Poitiers Film Festival: un palmarès aux saveurs asiatiques

Posté par cynthia, le 7 décembre 2015

Bien que le froid ait percé nos os, la soirée du palmarès nous a bien remis d'aplomb pour la semaine. En effet, c'est dans une ambiance bon enfant que la journaliste et chroniqueuse de "La Bande originale" sur France Inter Leïla Kaddour-Boudadi a présenté la remise des prix samedi soir dans l'auditorium de Poitiers. Drôle et lumineuse, la jeune journaliste devrait postuler pour présenter la prochaine cérémonie des César... on ne s'y endormirait pas pour une fois.

Les deux prix principaux ont couronné un film sud-coréen et un autre thaïlandais.

Palmarès

Grand prix du jury accompagné de 3000 euros offerts par la ville de Poitiers:
Janus de Sung Hwan Kim (Corée du sud) un court-métrage qui donne légèrement la nausée mais tout de même très original. L'histoire d'un couple en détresse après avoir renversé un enfant sur une route enneigée.
Prix spécial du jury accompagné de 1500 euros offerts par la Région Poitou-Charentes:
That Day of the Month de Jirassaya Wongustin (Thailande), notre petit coup de cœur de cette édition, l'histoire touchantes de deux amies et du jour de leurs règles.
Prix de la mise en scène accompagné de 1500 euros offerts par la Région Poitou-Charentes:
The Satanic Thicket-ONE de Willy Hans (Allemagne), un trip sous fond de satanisme à glacer le sang.
Prix du scénario accompagné de 1000 euros offerts par l'Université de Poitiers:
Ten Buildings Away (Israël) Un court-métrage dans l'ère du temps sur une famille de migrants.

Prix du Public accompagné de 1500 euros offerts par le Département de la Vienne:
Deux Amis de Natalia Chernysheva (France), une animation qui raconte l'histoire de deux amis, une chenille et un têtard qui grandissent dans deux environnements différents.

Prix Découverte de la Critique Française, prix attribué par le Jury du Syndicat Français de la Critique de Cinéma à l'issue d'un débat ouvert en public
Let's Burn Something on My Way Out! de Dennis Stormer et Jan D. Günther (Allemagne), un court-métrage qui raconte une histoire d'amour exceptionnelle, mais encrée dans la routine, d'un jeune couple.
Prix Amnesty International accompagné de 500 euros offerts par Amnesty International France:
The Living of the Pigeons de Baha' AbuShanab (Palestine), un aperçu troublant et surréaliste des allées et venues quotidiennes pendant «l'heure de pointe», aux premières heures du matin entre Bethléem et Jérusalem.
Prix Sakura accompagné de 1500 euros offerts par le Fonds de dotation Sakura:
Chhaya de Debanjan Nandy (Royaume-Uni), l'histoire d'un vieil homme cloitré dans une maison de retraite avec le souvenir de sa femme bien-aimée qui le suit comme une ombre.
Esel de Rafael Haider (Autriche), un conte qui met en scène un couple de personnes âgées qui s'efforcent de maintenir leur fermer jadis prospère, avec l'aide d'un âne en fin de vie.

Prix du jury étudiant accompagné de 1500 euros offerts pas l'Université de Poitiers:
Hotaru de William Laboury (France) Un court-métrage onirique.

Poitiers Film Festival: la leçon de cinéma de Pierre Schoeller (L’exercice de l’Etat)

Posté par cynthia, le 5 décembre 2015

pierre schoeller poitiers film festival

César du meilleur scénario pour L'exercice de l'État en 2012, le scénariste et réalisateur Pierre Schoeller a honoré l'Auditorium du Poitiers Film Festival de sa présence pour une leçon de cinéma.

"L'écran est une surface où on y met des images...tel un peintre sur sa toile." Le réalisateur nous offre en hors-d'œuvre l'introduction du film Persona de Ingmar Bergman. Et quoi de plus fort que ce film pour nous transporter dans un autre monde et ainsi rentrer dans le vif du sujet: le cinéma, un monde à part et si plaisant! Comme Pierre Schoeller l'explique, avec Persona nous sommes "proches de l'onirisme, proches d'un médium", ce film lui a montré à quel point "un début pouvait être crucial pour un film." Le réalisateur montre son envie de voir autant de liberté dans le cinéma actuel et que toute personne devrait avoir cette liberté afin de faire un film. Passionné par le film de Bergman, il nous propose un extrait d'un film qui s'en est inspiré, Le sourire de ma mère de Marco Bellocchio où les messages subliminaux se reflètent dans le scénario de ce film Italien.

