Robert Hossein (1927-2020) quitte la scène

Posté par vincy, le 31 décembre 2020

Il aura attendu le dernier jour de cette année 2020, et le lendemain de son 93e anniversaire, pour tirer a révérence. Robert Hossein, né Abraham Hosseinoff, est mort.

Acteur, metteur en scène et producteur de spectacles « démesurés », Robert Hossein avait un charme vénéneux, celui des hommes virils à belle gueule, capables d’être inquiétants et séduisants, mystérieux et mélancoliques. Sans doute ses origines salves. Enfant de la balle – un père acrobate et une mère comédienne, ancien élève du cours de René Simon et de Tania Balachova, il débute très jeune sur scène. Tout aussi précoce, il se lance dans la mise en scène au théâtre du Grand Guignol, aux côtés de Frédéric Dard (il fait d’ailleurs un clin d’œil à son ami en faisant une apparition dans San Antonio, film de 2003). Longtemps avant de prendre la direction du Théâtre populaire de Reims où il expérimente l’alliage du spectacle vivant et du cinéma, créant des spectacles grandioses et grandiloquents, qui feront sa fortune à partir des années 1980. Il dirige aussi pendant le début des années 2000 le Théâtre Marigny. Cette passion des planches lui vaut un Molière d’honneur amplement mérité dans les années 1990.

Joffrey

Amoureux du jeu, amant prolifique – de Marina Vlady à Candince Patou en passant par Caroline Eliacheff et Marie-France Pisier -, il était iconoclaste dans son art. Dans le privé, fils d’un père azéri et d’une mère juive, il avait décidé de se faire baptiser après ses 50 ans, embrassant pleinement la religion catholique jusqu’à lui dédier ses derniers spectacles, prosélytes et papistes.

Révélateur de talents (notamment la jeune Isabelle Adjani), Robert Hossein a croisé les plus grands (Gabin et Belmondo, entre autres) durant sa carrière cinématographique, éclectique et chaotique.

Là encore, il ne sait pas choisir entre son métier d’acteur et la réalisation. Il réalise quinze longs métrages entre 1955 et 1982, dont quelques-uns inspirés par Frédéric Dard (Toi, le venin) et une version épique des Misérables, avec Lino Ventura et Michel Bouquet.

L’acteur sera bien plus convaincant. Débutant chez Sacha Guitry, il enchaîne les figurations et petits rôles dès la fin des années 1940. En 1955, il perce avec Du rififi chez les hommes de Jules Dassin, puis, entre deux réalisation, tourne avec Roger Vadim (qui en fait un de ses acteurs récurrents), Yves Allégret, Gérard Oury, Christian Jaque, Claude Autant-Lara et André Hunnebelle (dans un OSS 117). S’il passe à côté de la Nouvelle Vague, il décroche en 1964 un premier rôle dans un film populaire (3 millions d’entrées), celui de Joffrey de Peyrac, dans Angélique marquise des anges, romance de cape et d’épée. Le début d’une saga où Hossein, malgré son tragique trépas à l’issue du premier film, s’impose en star.

Bébel

Si l’acteur n’a jamais été tête d’affiche, il a ce charisme nécessaire pour s’imposer dans des films aux genres variés, passant du cinéma italien à la comédie française, du thriller au mélodrame en costume. Il passe ainsi de Marguerite Duras à un Marco Polo à gros budget, de Jean Aurel à Mauro Bolognini, de Claude Lelouch à Nadine Trintignant, en passant par Roger Hanin. Pour Le Casse d’Henri Verneuil, il s’offre un personnage ambiguë, aux côtés de Jean-Paul Belmondo et Omar Sharif. Il retrouve « Bébel » dans Le professionnel de Georges Lautner, Les Misérables de Claude Lelouch Un homme et son chien de Francis Huster. Il le met en scène à Marigny dans les fantastiques Kean et Cyrano de Bergerac.

Si on le croise ici et là – chez Alexandre Arcady dans Le Grand Pardon, chez Jean Yanne, dans le beau Les enfants du désordre de Yannick Bellon, dans le premier film de Sophie Marceau, La disparue de Deauville, de passage dans le Vénus Beauté institut de Tonie Marshall – on sent bien que le cinéma ne l’intéresse plus à depuis maintenant 40 ans.

