Le rapport Mary préconise une nouvelle classification des films

Posté par vincy, le 29 février 2016

loveAudrey Azoulay a hérité d'une patate chaude quand elle a succédé à Fleur Pellerin au ministre de la Culture et de la Communication. Ce lundi 29 février, elle a reçu le rapport commandé par Pellerin, et signé Jean-François Mary, Président de la Commission de classification des œuvres cinématographiques.

Ce rapport sur les conditions d'interdiction des œuvres de cinéma aux moins de 18 ans, dans le cadre de la procédure de délivrance des visas accordés aux œuvres cinématographiques, fait suite a plusieurs décisions judiciaires qui annulaient les visas émis pour des oeuvres violentes ou des oeuvres qui montraient des scènes de sexe explicite. L'Association Promouvoir a gagné presque toutes ses batailles, malgré deux récentes déconvenues pour Bang Gang et Les Huit salopards.

"Cette réflexion a porté sur l'automaticité de cette interdiction et sur la durée des procédures applicables" explique le ministère qui a "décidé d’engager une réforme des textes en vigueur afin d’assurer la meilleure protection possible du jeune public.

Deux axes sont retenus:

- adapter les critères qui encadrent actuellement l’interdiction aux mineurs de -18 ans pour conforter le rôle et élargir le pouvoir d’appréciation de la Commission de classification, qui représente l’ensemble des composantes de la société.

- engager une réflexion visant à simplifier les voies de recours pour réduire les délais de la procédure devant la justice administrative pour assurer la détermination de la classification d’un film.

Préalables

Le rapport de Jean-François Mary a prix en compte que "la classe d'âge entre seize et dix huit ans correspond à une étape importante du développement de l'individu sur le plan de l’autonomie personnelle et psychologique, et la classification appliquée doit respecter un équilibre entre la maturité et la fragilité des individus à cet âge de la vie."

Il considère que "les mesures de classification les plus restrictives déterminent toute l’échelle des mesures de classification en aval" et que "le choix d’une classification à seize ans ou à dix-huit ans par le ministre chargé de la culture a des effets sur la projection du film en salles bien au-delà du public des mineurs." En effet, "nombre de distributeurs et d’exploitants renoncent purement et simplement à projeter le film dans leurs salles", ce qui "tue" le film commercialement. Enfin "le choix de la classification à seize ans ou à dix-huit ans étend ses effets sur la diffusion des films à la télévision et sur la sortie des films en DVD et sur les autres supports numériques ou analogiques", ce qui a un impact considérable aussi bien sur le financement que sur l'audience du film.

Le cinéma, un "objet" pas comme les autres

Le rapport conserve l'idée que les oeuvres cinématographiques doivent bénéficier "d'un régime d'exception" en matière de censure. Il propose l'ajout d'un alinéa: "(...) il est tenu compte de l’intention ou de la démarche artistiques de son auteur, ainsi que des éventuel les mesures administratives délivrées en vue ou à l’occasion de sa diffusion."

"Cette formulation serait donc le rappel utile d’une vérité qui est déjà acquise en jurisprudence. Elle aurait le mérite de consolider l’attitude du juge
en faveur du respect de la liberté de création
."

Les mineurs majeurs sexuellement

Personne n'a réclamé la suppression de la classification X  mais le rapport souligne que "la suppression de l’interdiction aux moins de dix-huit ans peut
s’autoriser des évolutions du droit pénal lui-même en ce qui concerne ce que l’on appelle d’une expression impropre la « majorité sexuelle ».
"

Sachant que l’évolution du droit pénal ne remet certes pas en question le principe de la protection des adolescents face à certaines images, une "solution pourrait être la réécriture de l’article R. 211-12", notamment, "en tenant compte de la récente jurisprudence du Conseil d’État sur les films Love et Saw 3D."

Nouveau système de classification

La nouvelle rédaction de l’article R. 211-12 pourrait donc être : "Le visa d'exploitation cinématographique s'accompagne de l'une des mesures
de classification suivantes, en fonction du trouble que l’oeuvre ou le document est de nature à produire sur la sensibilité des personnes mineures :

1° Autorisation de la représentation pour tous publics ;

2° Interdiction de la représentation aux mineurs de douze ans ;

3° Interdiction de la représentation aux mineurs de quatorze ans ;

4° Interdiction de la représentation aux mineurs de seize ans ;

5° Interdiction de la représentation aux mineurs de dix-huit ans, lorsque l'oeuvre ou le document comporte sans justification de caractère esthétique
des scènes de sexe ou grande violence qui sont de nature, en particulier par leur accumulation, à troubler gravement la sensibilité des mineurs, à
présenter la violence sous un jour favorable ou à la banaliser

6° Interdiction de la représentation aux mineurs de dix-huit ans avec inscription de l'oeuvre ou du document sur la liste prévue à l'article L. 311-2."