"Les cinéastes sont là et ce sont eux qui nous construisent en tant que spectateurs et cinéastes!" Le réalisateur a donc été construit par les autres, les génies du septième art d'antan. Quoi de plus logique donc de nous présenter un extrait du sublime et déstabilisant Opening Night de John Cassavetes. Une fan écrasée par le chauffeur de son actrice favorite... une belle mort? Plutôt un tourment pour la sublime Gena Rowlands.

Mais où voulait en venir Pierre Schoeller avec ses extraits? Bien évidemment à nous expliquer comment il a attrapé le virus du cinéma et surtout comment il en a fait son métier! Ainsi la scène d'introduction du film L'Exercice de l'État lui a été inspiré par Bergman mais aussi par les films japonais (Les hommes en noir) dont il est fan.

Et c'est là que la magie a réellement commencé... Pierre Schoeller nous a confié ses secrets de fabrication au point qu'on a eu envie de faire un film! Afin de briser un peu le mythe du crocodile, il faut savoir que ses grognements étaient ceux d'un furet et non d'un vrai crocodile. Par contre, on ne sait pas si Olivier Gourmet a réellement été au garde-à-vous en dessous de la ceinture... on n'a pas osé demandé. "Il faut beaucoup de chance pour faire un film!" avoue le cinéaste au public en guise d'introduction à son explication de la scène de l'accident. Si elle est spectaculaire à ce point dans L'Exercice de l'État, c'est que le réalisateur a regardé de nombreuses vidéos d'accident avant de réaliser celle-ci. Une équipe de cascadeurs a dû faire le reste, non pas sans difficultés. Qu'est-ce que vous avez imaginé? C'est très difficile de faire tourner une voiture plusieurs fois. Alors que dans le scénario plusieurs tonneaux étaient prévus, en réalité ils n'ont réussi à en faire que deux... la magie du son s'est chargée du reste et à créer l'illusion d'un accident de dingue!

Parabole pour une définition du cinéma: douce et exaltante tromperie qu'on adore aimer à l'infini.

Poitiers Film Festival: trois désirs prometteurs

Posté par cynthia, le 4 décembre 2015

Tandis que le soleil brille sur Poitiers, le froid gagne nos membres de cinéphiles ("Winter is comingé comme dirait l'autre) mais ne nous empêche pas d'aller dans les salles bien au contraire! Nous avons pourtant tenter de nous réchauffer en débutant la journée avec une série de courts sous le signe du désir...quelque qu'il soit.

Tout d'abord avec Persefone, "une sorte d'extrapolation du mythe» du même nom", nous explique sa réalisatrice, Grazia Tricarico. Un jeune homme retrouve une femme noyée en pêchant un poulpe. Pris pour la jeune femme, une envie nécrophile le possède jusqu'à ce qu'il succombe à son désir sexuellement mortuaire. Il s'agit d'une "réflexion sur les rapports entre la mort et la vie" décrypte la réalisatrice. Un rapport aussi lié à la nourriture avec une scène de dégustation de poulet et de décortication de poulpe qui m'a réconforté dans mon végétarisme.

Nous avons continué dans le domaine de l'humain et de ses désirs avec Wellington Jr de Cécile Paysant qui a remonté le panthéon Français au travers du récit animé d'un enfant qui doit chasser son premier animal afin de rentrer dans les grâces de son père et du quand dira-t-on de ses voisins. Entre l'envie de plaire, la déception et la compassion, sa réalisatrice nous plonge dans un univers froid et glacial où le coup final nous laisse bouche bée.

Pourtant notre véritable coup de cœur vient de Thailande avec That Day of the Month, un court-métrage de Jirassaya Wongsutin sur deux filles, leurs règles, les hommes et surtout leur amour refoulé. Drôle, tendre et lumineux, c'est une vraie pépite qui, on espère, sera récompensé au palmarès!