Shows messianiques

Il préfère la scène avec les textes de Georges Simenon, Jean-Paul Sartre, John Steinbeck, Jean Anouilh… C’est avant tout en mettant en scène des spectacles pour des salles gigantesques, loin des beaux théâtres feutrés, amenant l’interactivité du public, qu’il se taille une réputation sur son seul nom, avec Hossein en lettres capitales, barrant les affiches de publicité.

Il débute cette aventure de grands shows historico-dramatiques avec Le cuirassé Potemkine, Notre-Dame de Paris et Danton et Robespierre, première collaboration avec Alain Decaux. Il rejoue avec l’historien les grandes étapes de l’Histoire de France, demandant au public de condamner ou d’acquitter Louis XVI, non sans polémique. Il est récupéré par les partis politiques de droite et d’extrême-droite puis par les ultra-catholiques quand il revisite Napoléon, Jésus, la vierge Marie, Charles de Gaulle ou encore Jean-Paul II. Ses spectacles sont des cartons au Palais des Sports ou au Stade de France, à Lourdes ou au Puy du fou. De temps à autres, il revient aux classiques : Jules César, On achève bien les chevaux, Ben-Hur et même Angélique, son exquise marquise. L’auteur de Je crois en l’homme parce que je crois en Dieu (2016, Plon) est bien loin du jeune homme saltimbanque qui fréquentait Dard et mettait en scène des pièces comme L’Affaire Szenec ou Les bas-fonds de Maxime Gorki.

Les Miz

On préfère retenir son sens de l’audace et son talent à épater le grand public avec Les Misérables, comédie musicale d’après Victor Hugo, en 1980. Avec le livret de Claude-Michel Schönberg et Alain Boublil, il réussit avec brio à lancer ce qui deviendra, en anglais, le plus grand succès des musicals de West End à Londres, puis de Broadway. Finalement, il aura eu ce destin à la Valjean, devenant notable et croyant, délaissant ses « crimes » et cherchant les châtiments, choisissant ses créations comme autant de guides vers une forme d’espérance, puisant dans on imagination sans fin. Un « marginal mystique et méfiant » comme il se définissait, « croyant et désespéré », solitaire, à l’image de son livre préféré, Le désert des Tartares, de Dino Buzzati. Le spirituel l’a emporté sur le matériel. « Le passé, c'est un souvenir. Si vous vivez dans le passé, vous êtes foutu. Il faut espérer dans l'avenir, mais je trimballe une éternelle nostalgie de la vie.... ».

César 2021: un président, une présentatrice, des révélations et des courts métrages

Posté par vincy, le 18 décembre 2020

Ce sera le 12 mars, soit un peu plus tard que d'habitude. La 46e cérémonie des César, aka celle de la résurrection, consacreront un cinéma français qui aura souffert en 2020, avec près de cinq mois d'absence pour cause de confinement des salles.

Roshdy Zem, César du meilleur acteur en 2020, présidera la soirée, tandis que Marina Foïs, jamais récompensée malgré cinq nominations, présentera la soirée, coécrite par Blanche Gardin et Laurent Lafitte. Cette cérémonie - en présentiel dans un lieu à déterminer - devra surtout effacer l'historique, soit celle de 2020 piégée par les polémiques et les scandales.

En 2020, les César ont opéré un reboot: conseil d'administration, gouvernance, règles (le César du public disparaît)...

En attendant, deux pré-listes ont été déjà communiquées: les révélations pour les César du meilleur espoir et les courts métrages candidats.

