Valenciennes, Vendôme, Lyon: les régions investissent dans le cinéma de demain

Posté par vincy, le 11 octobre 2015

Les régions, avant leur fusion, continuent d'investir dans le cinéma et l'audiovisuel, promesse d'emplois et de retombées économiques. En quelques semaines, ce sont trois projets qui se sont concrétisés, dans le Nord, le Centre et en Rhône-Alpes.

Arenberg Creative Mine Valenciennes

Nouvelles images et numérique chez Germinal

Au nord, il y avait les corons. L'ancien site minier de Wallers-Arenberg, près de Valenciennes, qui avait servi de décor pour le film de Claude Berri, Germinal, a été reconverti en centre de création cinématographique et numérique. Arenberg Creative Mine offre 5300 m2 de locaux avec plusieurs caméras, un studio son, un plateau TV complété d'un système de "motion capture", une halle d'essai...

Le site avait failli être détruit en 1989. La résistance des miniers puis le tournage de Germinal ont sauvé le lieu. L'Unesco, qui a classé les sites miniers du Nord-Pas-de-Calais au patrimoine mondial de l'humanité a fait le reste.

Le projet de reconversion a coûté près de 50 millions d'euros. Le projet global, qui n'est pas encore achevé, comprendra un Centre de culture scientifique, technique et industrielle et un Centre d'interprétation dédié à la télévision, au cinéma et aux médias numériques. Il complète La Plaine images à Tourcoing et à la Serre numérique à Valenciennes.

ciclic vendome

Une Fabrique dans une ancienne caserne

Vendôme (Centre), à moins de trois quarts d'heure de Paris en TGV, a misé sur l'animation. Ciclic Animation, une fabrique de films d'animation, s'est installé dans les anciennes écuries de la caserne de la ville, vides depuis plus de quarante ans, qui se rêve comme vitrine de la "French touch" du secteur.

L'Agence régionale du Centre pour le livre, l'image et la culture numérique (Ciclic) a abandonné le Festival du Film de Vendôme l'an dernier pour investir dans un équipement pérenne, afin d'accueillir en résidence les équipes de réalisation de films d'animation.

Il y a une salle de projection de 49 places, deux plateaux de tournage, deux ateliers pour les décors, deux salles de banc-titre et un espace de 60 m² de huit postes de travail, le tout pour un peu plus de 2 millions d'euros.

Trois équipes de trois cinéastes d'animation ont déjà investi les lieux en septembre. Deux autres équipes devraient les rejoindre d'ici à la fin de l'année pour des résidences d'une durée moyenne de six mois.

Les projets bénéficient des lieux de tournage et du matériel mis à leur disposition pour 1000 à 1200 euros par mois, en plus d'un hébergement sur place pour 150 à 200 euros par mois.

Lyon s'offre une école de cinéma

La CinéFabrique, première école nationale gratuite de cinéma en région, vient d'être inaugurée à Lyon avec une trentaine d'étudiants issus de la diversité..

La rentrée s'est faite début septembre mais elle n'a été inaugurée que début octobre par son président, le réalisateur mauritanien Abderrhamane Sissako. Il y a pire parrainage.

Pour l'instant, tous sont installés sur une ancienne friche industrielle de RVI, dans l'est lyonnais. Mais en 2017, l'école investira un terrain de 3000 m2 dans le 9ème arrondissement. En voulant s'ouvrir à des étudiants aux parcours moins "classiques", l'école privilégie la pratique à l'écrit, la diversité et le collectif à l'homogénéité et au cursus individuel des autres instituts de formations plus connus en France.

C'est clairement une opposition au centralisme (parisien) et au formatage (culturel). La formation s'ouvre ainsi au documentaire, au web, aux séries TV et opte pour des professionnels plutôt que des professeurs pour l'enseignement.