Poitiers Film Festival: un western australien comme premier choc de la compétition

Posté par cynthia, le 3 décembre 2015

Sous le soleil de Poitiers, nos petites rétines se délectent d'une série de courts-métrages en provenance du monde entier. Qui dit monde entier, dit éclectique et c'est d'ailleurs ce qui fait briller ce festival de jeunes talents. Petit Rappel.

Du 27 novembre au 4 décembre se tient le Poitiers Film Festival qui fête la jeune création mondiale. Avec une compétition large en sujets et qui invite les spectateurs à voter après chaque séance, ce festival continue de révéler les jeunes talents des écoles du cinéma du monde. Les écoles invitées cette année sont toutes plus prestigieuses les unes que les autres: la Deutsch Film und Fernsehakademie Berlin GmbH, la Filmakademie Baden-Württemberg, la Hamburg Media School ou encore la IFS Internationale Filmschule Köln. Bref l'Allemagne débarque.

Mais la France n'est pas oubliée. Lla soirée So French de ce sixième jour de compétition a montré que notre pays àa encore du génie à vendre.

Pour la compétition initiale, nous avons découvert quelques perles en cette journée. Tout d'abord un petit chef-d'œuvre que l'on a bien envie de voir passer en long-métrage: Foal de Vanessa Gazy en provenance d'Australie. Ce western met en scène Aurora, qui, après avoir commis un adultère en l'absence de son mari, tombe enceinte. Sa fille Annie, quant à elle, s'efforce de comprendre l'étrangeté des adultes et de découvrir sa propre sexualité à travers les controverses de sa mère.

Dans un tout autre registre I'm Twenty Something de Marij Kavtaradzè, une sorte de Projet X maudit et Lituanien qui met en scène trois amis d'une vingtaine d'années tentant l'impossible afin de s'éclater un vendredi soir (et ce ne sera pas facile). Plus plat et obscur: Chaque fois qu'on se dit au revoir de Chao Liang pour la France. Inspiré de sa grand-mère (d'après ses dires), ce moyen-métrage de 37 minutes raconte l'histoire d'une vieille femme hantée par ses souvenirs...

Poitiers Film Festival 2015 : le tour du monde en 47 films

Posté par MpM, le 11 novembre 2015

poitiers20151412 candidats, 47 sélectionnés. Des chiffres toujours plus vertigineux pour le Poitiers Film Festival dont la 38 édition se tiendra du 27 novembre au 4 décembre, et qui met à l'honneur les films de cinéastes en devenir issus de 34 écoles et 22 pays.

Les festivaliers voyageront donc de Cuba au Japon, de Pologne au Canada, de Thaïlande en Israël pour une compétition mêlant tous les genres et les styles.

Pour accompagner cette belle fenêtre ouverte sur la jeune création cinématographique mondiale, plusieurs temps forts rythmeront les dix jours du festival :

- une ouverture sous le signe du premier long métrage avec Le grand jeu de Nicolas Pariser, déjà précédé d'une belle réputation, un focus sur le cinéma allemand en présence de l'acteur Rüdiger Vogler (acteur fétiche de Wim Wenders) et du réalisateur Christoph Hochhäusler (Les Amitiés invisibles, L’Imposteur...),

- une master class sur la restauration de films en hommage aux 120 ans du cinéma et de la Gaumont, avec Jean-Paul Rappeneau en guest star,

- et une leçon de cinéma proposée par Pierre Schoeller (L’Exercice de l’État, Versailles...), Jean-Pierre Laforce et Philippe Schoeller.

Un rendez-vous à ne pas manquer pour les amoureux du 7e art, les simples amateurs et bien sûr les aspirants étudiants en cinéma ! Car comme le rappelle le festival, quand ces jeunes cinéastes "seront à l’affiche des salles de cinémas avec leurs longs métrages, le public du Poitiers Film Festival pourra dire qu’il les a vus à Poitiers. Et même qu’ils les a rencontrés."

Poitiers Film Festival 2015 : l’Allemagne à l’honneur

Posté par MpM, le 23 août 2015

poitiers2015Pour sa 38e édition, le Poitiers Film Festival (ex "Rencontres Henri Langlois") poursuit son oeuvre de révélateur et de soutien du jeune cinéma, soucieux d'être toujours là où se construit le cinéma, où se confrontent les écritures, où les jeunes réalisateurs peuvent s’affranchir des règles et tout tenter.