Révélations 2021 - les Comédiennes :

Noée Abita dans Slalom
Najla Ben Abdallah dans Un fils
Aïcha Ben Miled dans Un divan à Tunis
Nisrin Erradi dans Adam
India Hair dans Poissonsexe
Liv Henneguier dans Douze mille
Annabelle Lengronne dans Filles de joie
Pauline Parigot dans Frères d'arme
Julia Piaton dans Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait
Camille Rutherford dans Felicità
Lauréna Thellier dans K contraire
Anamaria Vartolomei dans Just Kids

Révélations 2021 - les Comédiens :

Abdel Bendaher dans Ibrahim
Lucas Enlander dans Les Apparences
Sandor Funtek dans K contraire
Thomas Guy dans Un vrai bonhomme
Guang Huo dans La Nuit venue
Félix Lefebvre dans Été 85
Nils Othenin-Girard dans Un vrai bonhomme
Jules Porier dans Madre
Bastien Ughetto dans Adieu les cons
Benjamin Voisin dans Été 85
Alexandre Wetter dans Miss
Jean-Pascal Zadi dans Tout simplement noir

Courts métrages :

19
Réalisé par Marina ZIOLKOWSKI
MARS COLONY
Réalisé par Noël FUZELLIER
L'AVENTURE ATOMIQUE
Réalisé par Loïc BARCHÉ
MASSACRE
Réalisé par Maïté SONNET
BAB SEBTA
Réalisé par Randa MAROUFI
MATRIOCHKAS
Réalisé par Bérangère MCNEESE
BALTRINGUE
Réalisé par Josza ANJEMBE
MORTENOL
Réalisé par Julien SILLORAY
BLAKÉ
Réalisé par Vincent FONTANO
OLLA
Réalisé par Ariane LABED
COMMENT FAIRE POUR
Réalisé par Jules FOLLET
QU'IMPORTE SI LES BÊTES MEURENT
Réalisé par Sofia ALAOUI
FELIX IN WONDERLAND
Réalisé par Marie LOSIER
SAPPHIRE CRYSTAL
Réalisé par Virgil VERNIER
HOMESICK
Réalisé par Koya KAMURA
SHAKIRA
Réalisé par Noémie MERLANT
L'IMMEUBLE DES BRAVES
Réalisé par Bojina PANAYOTOVA
THE LOYAL MAN
Réalisé par Lawrence VALIN
INVISÍVEL HERÓI
Réalisé par Cristèle ALVES MEIRA
TSUMA MUSUME HAHA
Réalisé par Alain DELLA NEGRA et Kaori KINOSHITA
JE SERAI PARMI LES AMANDIERS
Réalisé par Marie LE FLOC'H
UN ADIEU
Réalisé par Mathilde PROFIT
JUSQU'À L'OS
Réalisé par Sébastien BETBEDER
YANDERE
Réalisé par Wiliam LABOURY

Court métrage d'animation :

BACH-HÔNG
Réalisé par Elsa DUHAMEL
SORORELLE
Réalisé par Frédéric EVEN et Louise MERCADIER
LE GARDIEN, SA FEMME ET LE CERF
Réalisé par Michaela MIHÁLYI et David ŠTUMPF SWATTED
Réalisé par Ismaël JOFFROY CHANDOUTIS
GENIUS LOCI
Réalisé par Adrien MÉRIGEAU
SYMBIOSIS
Réalisé par Nadja ANDRASEV
L'HEURE DE L'OURS
Réalisé par Agnès PATRON
TÊTARD
Réalisé par Jean-Claude ROZEC
MOUTONS, LOUP ET TASSE DE THÉ...
Réalisé par Marion LACOURT
LA TÊTE DANS LES ORTIES
Réalisé par Paul CABON
L'ODYSSÉE DE CHOUM
Réalisé par Julien BISARO
TRACES
Réalisé par Hugo FRASSETTO et Sophie TAVERT MACIAN

35 films nommés aux 26e prix Lumières

Posté par vincy, le 14 décembre 2020

Malgré le confinement et l'absence de nombreux films attendus en 2020, la 26e édition des Lumières de la presse internationale a révélé la liste de ses nominations. La cérémonie sera diffusée en clair et en exclusivité sur CANAL+ et myCANAL le mardi 19 janvier prochain à 20h00.

Deux, Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait, Slalom, Adieu les cons et Été 85 arrivent en tête des préférences, devant le film d’animation Josep, La fille au bracelet et Un fils.

"En cette année atypique, 77 films dont la sortie en salles prévue en 2020, concouraient pour les nominations aux Lumières de la presse internationale et 35 films (dont le chiffre exceptionnel de sept coproductions internationales) seront soumis au vote final des académiciens représentant 36 pays" explique le communiqué.

