La Péniche cinéma reste à quai

Posté par vincy, le 20 janvier 2018

"La nouvelle année arrive avec cette bonne nouvelle à partager sans modération, et tant pis pour les risques d'indigestion : nous restons, ça y est, la Péniche Cinéma, ainsi qu'Anako, seront encore là cette année et pour les 10 ans qui viennent.
10 ans !!! En le disant nous réalisons que ce n'est pas une victoire c'est une renaissance, une vie nouvelle qui commence.
Merci, merci et merci à vous tous qui avez soutenu notre combat, mobilisé vos réseaux, parlé et fait parlé, écrit, protesté, relayé, liké, partagé. Sans vous, nous nous serions noyé. Sans vous, nous étions trop petits pour résister et nos assaillants trop puissants. Quelle belle leçon, quel beau message de début d'année: ensemble, tous ensemble, nous l'avons fait.
Alors nous adressons nos voeux de bonne année à tous les combats qui paraissent perdus d'avance et à tous les combattants de l'impossible... En 2018, restons groupés !
"

Tel est le message laissé sur le site de La péniche Cinéma. La Mairie de Paris a fait volte-face dans son projet de redistribuer les concessions des "péniches" bassin de la Villette. Huit péniches culturelles dont trois étaient menacées de couler: Anako, Cinéma et Demoiselle (lire notre article du 17 septembre 2017). La mairie a lancé un appel à projets, ouvrant l'appel d'offre au privé, visant la rentabilité afin que la ville puisse toucher un pourcentage. Autrement dit, les péniches associatives à but non lucratif n'avaient aucun intérêt.

Le 10 janvier 2018, dans des conditions opaques, la Mairie de Paris confirme le retrait du projet d'une épicerie flottante de Carrefour, ce qui permet le déblocage de deux emplacements, pour Anako et Cinéma. Soudainement, ces deux péniches étaient solides financièrement, qualitativement, et culturellement.

Dans Le Monde, Franck Delrieu, directeur de la péniche Cinéma, rappelle à propos des élus locaux que " pendant tout ce combat, leur attitude a été en totale contradiction avec leurs déclarations". "Nous n'avons rien changé dans le deuxième dossier, simplement surligné ce qu'ils n'avaient pas lu ou vu, et contesté tout ce qui nous avait été reproché à tort : les nuisances sonores ou le fait qu'on ne travaillait pas avec le quartier. Nous n'avons fait que remettre les pendules à l'heure… Et eux ont fait en sorte de réintégrer les deux péniches qui leur ont fait une très mauvaise pub."

La perdante c'est la Demoiselle qui reste à quai. Au final, outre La Péniche Cinéma et Anako, les péniches qui seront amarrées sont POP (spectacles musicaux), Adelaïde et Nez rouge (spectacle vivant et théâtre), Antipode (animations artistiques et culturelles), Grande Fantaisie (création et diffusion d'art contemporain et de spectacle vivant), L'eau et les rêves (librairie), Articanal (création artisanale), La Bougeotte (cave et un bar à vins), Lilibouh (danse et petite restauration) et La Péniche Cinéma, Fab Lab (fabrication collaborative, numérique et réemploi) et Île Flottante (production de spectacles de théâtre et accueil de compagnies).

La Péniche cinéma menacée de couler

Posté par vincy, le 17 septembre 2017

La péniche Cinéma, soutenue par la maison du court métrage et Shorts TV entre autres, et la péniche Anako sont contraintes de quitter leur quai le 2 janvier 2018 dans le XIXe arrondissement de Paris, situé entre le MK2 Quai de Seine-Loire et le Parc de la Villette. Il y a au total neuf péniches associatives sur ces quais.

La décision est d'autant plus étrange que quatre emplacements supplémentaires ont été créés et que cette zone qui couvre le canal mais aussi le bassin de la Villette est de plus en plus axée sur les loisirs et la culture.

Cette décision est même inquiétante pour la place de la culture associative à Paris. Ces deux péniches installées ici depuis plus de dix ans vont devoir faire place à un projet d’agriculture urbaine avec restauration sur place, et une "péniche-bal" soutenue par le créateur de lieux culturels-festifs "bobos" comme La Rotonde, la Petite Halle de La Villette, les Dock B à Pantin et de la Bellevilloise. La Mairie a lancé l'appel d'offre en mars dernier et cèderait ses amarres pour dix ans en échange de fructueuses rémunérations.