Après l'immense succès de l'édition 2014 (qui a attiré près de 19000 spectateurs), la manifestation proposera du 27 novembre au 4 décembre une cinquantaine de films d'école venus de tous les horizons, qui auront préalablement été sélectionnés parmi plus de 1300 candidats. C'est dire la qualité, et le niveau exigence, dont témoignent les heureux compétiteurs.

Par ailleurs, le festival met cette année l'Allemagne à l'honneur à travers les courts métrages de jeunes réalisateurs venus de Berlin, Hambourg, Cologne, Postdam et Ludwigsburg invités à Poitiers et accompagnés de grands noms du cinéma allemand. Ce focus sera accompagné d'un regard sur les films cultes de cinéastes allemands confirmés comme Wim Wenders, Fatih Akin, Andreas Dresen ou encore Christian Petzold...

Comme chaque année, Poitiers se distinguera également par sa leçon de cinéma, ses événements professionnels, ses avant-premières en présence des équipes des films et bien sûr ses fêtes et ses rencontres qui en font un grand rendez-vous du jeune cinéma mondial.

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Poitiers Film Festival
Du 27 novembre au 4 décembre 2015
Plus d'informations sur le site de la manifestation

Rencontres Henri Langlois 2013 : retour sur le palmarès

Posté par MpM, le 11 décembre 2013

Deux histoires de fratrie et deux films d'animation ont séduit le jury de cette 36e édition des Rencontres Henri Langlois, composé de la productrice Hélène Cases (Lionceau films), la déléguée générale du festival de la Rochelle Prune Engler, la comédienne Nathalie Richard (Jeune et jolie, Les amoureux), l'écrivain et scénariste Philippe Di Folco (Tournée) et le réalisateur Eduardo Williams (Pude ver un puma, Que je tombe tout le temps ?).

las lagrimasLe grand prix, Las lagrimas, raconte la virée de deux frères en forêt au cours de laquelle la tristesse qui a envahi leur famille va finir par se dissiper.

Il s'agit d'un moyen métrage réalisé au Mexique par Pablo Delgado Sánchez et qui mêle de beaux moments de complicité fraternelle et quelques passages trop émotionnellement appuyés.

To Guard a Mountain de Izer Aliu (Prix spécial du jury) suit également deux frères partis à la recherche d'une brebis égarée et qui se retrouvent seul dans la montagne sous un violent orage.

Là encore, de jolies scènes pleines de spontanéité côtoient quelques maladresses pleines de bons sentiments.

bon voyageLes deux films d'animation, Bon voyage de Fabio Friedli (Prix du scénario) et Sleeping with the fishes de Yousif Al-Khalifa (Prix de la mise en scène), racontent respectivement le voyage d'émigrants entassés dans un camion à destination de l'Europe,et une histoire d'amour atypique entre une poissonnière buharet un livreur à tête de truite arc-en-ciel.

La critique française a quant à elle récompensé un film turc en noir et blanc, Buhar de Abdurrahman Öner, tandis que le jury étudiant a offert le doublé à To Guard a Mountain de Izer Aliu de la Norwegian Filmschool.

Tout le palmarès

Grand Prix du Jury
Las Lágrimas de Pablo Delgado Sánchez

Prix spécial du Jury
To Guard a Mountain de Izer Aliu

Prix de la Mise en scène
Sleeping With The Fishes de Yousif Al-Khalifa

Prix du Scénario
Bon voyage de Fabio Friedli

Prix Découverte de la Critique française
Buhar de Abdurrahman Öner

Prix du Public
Welkom de Pablo Munoz Gomez

Prix du Jury étudiant
To Guard a Mountain de Izer Aliu

Mention spéciale du Jury étudiant
A Fable of a Blood-Drained Girl de Alejandro Iglesias Mendizabal

Prix Amnesty International France (Prix transversal sections films d'écoles)
Le projet Water Films réalisés par des israéliens et des palestiniens autour du thème de l’eau

Prix du Côté courts français
Souffle court de Johann Dulat

Prix du Jury Lycéen
La Ville est calme d'Alexandre Labarussiat

Rencontres Henri Langlois 2013 : la relève française ?

