Cannes 2019: la parité avance progressivement dans les festivals selon Delphyne Besse (collectif 50/50)

Posté par wyzman, le 20 mai 2019

Dimanche 19 mai, au 72e Festival de Cannes, a eu lieu la première édition de “Women on the Move” organisée par la Commission européenne.

Le collectif 50/50 y a présenté leur première évaluation de la charte en faveur de la parité et de l'inclusion dans les festivals de films ainsi que les prochaines étapes.

Le Festival de Cannes a été le premier festival à signer cette charte il y a un an en présence de la Commissaire Gabriel, chargée de l’économie et de la société numériques. Depuis 46 autres festivals l’ont signée, dont Rome, Venise, Annecy, Angers, Séries Mania, Les Arcs, Berlin, Londres, Namur, San Sebastian et Locarno.

À l’occasion de cette première édition, la Commission a aussi publié un guide sur les meilleures pratiques de l'industrie audiovisuelle visant à renforcer la parité – initiatives dont la charte fait partie.

Enfin, aux côtés du collectif 50/50, la Commission a annoncé le lancement de l'étude européenne sur les femmes critiques de cinéma, dont les résultats devraient être dévoilés l'année prochaine.

Delphyne Besse, cofondatrice de Collective 50/50, a excepté de réponde à nos questions.

Ecran Noir: Quelles mesures sont-elles envisageables pour augmenter le nombre de femmes aux postes-clés de festivals ?

Delphyne Besse: La Charte pour l’Egalité que nous avons fait signer à Cannes l’an dernier (aujourd’hui paraphée par une cinquantaine de manifestations) prévoit que les festivals s’engagent à atteindre la parité au sein de leurs comités de direction. Sans mettre d’échéance précise car nous voulons inciter et non contraindre, mais cela permet une prise de conscience progressive. Depuis l’an dernier le festival de Locarno a nommé une directrice artistique, Berlin a opté pour une co-direction, tout comme Toronto avec l’arrivée de Joana Vicente. Les choses avancent progressivement.

EN: Quels sont les ambitions ou les objectifs de 50/50 dans les mois où les années à venir ?

DB : Nous voulons continuer à agir comme nous l’avons fait jusqu’à maintenant, en posant des constats chiffrés à partir desquels nous tirons des analyses et proposons des mesures concrètes à mettre en place à court ou moyen terme. Nos chantiers prioritaires, outre l’étude critiques que nous avons lancée en partenariat avec MEDIA, sont de travailler sur la filière distribution et exploitation, et élargir notre combat pour la parité à l’inclusion au sens plus large, notamment à travers une réflexion sur les possibilités d’adaptation en France du modèle américain de l’inclusion rider.

EN: Comment expliquer et enrayer les disparités entre femmes et hommes critiques de cinéma ?

DB: Il faut inciter les rédactions des grands médias à faire de la place à de nouvelles voix, à s’interroger sur l’égalité au sein de leurs rédactions et à assigner les critiques de manière plus équitable.Les syndicats de critiques pourraient aussi s’intéresser au parcours qui mène à la profession, de façon à comprendre ce qui limite l’accès des femmes, peut être mener des actions de sensibilisation dans les filières journalistes et les écoles de cinéma. Et les festivals peuvent aussi jouer un rôle en facilitant l’accès à des journalistes sous-représentés. Les festivals de Sundance et Toronto ont déjà mis en place des initiatives similaires, en accréditant un ratio plus important de critiques issus de la diversité. Et comme l’a très justement souligné Brie Larson c’est une responsabilité qui incombe aussi aux attachés de presse, qui peuvent jouer un rôle proactif et s’engager.

EN: Y a-t-il une quelconque forme de progrès avec la sélection de cette année ?

DB: Nous nous réjouissons que la compétition comporte 4 films réalisés par des femmes (un record qui n’est pas inédit cependant) et aussi de la sélection du film de Ladj Ly qui œuvre depuis longtemps pour plus de diversité dans notre cinéma. Il y a encore beaucoup de chemin à faire mais la tendance est là et nous comptons bien continuer à agir pour accélérer la marche vers l'égalité partout où c’est possible.