Ce dimanche 17 septembre, une mobilisation conjointe entre les péniches était prévue. Une pétition pour la péniche Cinéma a déjà récolté plus de 10000 signatures, qui s'ajoutent aux 12000 signatures pour sauver la péniche Anako.

Après 10 ans d’exploitation axés sur le quartier, de contraintes administratives rocambolesques où on nous imposait de ne pas faire de bénéfices sous peine d’être virés, lisez donc dans les détails (cf. Marianne du 11 Août 2017 “La Mairie de Paris coule la culture “) ce qu’a décidé la Mairie de Paris : nous virer, nous et la Péniche Anako, au premier janvier 2018 pour mettre à notre place une antenne de La Bellevilloise et à l’emplacement d’Anako, une épicerie flottante appartenant au groupe Carrefour.
J’en appelle à ceux qui ont été diffusés sur ce bateau, y ont été produits, aux écoles de cinéma, aux réalisateurs (trices), aux comédiens (nes), aux Festivals passés par chez nous, à ceux qui sont nés ici et passent maintenant au Forum des Halles, à toutes les associations que nous avons soutenues et/ou reçues gracieusement, à vous Mme Goodall, grande primatologue venue nous rendre visite à plus de 80 ans, aux participants et organisateurs de la Ouishare Fest, du Festival Zéro Wast, aux abonnés du restaurant 100% produits frais que nous avions créé, aux clubbers, aux marié(e)s , aux pacsés, aux hétéros, aux homos, aux riverains, au quartier dans lequel nous vivons depuis 10 ans et où nous nous sentons chez nous.

En fait, le plus gênant dans cette histoire, c'est le changement des règles du jeu. Les péniches sur ces quais devaient être associatives, à but non lucratif. Actives culturellement, ces péniches parvenaient à créer des dizaines d'événements et accueillaient des artistes souvent snobés par les institutions. Désormais, elles sont ouvertes au privé, qui va chercher de la rentabilité, mais qui devront aussi reverser un pourcentage de leurs ventes à la Ville.

Le profit comme seul mobile

On s'étonne ainsi quand le maire socialiste du XIXe arrondissement, François Dagnaud, explique que les projets retenus doivent répondre aux critères suivants (dans Le canard enchainé): "Ouverture sur le quartier et participation aux initiatives locales, valorisation de la voie d'eau et viabilité du modèle économiques." Les deux péniches menacées semblaient répondre à ces critères, mais, sans doute jugées pas assez profitables (en même temps, ça leur était interdit).

La mairie n'a pour l'instant présenter aucune alternative. Des emplois sont menacés, aucun nouveau lieu d'amarrage n'est trouvé. Il reste à savoir si le Conseil de Paris va oser sabrer dans ces symboles culturels au nom du respect de la loi Sapin 2 qui oblige à mettre en concurrence les occupants du domaine public (rien ne les obligeait à changer les modes d'attribution en voulant faire du profit un critère indispensable).

Un recours devrait être déposé. L'affaire devrait se terminer au tribunal. Face à face, la marchandisation d'un espace public gentrifié et deux associations alternatives et populaires déterminées à rester à quai. Touchées mais pas coulées.

Edit : à noter qu'un appel à solidarité a été lancé par Frank Delrieu, responsable de l’association de la péniche cinéma. Il est disponible en ligne sur le site GoFundMe.

L’ADAMI lâche le Festival des scénaristes de Bourges

Posté par MpM, le 3 mars 2011

A un mois de l'ouverture du Festival international des scénaristes, l'ADAMI (société civile pour l'Administration des Droits
des Artistes et Musiciens Interprètes) a soudainement décidé de lui retirer son soutien. C'est non seulement une subvention de 15 000 euros qui s'envole, mais en plus, le festival est contraint de retirer toute mention de l'ADAMI de son matériel de communication, ce qui implique de réimprimer les documents existants.