Posté par MpM, le 7 décembre 2013

TRUCS DE GOSSESParmi les 45 films en compétition lors de la 36e édition des Rencontres Henri Langlois, sept viennent d'écoles françaises, ce qui donne un aperçu instructif de la production des jeunes étudiants de notre pays.

Première constatation, sur les 7 films, 6 sont des œuvres d'animation (au centre du cursus des écoles représentées comme La poudrière ou Supinfo Com). Les techniques les plus fréquemment utilisées sont le dessin et l'animation 3D.

Les sujets, eux, sont généralement légers, voire anecdotiques, comme prétextes à ce qui peut parfois s'apparenter à un exercice de style : la cour de Versailles représentée sous forme de gallinacés (A la française de Julien Hazebroucq, Emmanuelle Leleu, William Lorton, Morrigane Boyer et Ren Hsien Hsu), une escapade de vieilles maisons qui prennent leur indépendance (Home sweet home de Pierre Clenet, Alejandro Diaz, Romain Mazanet et Stéphane Paccolat), TROIS PETITS CHATSune histoire d'amour estivale (Soeur et frère de Marie Vieillevie)...

Le tragique est aussi au rendez-vous avec une famille de félins durement frappée par la maladie (Trois petits chats de Maïwen Leborgne, Albane Hertault, Alexia Provoost et Benoit belaunay).

Les petits chats sont mignons, les poules sont amusantes, les maisons ne manquent pas de souffle... mais pas facile, en à peine quelques minutes, de développer une histoire vraiment originale ou profonde.

Trois œuvres parviennent malgré tout à imposer leur singularité :

PIEDS VERTS- Trucs de gosse d'Emilie Noblet (la Fémis) parce qu'il s'agit d'un film réalisé en prises de vue réelles, situé dans les coulisses d'un multiplexe parisien, qui mélange film générationnel et comédie romantique décalée.

- Pieds verts d'Elsa Duhamel (La poudrière), un documentaire en teintes pastels qui raconte, en 4 minutes et avec une pudeur infinie, la nostalgie immense de Jeanine et Alain, Français d'origine algérienne, envers leur enfance en Algérie, pleine de senteurs, de couleurs et de saveurs.

- Ginette de Marine Laclotte et Benoît Allard (école des métiers du Cinéma d'animation) qui met en scène le témoignage de Ginette sur sa vie agricultrice et de femme, avec un trait naïf et une animation faussement artisanale. GINETTE

On sent, à la vue de ces œuvres, que la qualité française (technique, rigueur, écriture) est toujours au rendez-vous, même si les idées et les moyens restent plus modestes.

Et surtout, on vérifie une tendance passionnante du cinéma actuel : utiliser l'animation sous toutes ses formes non plus comme simple vecteur d'imaginaire, ou à destination d'un jeune public, mais comme support de témoignages ou de documentaires qui y gagnent en force d'évocation mais aussi en poésie et en qualité de narration. Après avoir découvert ces œuvres fragiles, on a hâte de voir ce que nous réservent ces jeunes cinéastes dans les années à venir.

Rencontres Henri Langlois 2013 : la Palestine, le Liban et Israël dans un focus commun

Posté par MpM, le 5 décembre 2013

rencontres henri langlois 2013En organisant un focus autour du cinéma de l'est du bassin méditerranéen, les organisateurs des Rencontres Henri Langlois ont pris le risque de voir politique et diplomatie s'inviter dans leur manifestation, puisque ce sont des écoles de Palestine, du Liban et d'Israël qui ont été invitées à présenter leurs travaux à Poitiers.

Hormis une réaction épidermique (et isolée) du Comité poitevin France-Palestine, qui a appelé au boycott des Rencontres, l'initiative a été extrêmement bien accueillie par les principaux intéressés, à savoir les écoles représentées et les réalisateurs invités comme Raed Andoni (Fix me), Hiam Abass (Héritage) ou encore Danielle Arbid (Dans les champs de bataille).