Il n’y aura plus de Festival du film à Vendôme

Posté par vincy, le 29 janvier 2015

affiche vendome 2014Après Paris-Cinéma et le festival du film asiatique de Deauville, c'est au tour du Festival du film de Vendôme de tirer sa révérence après 23 années d'existence. Ecran Noir a été partenaire durant de nombreuses années de cette manifestation qui était, notamment, axée sur la fabrication des films et le cinéma d'animation. Il enregistrait 11 000 entrées ces dernières années.

Sur son site internet, le Festival annonce son enterrement sans fleurs ni couronnes dans un communiqué: "La Région Centre et la Communauté du Pays de Vendôme ont annoncé ce mercredi 28 janvier 2015 l’arrêt du Festival du film de Vendôme, à l’occasion d’une conférence de presse et d’une visite du chantier de la future résidence d’animation de Ciclic à Vendôme. L’agence Ciclic ne sera en effet pas en mesure de poursuivre en 2015 l’organisation de cette manifestation. A l’heure où Ciclic accompagne et développe de nouveaux aspects de sa politique culturelle régionale, et dans un contexte budgétaire contraint pour nos partenaires locaux, il n’est plus possible d’envisager la reconduction d’un événement aussi important que le Festival dans le Vendômois.'

Carole Canette, présidente du Ciclic et vice-présidente de la région Centre évoque un changement de stratégie plutôt qu'une contrainte économique. Selon La République du centre, "dans le contexte actuel de restrictions, difficile de demander aux collectivités, déjà partenaires financiers du festival, d'abonder en plus au budget de fonctionnement du futur centre d'animation, au budget de 800.000€ par an, soit 54.000€ pour la communauté de communes du Pays de Vendôme et 400.000€ pour la Région".

Le choix est assumé. Le communiqué essaie quand même de ne pas baisser le rideau définitivement: "Afin de maintenir ces problématiques au cœur de notre activité, nous engagerons dans les semaines à venir une réflexion avec d’autres territoires pour l’accueil des rencontres professionnelles et pour réinventer un temps événementiel dédié à la diffusion culturelle des formes cinématographiques exigeantes. Une déclinaison web est également en chantier, avec le développement de notre espace Internet www.ciel.ciclic.fr, dédié à la diffusion de cinéma indépendant en ligne."

Le jour le plus court 2013 : Sébastien Betbeder, invité d’honneur d’Ecran Noir

Posté par MpM, le 20 décembre 2013

sbetbederA l'occasion de la 3e édition du Jour le plus court, grande fête du court métrage qui a lieu le 21 décembre, Ecran Noir a choisi un invité qui est à la frontière entre le long et le court métrage, le réalisateur Sébastien Betbeder, dont le prochain film (Deux automnes, trois hivers, un long métrage sélectionné par l'ACID au Festival de Cannes 2013, et présenté dans différents festivals dont Paris, Londres, Arras, Vendôme...) sort sur les écrans le 25 décembre, et dont le suivant, Inupiluk (un court) est sélectionné à Clermont Ferrand en 2014.

Sébastien Betbeder fait en effet partie de ces rares cinéastes qui alternent longs et courts métrages au gré de leurs envies. "Quand on fait un film, c'est le sujet, le budget, le mode d'écriture et de production qui imposent la durée", expliquait-il lors du dernier Festival de Vendôme où était proposé un focus autour de son travail.

Nous lui avons donc demandé de nous parler des films courts en général et de ses expériences en particulier, mais aussi de sélectionner trois courts métrages qui l'ont particulièrement marqué. Ces trois films seront dévoilés sur notre site tout au long de la journée du 21 décembre.

En attendant, première étape de cette carte blanche, Sébastien Betbeder parle sans fard du format court, trop souvent considéré comme un simple exercice de style avant le passage au long, ou un pré-programme avant le "vrai film", mais aussi des critères de durée qui sont parfois un peu absurdes à remplir. Alors qu'au contraire, le court métrage devrait être un formidable espace de liberté et de d'expérimentation.

Ecran Noir : La semaine passée, au Festival de Vendôme, un spectateur demandait au réalisateur Xavier Legrand à quoi sert le court métrage et quel peut être son avenir, notamment commercial, dans la mesure où il est très peu diffusé...