Une double peine, donc, pour la manifestation qui se voit contrainte d’annuler tout un pan de sa programmation faute de financement suffisant. Parmi les événements sacrifiés, on retrouve notamment l'atelier "tout est langage" qui permet de sensibiliser le jeune public à l’écriture et au langage cinématographique à travers des ateliers d’éducation à l’écriture de l’image, des rencontres et des conférences animés par des professionnels du 7e art. En plus des élèves, ce sont d'ailleurs les jeunes comédiens "Talents Cannes Adami" qui sont ainsi floués, puisqu'ils n'auront pas l'occasion de se produire pendant le festival.

Le Festival de Bourges précise qu'"aucun signe annonciateur de ce choix n’a été exprimé", ce qui rend d'autant plus brutale la décision  de l'ADAMI. De son côté, cette dernière ne s'explique pas sur le fond du problème, à savoir les raisons d'une décision si soudaine. Dans un communiqué, elle se contente de réaffirmer sa mission : "apporter son soutien à des projets artistiques
permettant notamment de valoriser l'emploi des artistes-interprètes
" et non "financer ad vitam aeternam le fonctionnement des structures artistiques" et évoque le "recul considérable des financements de la culture" mis en parallèle avec l'augmentation constante de manifestations réclamant un soutien. "Pour des raisons d'équilibre, voire même d'équité, nous ne souhaitons pas dire oui chaque année aux mêmes et dire non à tous les autres."

L'instance pointe également la "fragilité" des actions organisées par le festival et tente d'élargir le débat :  "qui devrait financer les actions éducatives des festivals : l'Adami ou les pouvoirs publics" ? Elle se dédouane enfin en relativisant l'impact d'une perte de 15000 euros pour un festival "dont le budget avoisine les 300 000 euros".

Autant d'arguments recevables dans le cas d'un non-renouvellement de partenariat mais assez peu convaincants lorsqu'il s'agit de se retirer d'un festival à peine quelques semaines avant son coup d'envoi. Il est naturel, et même sain, de questionner année après année le travail effectué par ses partenaires, de s'interroger sur les décisions prises, ou de diverger sur les axes retenus. Bien sûr l'ADAMI est-elle libre de choisir les manifestations qu'elle soutient, et de changer d'une année sur l'autre. Peut-être même  que Bourges peine à être le grand festival consacré au scénario que l'on pourrait souhaiter, ne serait-ce que parce qu'il pêche souvent sur le volet "international" du métier.

Pour autant, il est assez inconcevable de mener ces réflexions à un mois de l'ouverture, et d'en tirer une conclusion aussi violente, aussi immédiate, et au final assez peu motivée. Car quoi qu'elle en pense, en ne laissant pas aux organisateurs le temps de se retourner, l'ADAMI fragilise inutilement l'édition 2011 du festival et le place dans une situation délicate vis-à-vis de ses autres partenaires, de ses invités et surtout du grand public.

