisé abusivement ces derniers moins par les dirigeants, afin d'apaiser des tensions a priori irréconciliables, et en faisant appel à une charité comportementale. L'autre côté de l'espoir n'a pas besoin de sémantique, de dogme ou de prêche. Comme un joli blues, il livre ses propres incantations. Une chanson douce pour ne pas se résigner.

La coexistence sympathique entre les deux mondes, l'apprivoisement progressif qui enfouit la peur de l'autre, l'empathie naturelle qui se dégage pour les deux personnages peuvent paraître idéalistes. Pourtant, le réalisateur ne cache pas la violence de la société, la précarité de chacun, l'absurdité d'un monde sourd et aveugle. La mélancolie qui s'évapore de cette eau bouillonnante vient se confondre avec les rêves qui planent dans les airs. Cela donne un film tendre et toujours plein de surprises, avec des individus vivant à la marge attachants. La mondialisation est bien présente, la société est visiblement fragile et paumée, et il y a un nombre d'abrutis un peu trop important pour être complètement serein.

Mais avec Kaurismäki, nous sommes dans un conte de faits, terriblement actuels, où la face obscure s'éclipse à la lumière de ces êtres profondément bons, mais faillibles, qui savent que l'avenir n'est pas déterminé par une frontière, une couleur de peau, un Dieu différent. On a beaucoup parlé du "monde ancien" ces derniers temps. Le réalisateur a eu le talent de montrer que le "monde nouveau" n'est rien d'autre que celui que nous espérons et que les dominants détruisent. Ce qui en fait assurément le film le plus insoumis de tous cette année.

Les autres films marquants de l'année

Le genre parfait: Le film "LGBT" a connu son sacre cette année. Nos cœurs ont palpité pour des "romances" bouleversantes, dramatiques, charnelles, sensuelles et tragiques. De non dits en silences, de secrets inavoués en déclarations d'amour chuchotées, les films 120 battements par minute, Moonlight, Hearthstone, Seule la terre, Diane a les épaules, Une femme fantastique et dans une certaine mesure Battle of the Sexes nous ont emportés. Et attendez de voir Call me by your name, quintessence du genre qui nous liquéfie...

Le réalisme onirique: L'année fut riche pour les films du réel aka les documentaires. Paradoxalement, c'est peut-être le plus romanesque d'entre eux qui m'a touché le plus: Carré 35 d'Eric Caravaca, entre enquête intime et reflet d'une vie, celle du cinéaste et de ses proches. De la même manière, par leur formalisme et leur poésie, les "fictions" Lettres de la guerre et Barbara, qui mélangent archives et reconstitution, images retravaillées et sentiments bruts, mots d'hier et maux atemporels m'ont séduit.

Le polar new yorkais: A Cannes deux films ont marqué les esprits: stylisés, brutaux, humanistes sous leurs apparences égoïstes, A Beautiful Day de Lynne Ramsey était palmable et Good Time des frères Safdie méritait le prix de la mise en scène. New York en arrière plan, le thriller en genre assumé. Dans la veine de certains Scorsese, ces deux films ont été un régal d'un point de vue cinéphile. Preuve que la poisse peut-être gagnante.

Le blockbuster: La Planète des singes: Suprématie clôt une trilogie certes inégale mais pour une fois cohérente. La Fox a eu raison de faire de cette énième version du sujet imaginé par Pierre Boule il y a 55 ans une allégorie sur la nature animale de l'homme et au final un affrontement de civilisation qui fait écho à ces politiques rejetant l'autre sous prétexte qu'il est différent.

Le film surfait: Je ne vais pas dire The Square même si je le pense comme MpM. Aussi, je choisirai un film que je vois apparaître dans plusieurs palmarès: Certaines femmes de Kelly Reichardt. On peut apprécier la direction d'actrices, la mise en scène soignée, mais ce film sombre et triste est aussi ennuyeux que froid.

Le chef d'œuvre oublié: The Lost City of Z est sans aucun doute l'un des plus beaux films de ces dernières années et la preuve que James Gray est un grand cinéaste. David Lean, Stanley Kubrick et John Huston sont convoqués dans cette quête mystique et anthropologique. Un opéra verdoyant où l'homme se perd à courir après un mirage. Splendide.

Mon film de l’année: Moonlight, sublime drame queer

Posté par wyzman, le 28 décembre 2017

Sans surprise, le film qui m’a le plus marqué, touché et ému cette année est Moonlight de Barry Jenkins. Il y a un an, j’annonçais même fièrement que c’était le film que j’attendais le plus en 2017. Et je n’ai pas été déçu !

Pendant 110 minutes, Moonlight raconte l’évolution (voire carrément la transformation) de Chiron, un enfant noir issu des quartiers pauvres de Miami et persécuté par ses camarades en un homme muré dans le silence et rongé par ses démons. La raison de son mal-être ? Elle est double. Il y a tout d’abord cette mère qui est accro à la drogue et incapable de prendre soin de lui et cette orientation sexuelle qu’il n’arrive pas à définir mais qui fait naître en lui un désir certain pour Kevin, son meilleur ami d’enfance.

Auréolé de trois Oscars (meilleur film, meilleur scénario adapté, meilleur acteur dans un second rôle pour Mahershala Ali), Moonlight est le film le plus récompensé de l’année dernière. Mais c’est également le résultat d’une incroyable success story. Celle qui voit se croiser deux scénaristes de talent, trentenaires, noirs et homosexuels, la société de production de Brad Pitt et le seul acteur de série dont le talent en fait le digne héritier de Denzel Washington.

Découpé en trois parties où la tension dramatique est à son paroxysme, Moonlight est porté par trois versions toutes magnifiques de Chiron. Alex R. Hibbert incarne un jeune Chiron curieux de savoir ce qu’est une « pédale », Ashton Sanders est un adolescent fasciné par les rapports sexuels qu’a son meilleur ami quand l’impressionnant Trevante Rhodes émeut en homosexuel baraqué mais refoulé. Véritable tour de force visuel, Moonlight et surtout la photographie de James Laxton parviennent à sublimer de manière identique trois acteurs bien différents et à rendre justice au charme des hommes noirs.

Plein d’empathie, le scénario donne une place importance aux silences et aux non-dits. A ces spectateurs impatients et trop pragmatiques qui ont fustigé l’absence de fin arrêtée, je leur réponds sans détour que c’est là que réside la force de Moonlight, dans le fait de laisser volontairement chacun décider de la suite du parcours de Chiron. Poétique et symbolique, Moonlight est le grand film que la communauté queer mérite... à moins que ce ne soit Call Me By Your Name ?

Les autres films marquants de l'année
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Le blockbusterLes Derniers Jedi. Auteur de la future trilogie Star Wars (la quatrième donc), Rian Johnson a essayé de s’émanciper de la mythologie trop oppressante de George Lucas.
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L'objet filmique non identifiéMy Little Pony de Jayson Thiessen. Ça galope partout et ça envoie des sorts mais ça ne décolle jamais vraiment !