FILM
Adieu les cons d'Albert Dupontel
Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait d'Emmanuel Mouret
Deux de Filippo Meneghetti
Eté 85 de François Ozon
La fille au bracelet de Stéphane Demoustier

MISE EN SCÈNE
Albert Dupontel pour Adieu les cons
Maïwenn pour ADN
Filippo Meneghetti pour Deux
Emmanuel Mouret pour Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait
François Ozon pour Été 85

SCÉNARIO
Stéphane Demoustier pour La fille au bracelet
Filippo Meneghetti et Malysone Bovarasmy pour Deux
Jean-Louis Milesi pour Josep
Emmanuel Mouret pour Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait
Caroline Vignal pour Antoinette dans les Cévennes

DOCUMENTAIRE
Adolescentes de Sébastien Lifshitz
La cravate d'Etienne Chaillou et Mathias Théry
Kongo d’Hadrien La Vapeur et Corto Vaclav
Un pays qui se tient sagede David Dufresne
Si c'était de l'amour de Patric Chiha

ANIMATION
Calamity, Une enfance de Martha Jane Cannary de Rémi Chayé
L'extraordinaire voyage de Marona d'Anca Damian
Josep d'Aurel
Petit Vampire de Joann Sfar

ACTRICE
Laure Calamy dans Antoinette dans les Cévennes
Martine Chevallier et Barbara Sukowa dans Deux
Emmanuelle Devos dans Les parfums
Virginie Efira dans Adieu les cons
Camelia Jordana dans Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait

ACTEUR
Sami Boujila dans Un fils
Jonathan Cohen dans Énorme
Albert Dupontel dans Adieu les cons
Nicolas Maury dans Garçon chiffon
Jérémie Rénier dans Slalom

RÉVÉLATION FÉMININE
Noée Abita dans Slalom
Najla Ben Abadalahdans Un fils
Nisrin Erradi dans Adam
Mélissa Guers dans La fille au bracelet
Fathia Youssouf dans Mignonnes

RÉVÉLATION MASCULINE
Guang Huo dans La nuit venue
FélixLefebvre et Benjamin Voisin dans Été 85
Djibril Vancoppenolle dans Petit pays
Alexandre Wetter dans Miss
Jean-Pascal Zadi dans Tout simplement noir

PREMIER FILM
Deux de Filippo Meneghetti
Un divan à Tunis de Manele Labidi
Mignonnes de Maïmouna Doucouré
Slalom de Charlène Favier
Tout simplement noir de Jean-Pascal Zadi et John Wax

COPRODUCTION INTERNATIONALE
Abou leila d’Amin Sidi-Boumédiène
Adam de Maryam Touzani
Un fils de Mehdi M. Barsaoui
L’homme qui a vendu sa peau de Kaouther Ben Hania
La Llorana de Jayro Bustamante
Tu mourras à vingt ans d'Amjad Abu Alala
Yalada, la nuit du pardon de Massoud Bakhshi

IMAGE
Hichame Alaouie pour Été 85
Renato Berta pour Le sel des larmes
Laurent Desmet pour Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait
Yann Maritaud pour Slalom
Aurélien Marra pour Deux

MUSIQUE
Bertrand Burgalat pour Les apparences
Florencia di Concilio pour Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary
Silvia Pérez Cruz pour Josep
Pablo Pico pour L'extraordinaire voyage de Marona
Rone pour La nuit venue

Drunk ennivre les European Film Awards 2020

Posté par vincy, le 13 décembre 2020

Logiquement, le film danois Drunk (Another Round) de Thomas Vinterberg emporte la plupart des trophées principaux aux European Film Awards. C'est la troisième fois que le cinéma danois est récompensé en tant que meilleur film, après deux réalisations de Lars Von Trier il y a vingt ans. Vinterberg, comme Mads Mikkelsen, sont pour la première fois honorés en tant que réalisateur et acteur.

Signalons aussi le prix de la meilleure actrice pour Paula Beer dans Ondine et le prix de la meilleure comédie pour le film français Un triomphe.