Sébastien Betbeder : A quoi ça sert ? Je ne sais pas. Je considère qu’un film, c’est un film. Je ne me pose pas la question dans ce sens-là. Je me dis qu’il y a des récits, des histoires, qui nécessitent cette durée-là, et je ne me vois pas gonfler une histoire qui ne nécessite pas une durée plus longue qu’une demi-heure, et inversement, réduire un scénario… J’ai toujours fonctionné comme ça. Il y a des idées qui me viennent et qui ne peuvent exister que sous format court.

Je déteste l’expression "carte de visite pour le long métrage". Pour le coup, je trouve ça très triste. Ca voudrait dire que ce format n’est destiné qu’aux jeunes cinéastes dans l’attente de leur premier long. Alors que c’est un format, dans l’histoire du cinéma, qui a toujours compté. Il y a énormément de chefs d’œuvre, de très belles choses. Je ne l’ai jamais considéré comme une carte de visite, mais comme le format adéquat pour l’histoire que j’avais à raconter. La seule fois où je me suis posé cette question : "à quoi ça sert ?", c’est effectivement quand j’ai recherché de l’argent pour mon premier long métrage. C'était bien d’avoir quelque chose à montrer pour dire qu’on avait déjà fait quelque chose. Mais si ça ne devait servir qu’à faire des longs métrages, j’aurais arrêté.

EN : Ce qui est assez révélateur que personne ne demande à quoi sert le long métrage…

SB : Oui, voilà, exactement !

EN : Mais la question de son manque de diffusion est réelle.

SB : Les gens disent : "ah, c’est dommage, on ne voit pas de courts métrages". Ou alors : "je me souviens d’une époque où ça passait avant le long métrage"… Ca aussi c’est une idée reçue. C’est un peu dommage de considérer que le court métrage, c’est forcément un avant programme. Ce n’est pas forcément une solution. En plus ça veut dire que le court métrage sera forcément court et ne dépassera pas dix minutes, sinon c’est un programme trop long.

C’est un drôle de format, c’est très compliqué de lui donner sa place, à part dans les festivals. Je ne sais pas, je n’ai pas trop de solutions… En plus, je trouve qu’il n’y a rien de plus difficile que de programmer un programme de courts métrages. L’ordre des films. Quel film à côté de quel autre… C’est vraiment très compliqué. Je sais qu’il y a des programmateurs qui sont très sensibles à ça, des sélectionneurs de festival. Parce que ça peut être dangereux, un film peut en gêner un autre, installer le spectateur dans un état qui est presque contradictoire avec le projet revendiqué par le cinéaste.

EN : Lorsque vous préparez un film, à quel stade savez-vous si votre projet est plutôt un court ou un long ?

SB : Le problème, c’est que le contexte  nous oblige à décider ça très tôt. On ne dépose pas au même endroit au CNC et dans les chaînes de télévision selon si le film sera un long ou un court (ou moyen, en ce qui me concerne, c’est souvent des moyens). Donc on doit le décider assez tôt. Sauf que moi, j’ai travaillé pas mal sur des durées proches de l’heure, donc c’était un vrai handicap. Surtout que mes scénarios sont assez ouverts, et l’expérience du tournage offre toujours des possibilités autres que ce que l’écriture propose, donc je me retrouve souvent dans des situations assez délicates.

Même sur 2 automnes, 3 hivers, c’était un peu la même question. Il y avait cette idée d’un projet très singulier dans la forme, donc je n’avais pas la certitude que le film tiendrait la durée d’une heure et demie. En même temps il faut mettre des règles. Il a fallu décider qu’un court métrage c’était un film jusqu’à 59 minutes, et ce n’est pas une heure et une seconde… C’est une règle imposée à laquelle je me soumets, mais qui, dans mon cas, pose tout le temps des problèmes.