contraint d’annuler tout un pan de sa programmation ! Aucun signe annonciateur de ce choix n’a été exprimé : baisse progressive du montant de la subvention, appel à prudence dès la fin du 13e festival etc… Soutenir un festival ou pas est un choix qui appartient à l’Adami. Ce choix est ici pour le moins radical et inexpliqué. L’atelier Tout est langage annulé Depuis huit ans, l’Adami permet, avec à une subvention annuelle de 15 000 euros, fléchée sur l’Action Culturelle, de mettre en place l’atelier Tout est langage programmation spécifique « Jeune Public ». Ce rendez-vous a pour vocation de sensibiliser le jeune spectateur à l’écriture et au langage cinématographique à travers des ateliers d’éducation à l’écriture de l’image, des rencontres et des conférences animés par des professionnels du 7e art. Ce retrait soudain a pour conséquence de priver près de 400 enfants d’une partie de l’atelier Tout est langage qui consiste à découvrir en classe le scénario de deux films, qui sont ensuite lus et mis en scène lors du Festival par cinq comédiens « Talents Cannes Adami », avant d’être projetés. A un mois du Festival, les comédiens ont déjà commencé à préparer la mise en scène et les enfants ont déjà reçu les scénarios. Or, sans l’aide de l’Adami, il est impossible pour le Festival de rémunérer ces cinq comédiens ! L’atelier Tout est langage, qui était l’occasion pour ces comédiens de montrer l’étendue de leur talent, ne peut avoir lieu dans son intégralité. Avec l’atelier Tout est Langage, c’était non seulement les comédiens Talents Cannes Adami qui étaient mis en avant, mais aussi les valeurs du spectacle vivant qu’ont pu découvrir les quelques 3 300 enfants qui ont participé à cet atelier en six années à Bourges, entre 2005 et 2010. Le combat du Festival pour l’émergence de nouveaux talents est gravement mis à mal par ce retrait Créé par l’association scénario au long court, le Festival international des scénaristes a pour objectif de promouvoir l’écriture scénaristique sous toutes ses formes et encourager l’émergence d’une nouvelle génération d’auteurs. Ce retrait met en danger le Festival au risque de l’asphyxier, en le fragilisant financièrement d’une part, mais aussi en minimisant son combat en faveur du renouvellement des talents dans la création audiovisuelle et cinématographique. Il dévalorise également l’engagement de l’ensemble des partenaires du Festival. Un partenariat déjà largement engagé… De plus, cette décision tardive est prise alors que la grande majorité des éléments de communication ont été validés par l’Adami : affiches et page de remerciements aux partenaires (page déclinée sur le dépliant du programme, le catalogue, le site internet et la bande annonce du Festival) sur lesquelles figurent le logo de l’Adami. L’édito de Philippe Ogouz, Président de l’Adami, qui devait figurer dans le catalogue du 14e Festival, était prêt à être imprimé, de même que leur page de publicité (voir ci-dessus) t qui devait apparaître en couverture du catalogue. Le programme du Festival sur lequel est annoncé l’atelier Tout est langage avec le soutien de l’Adami est en cours d’impression et déjà disponible sur internet. Le service de communication de l’Adami demande à présent au Festival de retirer toute mention de ce partenariat, ainsi que le logo Adami, ce qui risque d’engendrer des coûts supplémentaires pour un Festival fragilisé ».

Les César de la dissension

Posté par vincy, le 22 février 2008

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Passage obligé dans tous les pays, les professionnels votent pour élire les meilleurs d'entre eux. La graine et le mulet, Prix Louis-Delluc, meilleur film selon les journalistes français, primé à Venise, semble favori. Même les exploitants en ont fait leur chouchou. Comme pour les Etoiles d'or, il a récolté quatre titres (les mêmes : film, réalisateur, scénario, espoir féminin). De même Persépolis semble être, pour les exploitants aussi, le meilleur premier film français. 236 responsables de salles ont pris part au vote.

Soit à peine plus que les 200 cinémas indépendants qui s'apprêtent à suspendre leur séance de ce vendredi soir, au moment de la soirée des César. Rideau et écran noir. Cette manifestation vise à exprimer le mal être et les inquiétudes d'une filière de plus en plus fragile et dont la politique publique semble friable. En jeu : la baisse fort probable des crédits alloués par les Directions Régionales des Affaires Culturelles. Laurent Delmas (France Inter) ne disait pas autre chose lors de la soirée des Etoiles d'or. "Certaines mesures récentes risquent de mettre en péril les actions décentralisées" que mènent les festivals. Un festival ce n'est pas seulement un caprice cinéphilique d'un maire, mais avant tout une action culturelle, intégrant le jeune public, les populations défavorisées, mélangeant l'éducation à la culture. Rendre vulnérable ces festivals (nombreux sont ceux qui doivent réduire la voilure cette année), c'est aussi un danger pour le patrimoine cinéphilique. Ces baisses de crédits contredisent la politique du Président de la République dans les deux cas - la pédagogie et le patrimoine . Le patrimoine, et les valeurs de la France, sont un slogan répété en permanence. L'éducation culturelle est au coeur de son programme électoral (qui proposait même d'intégrer le ministère de la Culture à celui de l'Education nationale) ; une mission a d'ailleurs été assignée à Eric Gross pour faire des propositions en ce sens.

Ce travail d'éducation à l'image est essentiel à une époque où tout est images. Cette diffusion "désintéressée financièrement" est indispensable pour que le 7e Art ne soit pas monopolisé par les multiplexes. Des petites salles encerclées par des grosses usines à pop corn, des festivals locaux qui perdent leur soutien budgétaire. Là encore les plus précaires trinquent.