Meilleur film européen
Drunk de Thomas Vinterberg (le film est exploité en France depuis le 14 octobre par Haut et Court). Ce film est aussi le candidat du Danemark à l'Oscar du meilleur film étranger.

Meilleure réalisation
Thomas Vinterberg pour Drunk

Meilleure interprétation masculine
Mads Mikkelsen pour Drunk

Meilleure interprétation masculine
Paula Beer pour Ondine de Christian Petzold (le film est sorti en France sous la bannière des Films du Losange le 23 septembre). 

Découverte de l'année - prix FIPRESCI
Carlo Sironi pour Sole

Meilleur scénario
Thomas Vinterberg et Tobias Lindholm pour Drunk

Meilleure comédie
Un triomphe d'Emmanuel Courcol

Meilleur film d'animation
Josep d'Aurel

Meilleur documentaire
L'affaire collective de Alexander Nanau

Prix Eurimages à la coproduction
Luis Urbano

Meilleur court métrage
La nuit tous les chats sont gris de Lasse Linder

Meilleure photo
Matteo Cocco pour Je voulais me cacher

Meilleur montage
Maria Fantastica Valmori pour Once More unto the Breach

Meilleurs décors
Cristina Casali pour The personal History of David Copperfield

Meilleurs costumes
Ursula Patzak pour Je voulais me cacher

Meilleurs maquillages et coiffures
Yolanda Piña, Félix Terrero & Nacho Diaz pour Une vie secrète

Meilleure musique
Dascha Dauenhauer pour Berlin Aklexanderplatz

Meilleur son
Yolande Decarsin pour Petite fille

Meilleurs effets visuels
Iñaki Madariaga pour La Plateforme

Le coming-out trans d’Elliot Page ravive les questions sur la représentation des LGBT+

Posté par wyzman, le 6 décembre 2020

Outre le retour dans les charts du tube de Mariah Carey « All I Want for Christmas », ce 1er décembre aura été marqué par le coming-out de l’acteur : il est trans, non-binaire (il ne se définit ni comme un homme ni comme une femme), s’appelle Elliot et ses pronoms sont « il » et « iel ».

Un coming-out révélateur

Sur ses différents comptes sur les réseaux sociaux, le Canadien de 33 ans écrit ainsi : « Salut les amis, je veux partager avec vous que je suis trans, mes pronoms sont il/iel et mon nom est Elliot. Je me sens chanceux d'écrire cela. D'être ici. D'être arrivé à cet endroit dans ma vie. Je ressens une immense gratitude pour les personnes incroyables qui m'ont soutenu tout au long de ce voyage. Je ne peux pas commencer à exprimer à quel point il est remarquable d'aimer enfin qui je suis assez pour poursuivre mon authentique moi. J'ai été sans cesse inspiré par tant de personnes de la communauté trans. Je vous remercie pour votre courage, votre générosité et votre travail incessant pour faire de ce monde un endroit plus inclusif et plus compatissant. Je vous apporterai tout le soutien possible et continuerai à lutter pour une société plus aimante et plus égalitaire. »

Et si cette annonce a fait l’effet d’une bombe, c’est sans doute parce que personne ne s’y attendait. L’acteur révélé par Hard Candy de David Slade (2005) et Juno de Jason Reitman (2007) est depuis cette année-là un talent à suivre de près. Jusqu’en 2014, il a alterné blockbusters et films indépendants (presque) oscarisables : la saga X-Men, Bliss de Drew Barrymore, Inception de Christopher Nolan, To Rome with Love de Woody Allen, etc. Mais c’est suite à un premier coming-out survenu en 2014 que le comédien est devenu l’icône de toute une génération fière de sa sexualité et de son identité et disposant d’une meilleure représentation que ses aînées. Du moins c’est ce que l’on croit sur le papier.

Après des projets indépendants au succès relatif (Freeheld, Into the Forest, Tallulah, My Days of Mercy, The Cured, Flatliners), Elliot Page trouve stabilité et sérénité du côté du petit écran. Grâce à Netflix, il rayonne dans Umbrella Academy et Les Chroniques de San Francisco. Particulièrement sensible aux questions sur le genre, le géant du streaming n’a d’ailleurs pas manqué d’impressionner les internautes par la rapidité avec laquelle le deadname* d’Elliot Page a disparu des différents projets auxquels il a participés et qui sont toujours disponibles sur la plateforme. Preuve s’il en fallait une qu’un coming-out trans est bien moins complexe à appréhender que ce que l’on nous fait parfois croire.