Ce qui fait que les Nuits avec Théodore, on l’a déposé en court métrage parce qu’il faisait 58 pages et qu’on a tendance à dire "une page correspond à une minute". Après, on se retrouve en salle de montage avec un film d’une heure dix, on arrive à un objet qui nous satisfait qui fait une heure sept, sauf qu’on avait eu de l’argent pour 59 minutes… [NDLR : Le film existe finalement sous une forme courte intitulée Je suis une ville endormie et est sorti en salles dans une version longue qui s'appelle Les nuits avec Théodore.] C’est un peu absurde, mais il faut faire avec.

A revoir, la bande-annonce des Nuits avec Théodore :

Vendôme 2013 : retour sur le palmarès

Posté par MpM, le 17 décembre 2013

Le jury du 22e festival du Film de Vendôme, composé de Matthieu Chapellier (réalisateur), Francis Gavelle (critique), Jacky Goldberg (critique), Aude Hesbert (directrice artistique de Paris cinéma) et Héléna Klotz (réalisatrice), avait la dure tâche de départager 22 courts et moyens métrages produits ou réalisés en France.

le jourA travers les 4 films récompensés, on retrouve les grandes tendances de la compétition 2013. Le cinéma du réel, à la frontière entre documentaire et fiction, est ainsi mis à l'honneur avec le grand prix, décerné à Jean-Gabriel Périot pour Le Jour a vaincu La nuit.

Ce documentaire tourné en un mois à la maison d'arrêt d’Orléans filme dix détenus face caméra, dans une position statique, en train de raconter l'un de leur rêve. Une démarche qu'il faut saluer, dans la mesure où elle implique les détenus sur tout le processus de création, mais qui donne un film vite répétitif, assez désincarné.

Avec une démarche similaire, petite blondemais sous le prisme de la fiction, Emilie Aussel qui a reçu le Prix spécial du Jury pour Petite blonde, donne la parole à un groupe de jeunes Marseillais des quartiers populaires confrontés à une jeune fille issue d'un milieu bourgeois.

Les clichés et les préjugés sont au cœur du film que les acteurs (non professionnels) ont participé à écrire. Le format ultra-court empêche néanmoins l'histoire d'aller, elle-aussi, au-delà d'un certain simplisme.

petit matinPetit matin de Christophe Loizillon tout comme Pour La France de Shanti Masud semblent avoir séduit le jury par leur démarche formel.

Le premier est une suite de six plans-séquence suivant six personnages différents frappés par le même deuil. Un exercice de style puissant, doté d'une vraie force narrative.

Le second, beaucoup plus esthétisant, pour la francelorgne du côté de Philippe Garrel. Son intrigue (la rencontre nocturne entre plusieurs jeunes gens, tous très beaux et visiblement très torturés) sert visiblement de prétexte à de jolis plans très soignés, et des répliques profondes sur le sens de la vie, l'amour, la mort et le reste.

Pour le spectateur, ça passe ou ça casse. Visiblement, son maniérisme soigneusement étudié a séduit le jury qui récompense l'ensemble du casting.

L'un des grands oubliés du palmarès semble le très sensible Avant que de tout perdre de Xavier Legrand, thriller social sur le thème de la violence conjugale, qui mêle une rigueur stylistique quasi documentaire à un suspense anxiogène. Quant au cinéma d'animation, relativement peu représenté avec seulement 5 films, il repart malgré tout avec un double prix (Prix CinEcole en Vendômois et Prix du jury jeune) pour Us d'Ulrich Totier, une comédie sans parole sur la nature humaine.

Tout le palmarès

Grand Prix
Le Jour a vaincu La nuit de Jean-Gabriel Périot

Prix spécial du jury
Petite Blonde d’Emilie Aussel

Mention spéciale du jury
Petit matin de Christophe Loizillon

Prix d’interprétation
Pour les comédiens de Pour La France de Shanti Masud : Friedelise Stutte, Sigrid Bouaziz, David Atrakchi, Bastien Bouillon

Prix du jury jeune
US d'Ulrich Totier

Prix du jury étudiant
Le Tableau de Laurent Achard

Prix Format court
Pour La France de Shanti Masud

Prix CinEcole en Vendômois
US d'Ulrich Totier

Vendôme 2013 : l’art du mashup, du cinéma bricolé et du found footage

Posté par MpM, le 12 décembre 2013

final cutPour sa 22e édition, le Festival du Film de Vendôme explore l'art du mashup et du found footage sous toutes ses formes. Le film montré en ouverture, Final cut : ladies and gentlemen de Gyorgy Palfi, propose ainsi une relecture de l'histoire du cinéma par le prisme des héros de celluloïd et de leurs interactions amoureuses, sublimées et décuplées dans un montage constitué d'extraits de 500 longs métrages de toutes les époques.