Pour le grand public, c'est surtout une perspective passionnante sur la manière dont l'Histoire et le contexte géopolitique influent directement sur les préoccupations des jeunes cinéastes de la région. Ainsi, comme le souligne Gassam Koteit, directeur adjoint de l’Académie libanaise des Beaux-arts (ALBA) : "les questionnements sont les mêmes des deux côtés".

L'occupation israélienne est ainsi lebanontape1aux centres des films présentés par l'ALBA : familles séparées, enfants ostracisés parce que leur père a coopéré avec l'armée israélienne, étrangers perçus comme de possibles espions israéliens...

Ce qui n'empêche pas un certain recul, voire une bonne dose d'humour. Ainsi, Lebanon: tape 1 qui raconte les étranges relations entre une journaliste française et son équipe technique libanaise. La jeune femme aligne les clichés sur le pays tandis que les deux hommes la traitent d'abord en touriste sexy, puis en ennemie potentielle. Volontairement décalé, le film caricature gentiment à la fois le regard que portent les autres nations sur le Liban, et les mécanismes de méfiance de ses habitants.

space the alleysLe ton est plus sérieux, voire tragique, dans les films des trois écoles palestiniennes Dar al-Kalima College de Bethlehem, Media Development Center de la Birzeit University et Institute of Modern media de l'Université Al Qods.

Il s'agit principalement de documentaires qui donnent la parole à des réfugiés palestiniens, à des familles qui ont été contraintes de détruire leur propre maison, ou encore à des jeunes qui s'opposent à l'occupation israélienne en pratiquant le "parkour", un sport d'acrobaties urbain. Ce dernier film, intitulé Space the alleys, et réalisé par Mohammed Al Fateh, mêle les vues spectaculaires des acrobaties aériennes des personnages à l'utopie d'un mouvement de résistance non violent susceptible d'attirer l'attention sur le sort réservé à ses pratiquants, souvent arrêtés arbitrairement, et parfois même assignés à résidence.

On est également extrêmement touché par le portrait sensible de Naser, jeune homme handicapé qui se démène pour gagner sa vie dignement. Le regard porté sur lui par le réalisateur Ma'moon Al-Herimi semble comme l'éclairer de l'intérieur, donnant à ce simple destin individuel une portée humaine universelle.

Enfin, impossible de ne pas être captivé women of refaiyapar le programme spécial "Water" proposé par le département film et télévision de l’Université de Tel Aviv. Ce projet, dont les neuf films (documentaires et fictions) seront projetés vendredi 6 décembre à Poitiers, regroupe des réalisateurs israéliens et palestiniens autour de la thématique commune de l'eau.

Il s'inscrit dans un ensemble plus vaste qui permet à des réalisateurs des deux pays de travailler sur des projets communs, au-delà de toute considération purement politique. Ce qui constitue au final la meilleure réponse à ceux qui s'accrochent à une vision volontairement manichéenne de la situation israélo-palestinienne.

Rencontres Henri Langlois 2013 : Anne-Dominique Toussaint, productrice proactive

Posté par MpM, le 4 décembre 2013

Anne Dominique ToussaintAnne-Dominique Toussaint, fondatrice des Film des Tournelles, et heureuse productrice de succès populaires comme Le coût de la vie de Philippe Le Guay, Les beaux gosses de Riad Sattouf ou Caramel de Nadine Labaki, a immédiatement répondu présente lorsque les Rencontres Henri Langlois lui ont demandé d'animer leur désormais très courue leçon de cinéma.

"J'ai été très flattée qu'on me choisisse", déclare-t-elle, "car les leçons de cinéma des Rencontres Henri Langlois sont très célèbres. Et surtout je suis toujours très contente qu'on me propose de parler de mon métier car c'est un métier que j'aime beaucoup, que je trouve passionnant, et qui est très méconnu, en tout cas très caricaturé. La production, en gros, c'est faire exister un film. Le rôle d'un producteur, c'est accompagner un artiste dans la réalisation d'une idée, jusqu'à un film qui est projeté à un public sur grand écran."

Presque seule en scène durant deux heures, celle qui a reçu en 2011 le prix "Veuve Cliquot" de la femme d'affaires de l'année, a ainsi donné devant une salle comble un véritable cours magistral sur les réalités de la production et notamment sur ses étapes, qui vont de la rencontre décisive avec un réalisateur et son projet à la collaboration avec le distributeur pour accompagner au mieux le film terminé, en passant par le soutien pendant l'écriture du scénario, le choix du casting, les recherches de financement, et bien sûr le tournage, le montage, la post-production...

