Poitiers Film Festival 2016 : retour sur le palmarès

Posté par MpM, le 8 décembre 2016, dans Courts métrages, Festivals.

anna

Pour sa 39e édition, le Poitiers Film Festival proposait un programme riche et varié mêlant avant-premières, focus sur le cinéma danois, rencontre avec la comédienne Lola Créton, leçon de cinéma de la réalisatrice d’animation Florence Miailhe ou encore masterclass "musique et cinéma" avec Dominique Cabrera et Béatrice Thiriet. Mais c’est bien entendu la compétition internationale de courts métrages réalisés par des étudiants en cinéma qui constituait une fois encore le cœur de la manifestation.

Cette année, la sélection se composait de 49 films (sur 1452 inscrits), issus de 36 écoles et représentant 24 pays. Au risque de se répéter, ce qui frappe d’emblée à Poitiers, c’est la qualité générale des œuvres proposées. Fictions ou documentaires, live ou animées, gros budgets ou productions fauchées, toutes avaient leur place dans une compétition de fait assez homogène et plutôt réjouissante qui proposait à la fois sujets forts, matière à discussion et beaux moments de cinéma. De quoi composer un palmarès équilibré qui fait à la fois la part belle à la narration et aux propositions formelles.

Le jury international (composé de Natalia Chernysheva, Claire Diao, Olivier Gorce, Julien Lilti et Marie Madinier) a ainsi assez logiquement accordé son grand prix à Anna de Or Sinai, qui avait déjà reçu le Grand Prix de la Cinéfondation lors du dernier festival de Cannes. Le film dresse le portrait touchant d’Anna, une femme d’une quarantaine d’années qui se met en quête, le temps d’une soirée, d’un homme qui pourrait partager sa solitude. Jamais mièvre ni cruelle, la jeune réalisatrice filme son héroïne avec une bienveillance lumineuse qui lui redonne peu à peu confiance. En une nuit, sans éclats ni rebondissements spectaculaires, Anna passe d’une mélancolie amère à une forme d’autodérision et d’humour qui tirent le récit vers une légèreté joyeuse et presque décalée.

Prix spécial du jury, Valentina de Maximilian Feldmann reçoit également le prix Amnesty International et le prix du public. Une unanimité qui s’explique plus par son sujet que par ses réelles qualités cinématographiques. Il s’agit en effet d’un documentaire en noir et blanc sur le quotidien d’une famille tzigane de Macédoine, raconté à sa manière par une petite fille de dix ans. A la fois ultra-stylisé et souvent maladroit, le film tient le spectateur à distance par un esthétisme inutile et des choix de mise en scène dénués de subtilité (gros plans fixes sur les visages des différents membres de la famille, plan en plongée sur la famille au milieu des ruines qui lui servent de logement…) qui cherchent plus à déclencher l’émotion qu’à faire le récit précis du destin des personnages.

Millimeterle de Pascal Reinmann repart lui aussi avec deux récompenses : prix de mise en scène et prix Découverte de la critique française. Huis clos anxiogène dans une piscine publique, le film est une observation clinique et sans concession de l’explosion brutale d’un groupe d’adolescents confrontés à des pulsions de domination et de violence. Allant jusqu’au bout de sa démarche, il ne se soucie jamais de faire un film aimable ou polissé, offrant à son récit un crescendo et un finale à la limite du supportable.

Le prix du scénario va à Out of reach de Efrat Rasner, une réflexion faussement légère sur le destin des images. Dans un laboratoire photos qui convertit les vieilles VHS en fichiers numériques, les vidéos familiales tournent en boucle sur les écrans, fantômes d’un passé qui n’est déjà plu. La très belle idée du film est d’interroger le devenir de ces images qui racontent parfois toute une vie, ou sont le dernier lien entre les vivants et les morts. Un hommage implicite à la force d’évocation du cinéma qui rend immortel ceux qui le font.

Dans un style radicalement différent, le jury étudiant a opté pour le film mexicain violent et provocateur de la sélection, le très singulier Fuerza bruta de Laura Baumeister qui aborde la question de la transformation et des pulsions animales présentes en chacun de nous. Assez maniéré et souvent confus, il a malheureusement du mal à aller au bout de son propos et de son ambition (probablement trop haute par rapport à ses moyens).

Enfin, Tutte le cose sono piene di lei de Maria Tilli repart avec la mention spéciale du jury de la critique. Une œuvre lumineuse qui prend le temps de filmer avec beaucoup d’empathie les visages et les corps de ses personnages, mettant au jour l’infinie tendresse ainsi que la transmission à l’œuvre entre les générations. Un film délicat, d’une grande simplicité narrative.

Le palmarès de la compétition internationale

Grand prix du jury
Anna de Or Sinai(Israël)

Prix spécial du jury
Valentina de Maximilian Feldmann (Allemagne)

Prix de la mise en scène
Millimeterle de Pascal Reinmann (Suisse)

Prix du scénario
Out of reach de Efrat Rasner (Israël)

Prix du jury étudiant
Fuerza bruta de Laura Baumeister (Mexique)

Prix du public
Valentina de Maximilian Feldmann (Allemagne)

Prix Découverte de la critique française
Millimeterle de Pascal Reinmann (Suisse)

Mention du jury critique
Tutte le cose sono piene di lei de Maria Tilli (Italie)

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