EN: Une Palme d’or remise à une femme, est-ce un signe de progrès ?

DB: Pourquoi seulement une ? Il est grand temps que les réalisatrices entrent durablement dans l’histoire !

Cannes 2019 : La star du jour… Jean-Pierre et Luc Dardenne

Posté par wyzman, le 20 mai 2019

A respectivement 68 ans et 65 ans, Jean-Pierre et Luc Dardenne font aujourd’hui partie intégrante du palmarès du Festival de Cannes. Ils y font leur entrée en 1987 avec leur premier long-métrage, Falsch, dans la section aujourd’hui disparue Perspectives du cinéma français.

En 1996, La Promesse est retenu à la Quinzaine des Réalisateurs. Avec onze longs métrages au compteur, les deux frères peuvent se targuer d’avoir été sélectionné pas moins de huit fois ! Avec Rosetta (1999) et L’Enfant (2005), ils ont su rafler deux Palmes d’or tandis que Le Fils (2002) vaut un Prix d’interprétation masculine amplement mérité à Olivier Gourmet. Mais ce n’est pas tout. Si Le Silence de Lorna (2008) leur vaut un Prix du scénario, Le Gamin au vélo (2011) leur permet de remporter un Grand prix tandis qu’une mention spéciale du jury œcuménique leur est accordée en 2014 pour Deux jours, une nuit.

Cette année, ils présentent Le Jeune Ahmed, un drame centré sur la radicalisation du personnage principal, un ado coincé entre deux mondes.

Cannes 2019: Nos retrouvailles avec Fernanda Montenegro

Posté par vincy, le 20 mai 2019

C’est une grande dame du cinéma brésilien (et pour le coup du cinéma mondial) qui revient par la grande porte du 7e art. La vie invisible de Euridice Gusmao de Karim Aïnouz, adaptation du roman de Martha Batalha, est sélectionné à Un certain regard, et met en vedette Fernanda Montenegro. Il y a 20 ans, l’actrice était nommée aux Oscars (la seule comédienne lusophone a avoir été nommée), un an après avoir reçu l’Ours d’argent de la meilleure actrice à Berlin pour Central do Brasil de Walter Salles, qui remporte également l'Ours d'or du meilleur film. En France, le film a attiré près de 600000 spectateurs dans les salles, le plus gros succès du cinéma brésilien dans le pays, toujours aujourd’hui.

Fille de la classe ouvrière, Arlete Pinheiro Esteves da Silva, son nom de naissance, approche des 90 ans. Elle est considérée comme la plus grande comédienne de son pays. Honorée d’à peu près toutes les breloques officielles que le Brésil compte, en plus de prix internationaux (y compris un Emmy Award), elle a traversé les décennies depuis ses début dans les années 1950, quand elle a été la première actrice à signer un contrat avec la chaîne Tupi. Vedette de « telenovelas », parmi les plus populaires (parmi lesquelles Danse avec moi, qui a fait les belles heures de TF1 dans les années 1980), Fernanda Montenegro reste l’une des personnalité les plus influentes du pays. C’est notamment elle qui a lu un poème lors de la cérémonie d’ouverture des J.O. de Rio, doublée en anglais pas une autre Lady, Judi Dench.

Grande comédienne de théâtre, cette littéraire n’a jamais cessé de jouer, de la comédie à la tragédie. Au cinéma, elle a débuté en 1965 avec A Falecida, de Leon Hirszman, où elle interprète une jeune femme obsédée par la mort, jusqu’à prévoir le moindre détail de ses funérailles. Occupée par le petit écran et les planches, elle ne tourne pas tant que ça. On la remarque chez Arnaldo Jabor dans Tudo bem, comédie catastrophe de 1978. A noter que Fernanda Torres, sa fille, a remporté le prix d’interprétation au Festival de Cannes pour le film Parle-moi d’amour du même Arnaldo Jabor. En 1985, elle figure au générique en second-rôle dans A Hora da Estrela, de Suzana Amaral, trois fois primé à Berlin et sacré à La Havane.