Car c'est ça, l'art du mashup (littéralement "faire de la purée") : assembler des images et des sons provenant d'une ou plusieurs sources pour créer une nouvelle œuvre indépendante et originale. Une technique qui a longtemps été l'apanage du cinéma expérimental, et qui, grâce à l’avènement des technologies numériques, semble désormais pouvoir se démocratiser.

Dans cette optique, l'agence régionale Ciclic qui organise le festival de Vendôme propose divers ateliers de "cinéma bricolé" et de montage destinés au jeune public ainsi qu'un petit panorama des différentes pratiques du mashup à travers une sélection de courts métrages très divers.

Du neuf avec du vieux

On a ainsi pu découvrir Le facteur humain de Thibaut Le Texier composé d'images d'archives mêlant des scènes industrielles et des scènes domestiques pour illustrer la correspondance entre une femme et son mari qui expérimentent tous deux le Taylorisme dans leur quotidien, Gravity de Nicolas Provost qui combine des baisers de cinéma dans une alternance effrénée de plans stroboscopiques ou encore Home stories de Mathias Muller qui, avec des plans très courts d'actrices en situation de stress, décortique le mécanisme du voyeurisme.

Mais le plus impressionnant the counterde la sélection est probablement The counter de Volker Schreiner qui consiste en une suite de fragments très courts où apparaît un chiffre, formant au final un compte à rebours géant allant de 266 à zéro.

Le montage cut et frénétique et la bande son lancinante empêchent le spectateur de détacher le regard de l'écran, uniquement focalisé sur le chiffre à trouver dans l'image avant qu'elle ne soit remplacée par une autre, et sans plus faire attention aux comédiens célèbres qui se succèdent eux-aussi à l'écran.

Un suspense oppressant se dégage de cette insaisissable fuite en avant : une fois le compte à rebours terminé, que va-t-il se passer ? En six minutes, Volker Schreiner résume ce qu'est l'art du found footage : détourner les images d'origine jusqu'à les transformer en une matière brute qui ne compte plus pour ce qu'elle fut (des extraits de films célèbres où l'on s'amuse à reconnaître tel ou tel) mais bien pour ce que le réalisateur a décidé d'y placer (ici : des chiffres). Un chef d’œuvre du genre qui est par chance visible en ligne.

Voyages en cinéphilie

L'autre volet de la thématique "mashup", l'installation "Voyages en cinéphilie", s'avère tout aussi fascinante, avec en plus la particularité d'être interactive. En effet, le festival de Vendôme propose trois types d'expériences en lien avec le détournement d'images préexistantes.

table mashupLa table mashup, créée par le réalisateur Romuald Beugnon et coproduite par quatre pôles régionaux  dont Ciclic, met ainsi le montage vidéo à la portée de tout un chacun. Il s'agit d'une table, munie d'une vitre transparente, sous laquelle est placée une caméra capable de reconnaître des codes visuels.

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Vendôme 2013 : l’animation néerlandaise à l’honneur

Posté par MpM, le 10 décembre 2013

Le festival du film de Vendôme consacre chaque année un panorama au cinéma d'animation d'un pays européen. Après la République tchèque et l'Italie, ce sont cette année les Pays Bas qui sont à l'honneur au travers de cinq courts métrages révélant les différentes facettes de cette cinématographie réputée, mais souvent méconnue du grand public. Petit tour d'horizon des grands noms qui la composent.

get realGet real d'Evert de Beijer a reçu une mention spéciale au Festival de Berlin où il était présenté dans la section Generation en 2011.