*Le deadname d’une personne trans est le prénom qui lui a été donné à la naissance et qui est indiqué sur son état civil mais qui ne correspond pas à son genre

Un traitement médiatique à plusieurs vitesses

Mais parce que comme nous vous le disions plus haut, personne ne s’attendait à ce coming-out trans, le traitement médiatique de celui-ci en dit long sur la situation des personnes trans dans le monde et l’incompréhension qu’ils peuvent subir. Dans un fil Twitter, le compte Le coin des LGBT+ revient ainsi sur la manière dont différents médias (Le Monde, Le Figaro, 20 Minutes, BFMTV ou encore Valeurs actuelles) ont traité l’information.

Et si globalement, un effort a été fourni par presque tous pour utiliser les bons pronoms, force est de constater que nombreux sont ceux à vouloir faire appel au deadname du comédien — élément pourtant rejeté par les personnes trans qui peuvent y voir la volonté de ne pas accepter leur nouvelle et véritable identité — sous couvert de vouloir mieux faire comprendre le coming-out de l’acteur à ceux qui sont moins au fait de ces questions.

Pour ne pas entrer dans les détails de ce que ce coming-out signifie, nombreux sont ceux à mettre l'accent sur les messages qu'Elliot Page a reçus dans la foulée. L'occasion de refaire de Hollywood un espace hautement fantasmé d'ouverture et de mentionner le soutien apporté par Miley Cyrus, Rubi Rose (Batwoman), Kate Mara (House of Cards), Anna Paquin (True Blood), Julianne Moore, Indya Moore (Pose), Lena Dunham (Girls) ou encore James Gunn (Les Gardiens de la Galaxie).

Vers une meilleure représentation ?

Comme on pouvait s’en douter, il n’a pas fallu longtemps pour que la question de la représentation soit abordée. En effet, dans le hit de Netflix Umbrella Academy, Elliot Page incarne une femme cisgenre attirée par les femmes. Et à l’heure où il est de plus en plus fréquemment demandé à des acteurs cisgenres et hétérosexuels de ne pas jouer des personnages LGBT+ pour laisser leur chance à des comédiens justement LGBT+, la situation pourrait sembler ironique. Mais si l'on en croit les informations de Gay Times Magazine, le personnage de Vanya ne devrait aucunement changé ou son interprète recaster.

Et si la situation semble si cocasse, c'est que Hollywood a depuis trop longtemps pris l’habitude de ne pas faire confiance à des comédiens ouvertement queer. On pense notamment à Cate Blanchet dans Carol, Timothée Chalamet et Armie Hammer dans Call Me By Your Name, Jared Leto dans Dallas Buyers Club, Felicity Huffman dans Transamerica ou encore Jeffrey Tambor dans Transparent. Et sans surprise, le cas de Nick Robinson jouant un jeune lycéen gay dans Love, Simon est à mettre à part tant le film de Greg Berlanti a évité les critiques de par son caractère historique, comme le note USA Today. Il s’agit en effet de la première comédie d’un grand studio centrée sur une romance gay.

Alors que Variety rappelle justement que les comédiens, producteurs et scénaristes trans et bankables à Hollywood peuvent se compter sur les doigts (Laverne Cox, Trace Lysette, Brian Michael Smith, les soeurs Wachowski, Joey Soloway et Janet Mock), la machine à rêves américaine veut actuellement se convaincre que les histoires racontées demain seront meilleures que celles produites aujourd’hui. Car il faut bien admettre que la situation est loin d’être idyllique. Le rapport 2020 de la GLAAD (Gay & Lesbian Alliance Against Defamation) sur la représentation des LGBTQ au cinéma révèle que sur les 118 films de grands studios produits en 2019, 22 seulement disposaient de personnages queers — mais aucun de personnage trans ! Ce qui était déjà le cas en 2018 et en 2017...