Il faut réellement attendre les années 1990 pour que Fernanda Montenegro prenne le cinéma au sérieux. Elle apparaît dans un court métrage de Carlos Diegues, Veja Esta Cançao, fait face à Alan Arkin dans Quatre jours en septembre, de Bruno Barreto. Le film est nommé aux Oscars et en compétition à Berlin. Puis vint Walter Salles avec Central do Brasil, où elle joue une vieille femme pieuse et revêche qui se prend d’affection pour un gamin qui cherche son père. Une performance unanimement saluée qui lui vaut une myriade de prix.

En 2004, elle frappe de nouveau avec L’autre côté de la rue de Marcos Berstein. Le film va à Berlin et San Sebastian. L’actrice est récompensée à Tribeca (New York). En 2005, dans La maison de sable de son gendre Andrucha Waddington, elle interprète trois rôles. Le film est récompensé à Sundance.

Figure engagée pour la défense de la culture, dans un pays qui est en train de couper dans toutes les aides, elle semble faire un retour. Outre La vie invisible, où elle a un rôle symbolique et qui sortira en décembre en France, elle a aussi tourné pour Claudio Assis (Piedade) et pour son beau-fils (O Juizo).

Cannes 2019: Qui est Midi Z ?

Posté par kristofy, le 20 mai 2019

Taïwan représente un vivier de jeunes cinéastes à suivre, même s'ils sont encore méconnus: le réalisateur Midi Z pourrait être l’un d’eux mais, à 37 ans, il est déjà un cinéaste reconnu. Son 3ème film en 2014 Ice Poison attire plus particulièrement l’attention à l'international, représentant Taïwan pour l’Oscar du meilleur film en langue étrangère. Son film suivant en 2016 The Road to Mandalay est alors sélectionné au Festival de Venise, et son dernier Nina Wu est donc présenté à Un Certain Regard cette année à Cannes. Une ascension dont seuls Hou Hsiao-hsien et Tsai Ming-lang peuvent se prévaloir d'une telle aura internationale, si on excepte le "mo,dialisé" Ang Lee.

Les trois premiers films de Midi Z Return to Burma (en 2011), Ooor Folk (en 2012) et donc Ice Poison évoquent de manière particulièrement sensible des déracinements pour former une « trilogie de l’Origine » : des personnages reviennent là où ils ont grandis, d’autres souhaitent émigrer ailleurs, des difficultés financières incite à l’illégalité… Cette double culture, qui l'habite lui-même, est l'un des thèmes majeurs de ses films.

Au début, il espérait devenir photographe de mariage en Birmanie, une activité lucrative. Le dilemme de rester à Taïwan ou de retourner en Birmanie le déprime et sera pourtant le moteur de ses premiers films. Il se lance finalement dans le cinéma à Taïwan, admirateur de ses compatriotes comme d'Ingmar Bergman, et s'inscrit à l’Académie du film du Festival du Cheval d’or d'Hou Hsiao-hsien qui forme de jeunes réalisateurs, scénaristes et photographes. Il tourne alors son premier court métrage L’Incident de Hua-Xing. Hou Hsiao-Hsien le forme dans la direction d'acteurs amateurs pour réaliser des films authentiques et réalistes, tandis que Ang Lee lui apprend à faire face à ses propres sentiments à travers la mise en scène.

En parallèle à ses films de fiction Midi Z réalise aussi plusieurs documentaires. D’un format à un autre il raconte moins des histoires que des témoignages: partir travailler loin de sa famille, devenir un clandestin, le trafic de drogue... L’humain est sa matière première pour ses recherches qu'il restitue avec sa caméra. Les émotions humaines en sont l'énergie narrative. Adieu Mandalay est une approche documentée de la précarité sociale, de la nécessité de migrer et de l'aspiration à une vie meilleure de deux travailleurs birmans œuvrant dans l'illégalité. Le film est primé à Venise, le cinéaste sacré aux Asian Pacific Awards.

Son nouveau film Nina Wu va faire parler de lui beaucoup pour ses qualités mais aussi pour son écho avec une récente actualité : le sujet est en rapport avec le scandale Weinstein et le mouvement #MeToo. Le scénario a été écrit par Midi Z en collaboration avec son égérie Wu Ke-Xi.