Réalisé en grande partie au stylo bic, ce qui lui confère un aspect crayonné à dominante bleue, le film est construit comme un jeu vidéo qui contamine peu à peu la réalité du personnage central, un ado accro à ce jeu où il est le garde du corps d'une grande star de la chanson.

La musique techno qui envahit elle aussi le quotidien et l'absence de dialogue audible renforcent l'impression de porosité entre les univers. Ne reculant pas devant une certaine provocation, Evert de Beijer s'empare des codes adolescents (violence fantasmée versus faiblesse physique, sexualité exacerbée versus timidité excessive, etc.) pour raconter un parcours initiatique symbolique dénué de pathos ou de morale.

L'animation se prête particulièrement à ce type de projet qui ne recherche en aucun cas à imiter la réalité, mais au contraire à se la réapproprier pour en faire le reflet du monde tel qu'il est perçu par les personnages.

Le moine et le poisson le moine et le poisson de Michael Dudok de Wit a connu une belle carrière internationale au milieu des années 90, avec une nomination à l'Oscar du meilleur court métrage et un César reçu en 1996. Le film est le résultat de la rencontre entre le réalisateur néerlandais Michael Dudok de Wit et le programme "Artistes en  résidence" des studios Folimage.

Réalisé avec une technique d'aquarelle traditionnelle (sans assistance informatique), il raconte la complicité naissante entre un moine et le poisson qu'il tente par tous les moyens d'attraper. Aussi sautillant l'un que l'autre, les deux personnages évoluent au rythme de la musique primesautière du compositeur Serge Besset (La prophétie des grenouilles, Une vie de chat) basée sur La Follia d'Arcangelo Corelli.

Avec sa simplicité graphique et la fluidité de son animation, Le moine et le poisson fait office de classique de l'animation. Son réalisateur a d'ailleurs obtenu l'Oscar du meilleur court métrage avec son film suivant, Père et fille. Il travaille actuellement sur un projet de long métrage coproduit par Wild bunch et les studios Ghibli.

ChaseChase d'Adriaan Lokman s'inscrit dans la lignée expérimentale des précédentes œuvres du cinéaste (Barcode, Forecast...) et propose une interprétation personnelle (proche de l'abstraction) du Bullitt de Peter Yates.

Entièrement conçu par ordinateur, il propose une expérience hallucinée, qui parvient à être à la fois drôle, captivante et ultra-rapide, d'un univers perçu comme une gigantesque modélisation informatique. Il a d'ailleurs été pensé pour être projeté en 3D (ce fut le cas à Annecy en 2012), pour ajouter à l'impression d'immersion dans ce monde composé de triangles mouvants.

Junkyard de Hisko Hulsing junkyardprend le contrepied des autres films présentés dans le programme en proposant un dessin inspiré de la peinture, mais réalisé à la palette graphique.

Avec une esthétique assez proche de la bande dessinée, il raconte une rencontre dans un wagon de métro qui provoque une suite de flashbacks entrecoupés de séquences au ralenti et de flashs presque stroboscopiques.

Là encore, peu de dialogues. En revanche, la tonalité du film, ultra pessimiste, et la violence (à la fois physique et psychologique) qui s'en dégage en font une étude sociale à la noirceur glaçante, étrangement renforcée par l'utilisation de l'animation.

monster of nixThe monster of Nix de Rosto est un conte musical en animation 3D qui s'offre les voix de Tom Waits (en hirondelle menaçante) et Terry Gilliam (en garde forestier froussard).

Etrange et ténébreux, l'univers du film lorgne visiblement du côté de Tim Burton : personnages effrayants, décors dévastés, œufs contenant des histoires monstrueuses...

Si le parcours initiatique du jeune Willy demeure un peu obscur, cela n'empêche pas une certaine poésie macabre, à la limite du kitsch, qui ouvre tout un univers de possibles animés.

