Et si on regardait… L’homme de Rio

Posté par vincy, le 10 avril 2020

Vendredi à 14h, France 2 diffuse l'inusable comédie d'aventure L'Homme de Rio. (Et sur La Cinetek pour ceux qui sont abonnés)

C'est sans doute le must du genre dans le cinéma français, qui a d'ailleurs les honneurs de Cannes Classics en 2013. Une semaine après Le Sauvage, dont la filiation est évidente. Ecrit par Philippe de Broca, Daniel Boulanger, Ariane Mnouchkine et Jean-Paul Rappeneau (rien que ça), le film réunit Jean-Paul Belmondo, qui vient de fêter ses 87 ans, et la regrettée (mais sublime éternellement) Françoise Dorléac. Le scénario, fortement influencé par les aventures de Tintin, a été nommé aux Oscars (c'est dire la qualité).

A ces deux stars, s'ajoute un générique salivant: Jean Servais, Simone Renant, Adolfo Celi, Roger Dumas, Daniel Ceccaldi, et le jeune Ubiracy De Oliveira alias sir Winston, le petit cireur de chaussures.

Aventure exotique jusque dans la forêt amazonienne, en passant par Rio et Brasilia (en construction), romantisme (à l'américaine: c'est la femme qui mène l'homme à la baguette), dérision. Le mix est réussi et a inspiré Lawrence Kasdan pour Les aventuriers de l’Arche perdue, Luc Besson, Hayao Miyazaki et Michel Hazanavicius, entre autres.

Il faut dire que c'est une leçon dans le genre: du rythme, du charme, des personnages secondaires mémorables, des répliques cultes, de l'action et ce qu'il faut de méchants, dragons à terrasser et statuettes à déterrer.

Outre le scénario exquis, les dialogues ciselés, un second degré délicat, c’est bien entendu le duo de charme Belmondo-Dorléac qui fait mouche. En amoureux transi, prêt à bondir sur des planches à des dizaines de mètres au dessus du sol (il réalise pour la première fois ses propres cascades) ou tout simplement à se soumettre à tous les caprices de sa dulcinée (y compris en choisissant une voiture rose avec des étoiles vertes), Bébel est à la fois héroïque et vulnérable, viril et sensible. Il symbolise de manière avant-gardiste l’homme moderne, ni macho, ni métrosexuel. Quant à sa partenaire, elle est au sommet de sa beauté, parvient à passer de la mélancolie à l’acuité, de ses rêvasseries délirantes à un rire presque espiègle. Elle incarne la féminité à la perfection, libre et malicieuse. Difficile de ne pas succomber à ce duo de stars.

De Broca nous emmène sans accros de vastes paysages à une grotte dans la jungle, comme on s'enfonce dans un entonnoir, un piège qui servira de tombeau (ça change des pyramides). Cette spirale vers la mort permettra à aussi à Orphée de sauver son Eurydice des enfers d'un homme jaloux, possessif, cupide et dominateur (coucou #metoo).

Ces 12 travaux d’Adrien, lancé par la princesse aux yeux mécaniques et au sourire irrésistible, sont une parenthèse enchantée jamais égalée, à l'exception des films de Rappeneau sans doute. Une sacrée aventure aussi burlesque qu'héroïque, qui file à vive allure. Une grande vadrouille par delà les océans qui a su traverser le temps.