Anne-Dominique Toussaint, passionnée Retour à Kotelnitchpar son métier, tranche avec la vision un peu poussiéreuse que l'on pourrait avoir de cette fonction. Ainsi, plutôt que d'attendre l'arrivée miraculeuse du scénario idéal sur son bureau, elle préfère prendre les devants, quitte à être à l'origine même des projets qu'elle produit. "Chaque producteur a sa propre méthode", explique-t-elle en revendiquant sa part de subjectivité. "Mais pour moi, la chose la plus importante, c'est la rencontre avec un réalisateur. Il faut avoir envie de passer deux ans avec quelqu'un."

C'est ainsi qu'elle est allée chercher Emmanuel Carrère avant même qu'il n'ait un projet en tête (ils tourneront ensemble Retour à Kotelnitch en 2003 et La moustache en 2005) mais aussi qu'elle a suggéré à Riad Sattouf d'écrire un scénario sur les adolescents, lui offrant l'opportunité dont il rêvait de passer derrière une caméra. Ce fut Les beaux gosses en 2009, suivi par Jacky au royaume des filles qui sortira le 29 janvier prochain.

Parfois, cela va encore plus loin. Lors de son premier séjour au Liban, où elle accompagnait Respiro d'Emanuele Crialese, Anne-Dominique Toussaint a croisé la route d'une jeune Libanaise qui ne pouvait pas concevoir sa vie sans faire de cinéma. "Elle m'a fait un effet très fort", se souvient-elle. "Touchée, je lui ai demandé ce qu'elle voulait raconter et elle m'a dit : "je veux parler des femmes de mon pays.""

"C'est comme en amour : il y a des hommes, peut-être que ce serait formidable de les avoir rencontrés, mais je ne les ai pas rencontrés, et ce n'est pas très grave non plus"

et maintenant on va oùLa productrice lui propose alors de lui envoyer son projet. "Elle m'avait tellement marquée que quand je suis rentrée, comme au bout de quinze jours, trois semaines, elle ne m'avait toujours rien envoyé, c'est moi qui l'ai relancée ! Je n'ai jamais refait ça de ma vie après, parce que j'en rencontre quand même beaucoup des gens qui veulent faire du cinéma, qui me proposent des choses..." La jeune Libanaise, c'était Nadine Labaki avec qui elle tournera Caramel et Et maintenant on va où. Deux très beaux succès public et critiques.

Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'Anne-Dominique Toussaint a un 6e sens pour découvrir et soutenir des talents en devenir. Peut-être parce que la production n'est pas qu'une question de gros sous, de copinage et de jeux de pouvoir. Bien sûr, il faut un certain réalisme, et l'art de garder la tête froide pour ne s'enthousiasmer que sur des projets susceptibles de rencontrer leur public. Mais il faut surtout une sensibilité artistique presque divinatoire, pour débusquer, dans l'esprit de ses interlocuteurs, les bons films en gestation.

Et tant pis si la perle rare reste à l'état de scénario qu'Anne-Dominique Toussaint n'a pas le temps de lire :  "Je n'ai pas de culpabilité par rapport à ça, je ne peux pas tout lire. C'est très impliquant de lire un scénario. C'est essayer de comprendre le film, de voir le film. Après, quand on a lu, la personne attend un retour... Donc c'est une vraie énergie intellectuelle. Je fais les choses à mon rythme, donc tous les scénarios que je choisis, je suis heureuse de les faire et de les choisir. Il y a des choses, je vais passer à côté, mais forcément ! C'est comme en amour : il y a des hommes, peut-être que ce serait formidable de les avoir rencontrés, mais je ne les ai pas rencontrés, et ce n'est pas très grave non plus. Je me suis auto-conditionnée pour n'avoir aucune culpabilité par rapport à ça, ni regret. J'assume."

Une posture qui, jusque-là, lui a plutôt bien réussi.

Copyright photo d'illustration : Sébastien Laval, Rencontres Henri Langlois, Poitiers.