Vendôme 2013 : rencontre avec les réalisateurs en compétition

Posté par MpM, le 9 décembre 2013

vendôme 2013L'édition 2013 du Festival de Vendôme a débuté avec la présentation des 22 films de la compétition nationale, qui mêlent courts et moyens métrages, fictions et documentaires, animation et prises de vue réelles.

A l'issue des projections, les réalisateurs présents ainsi que des membres des équipes techniques ont assisté à une rencontre ouverte au public.

L'occasion de parler de certains films ayant particulièrement marqué les esprits, comme le très fort thriller social Avant que de tout perdre de Xavier Legrand, qui aborde la thème de la violence conjugale, ou plus largement de cinéma et de secrets de fabrication. Florilège des échanges.

Avant que de tout perdre

"C'est un sujet [la violence conjugale] qui, en tant que citoyen, me pose beaucoup de questions et me révolte un peu. La société a du mal à appréhender le problème pour le faire reculer. Une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon. C'est un sujet difficile à aborder au cinéma. Je voulais parler de la violence dans la famille car le foyer est l'endroit où l'on devrait être en sécurité, alors que c'est l'endroit où l'on est paradoxalement le plus en danger. Je voulais aussi questionner la place des enfants quand il y en a. " (Xavier Legrand, réalisateur d'Avant que de tout perdre)

Quel avenir commercial pour le court métrage ?

"J'ai eu la chance qu'il y ait un buzz sur le film. Il a même bénéficié d'une sortie en salles à Paris au mois de mars. Ensuite il a circulé, il était diffusé après ou avant un long. Canal + le diffuse. Mais sinon, à part les festivals... C'est le support court métrage qui pose problème au niveau commercial. Je ne sais pas quel est l'avenir du court métrage. Ce serait à un producteur de répondre." (Xavier Legrand, réalisateur d'Avant que de tout perdre)

"Le mieux, c'est d'être sélectionné dans de nombreux festivals. Et puis il y a la diffusion en salles qui revient un peu, surtout sur Paris." (Aurélien Deseez, producteur de Dahus de Joao Nicolau).

"Je ne dis pas que tout est formidable, mais quand même, un court métrage diffusé sur France 2, même à 1h du matin, ça fait quand même 3000000 spectateurs. Ce n'est pas rien." (Christophe Loizillon, réalisateur de Petit matin)

Pourquoi faire court ?

"Le format 30 minutes, pour raconter ce jour où le personnage principal a décidé de quitter son mari violent, était le meilleur moyen de capter cette urgence. Ce qui se passe après, c'est un autre long métrage. De même que le mécanisme psychologique qui l'amène à partir." (Xavier Legrand, réalisateur d'Avant que de tout perdre)

Costumes

"C'est un poste qui n'est pas souvent bien traité en court métrage. Souvent on fait avec la garde-robe des comédiens... Mais dans le long aussi, ça arrive ! Après il faut quand même créer le personne, donc il faut s'adapter. Avec Xavier [Legrand, réalisteur d'Avant que de tout perdre], ça a été une très belle rencontre. Il était très exigeant, il savait ce qu'il voulait pour le film. On a dû travailler vite et bien tout de suite parce qu'il n'y avait pas un gros budget. Mais on a eu beaucoup de chance car on a eu l'autorisation d'utiliser l'uniforme de Leclerc pour les scènes dans le magasin." (Laurence Forgues-Lockhart, costumière d'Avant que de tout perdre)

Du plan séquence

"J'ai du mal à épuiser le travail sur le plan séquence. C'est quelque chose qui me fascine, entre la fiction et le documentaire. Le cinéma, c'est quand même filmer du temps, donc il y a une sorte d'évidence du plan séquence. Cela permet un mystère qui se dévoile chez la personne qu'on filme. Il y a une sorte de lâcher prise. Un comédien essaye toujours de contrôler les choses. D'habitude, ils sont filmés 30 secondes, 1 minute. Mais quand la séquence dure 6 ou 7 minutes, au bout d'un moment, ils ne se contrôlent plus. Il y a aussi l'envie de s'amuser avec le cinéma. Plus c'est compliqué, plus l'équipe de cinéma aime ça. Un travelling qui commence sur une mobylette au milieu de la rue et se termine à l'intérieur d'une maison 6 minutes plus tard, tout le monde adore. Mais il faut qu'il y ait du sens au bout, bien sûr." (Christophe Loizillon, réalisateur de Petit matin, film de 34 minutes réalisé en six plans séquences).

Papier découpé

"C'est un truc très instinctif ! Concrètement, c'est vraiment un pantin dessiné que l'on anime image par image. J'avais envie de quelque chose à mi-chemin entre les marionnettes et le dessin." (Pierre Luc Granjon, réalisateur de La grosse bête)

Monsieur Lapin

"Ce n'est pas un film à thèse ou à sujet. Le but était de raconter un état. De faire un film flottant, avec un personnage absolument passif. Il n'agit pas sur le monde, ce sont les autres qui agissent sur lui. Il suit toujours les autres. Le monde lui paraît étrange et je voulais que l'on ressente cette étrangeté. Par exemple, les gens le prennent pour quelqu'un d'autre. Cela crée un trouble, surtout si c'est insistant, et surtout lorsqu'on est en pleine quête identitaire comme le personnage." (Pascal Servo, réalisateur de Monsieur lapin)

22e Festival du Film de Vendôme : Filmez, jeunesse !

Posté par MpM, le 6 novembre 2013

vendôme 2013Si l'on a toujours hâte de voir le nouveau film d'un auteur que l'on admire, quoi de plus excitant que de découvrir un jeune cinéaste inconnu dont le style et le propos tranchent sur la production contemporaine ?

Depuis plus de vingt ans, le festival de Vendôme offre une véritable tribune à cette jeune création cinématographique européenne en lui consacrant un festival ambitieux et résolument tourné vers tous les publics : les lycéens qui programment une section consacrée à la thématique "tomber amoureux d'un fantôme" ; les plus jeunes (voire les tout-petits) qui profitent de la sélection "jeune public". ; les adultes qui se passionnent pour les premiers films, courts ou longs...

Durant cette semaine de festival, du 6 au 13 décembre, il y en aura en effet pour tous les goûts : une compétition de courts métrages français, un focus sur le cinéma italien, une rétrospective autour du réalisateur Sébastien Betbeder, un panorama de premiers et deuxièmes longs métrages européens, des documentaires, une sélection de films d'animation, un coup de projecteur sur la technique du mash-up...

Tant de belles choses parmi lesquelles il sera difficile  de choisir ! Heureusement, Ecran Noir est là pour mettre en avant cinq moments à ne surtout pas louper, en toute subjectivité :

- le film d'ouverture, Final cut : ladies and gentlemen de Gyorgy Palfi, un film de montage qui réunit des extraits de plus de 450 films. A voir pour sa portée universelle, sa déclaration d'amour au cinéma, et surtout son travail virtuose de montage.

- Méliès, cabaret magique : un spectacle complet mêlant conte, théâtre, cinéma, magie et musique pour raconter Georges Méliès et ses innombrables inventions. Parce qu'on ne rappellera jamais assez l'apport du génie Méliès au cinéma mondial.

- Avant que de tout perdre de Xavier Legrand : ce court métrage en compétition, à mi-chemin entre la chronique sociale et le thriller haletant, fait battre plus vite le cœur du spectateur. Un exemple brillant de la force d'évocation du court métrage.

- Suzanne de Katell Quillévéré : un long métrage qui suit le destin d'une jeune femme au fort caractère incarnée par Sara Forestier et qui pousse l'art du récit syncopé à son plus haut niveau.

- Mille lectures d'hiver, une ciné-lecture animée par l'écrivain Olivia Rosenthal autour de son recueil Ils ne sont pour rien dans mes larmes, dans laquelle elle répond à la question « quel film a changé votre vie ? ». Parce qu'à défaut de changer le monde, le cinéma peut parfois changer les êtres ?

Rendez-vous dès le 6 décembre à Vendôme pour en faire l'expérience.