Il est donc envisagé "de créer une catégorie intermédiaire entre douze et seize ans. En effet, il est clair que les capacités de distance critique à douze ans sont inférieures à ce qu’elles peuvent être entre seize et dix-huit ans. L’introduction d’une restriction à quatorze ans permettrait d’introduire une plus grande liberté d’appréciation, car le choix est souvent délicat lorsque le risque est de viser trop bas à douze ans et trop haut à seize ans."

Trouble et sexe

Il appartiendrait toujours à la commission et au ministre chargé de la culture d’élaborer une doctrine pour les critères de classification des niveaux inférieurs, en "en fonction du trouble que l ’oeuvre ou le document est de nature à produire sur la sensibilité des personnes mineures."

On modifierait aussi l'intitulé définissant l'oeuvre: "Le remplacement du critère de « scènes de sexe non simulées » par celui de « scènes de sexe »: le critère de la « non simulation » des scènes de sexe a évidemment perdu son intérêt au cours des récentes années, avec le développement des techniques numériques de mise en scène. Une scène peut être tout à fait explicite à l’écran tout en ayant été simulée lors du tournage. Plus généralement, certains films justifient une interdiction aux moins de 18 ans quant à l’effet produit sur de jeunes spectateurs sans comporter de telles scènes, et le raisonnement inverse peut tout aussi bien être tenu dans le cas où un film comportant de telles scènes ne justifie qu’une interdiction de moindre sévérité. C’est d'ailleurs ce que le Conseil d'Etat avait relevé dans l’arrêt rendu à propos du film Le pornographe cité plus haut."

Incitation à la violence

Le rapport souhaite aussi modifier la définition de la "violence dans les oeuvres cinématographiques. "L'intégration de la prévention à « l'incitation » à la violence vient en en écho aux dispositions de l'article 227-24 du code pénal. Cet ajout vise à montrer qu’au regard de la psychologie des mineurs,
l’incitation à la violence est une question en elle-même qui revêt une importance particulière.
" Sans entrer "dans le débat controversé sur le
caractère addictif des images de violence extrême
," puisqu'il "est raisonnable de penser que la société souhaite à bon droit en prémunir les jeunes", le rapport constate "que dans la période actuelle, l’on prête à la fiction cinématographique plus de pouvoir sur les comportements individuels qu’elle n’en a sans doute et l’on entend proscrire dans les films toute incitation des mineurs à la drogue, à l’alcool, au tabac etc.."

Nouvelles voies judiciaires

Enfin, en cas de contestation, ce rapport suggère de "laisser le tribunal administratif de Paris juge en premier et dernier ressort de ces affaires et de supprimer la voie de l’appel pour n’ouvrir que la faculté de saisir le Conseil d’Etat, juge de cassation. Cette solution aurait l’avantage d’établir un parallélisme entre la procédure du référé suspension de l’article R. 521-1 du code de justice administrative et le règlement de l’affaire au fond. "

Oscars 2016: Sacres (attendus), belles surprises et beaucoup de politique!

Posté par wyzman, le 29 février 2016

La nuit dernière se tenait la 88ème cérémonie des Oscars. Et une chose est sûre, le grand rendez-vous des professionnels de l'industrie du cinéma était à ne pas manquer. Et cela, pour plusieurs raisons. La première et la plus évidente : après la polémique des #OscarsSoWhite, les discours de Chris Rock étaient incroyablement attendus. Et l'humoriste américain n'a pas manqué de faire part de son ressentiment face au manque de diversité parmi les nommés.

Dès l'introduction, l'acteur de 51 ans n'a pas mâché ses mots : "Dans les années 60, ça a dû arriver et on n'a pas manifesté. Pourquoi ? Parce qu'on avait des vrais problèmes à résoudre ! Si les votants nommaient les maîtres de cérémonie, je ne serais même pas là. Tout le monde m'a dit de boycotter les Oscars. Mais il n'y a que les gens au chômage qui te disent de démissionner ! Jada Pinkett Smith a dit qu'elle boycottait les Oscars. Mais c'est comme si moi je boycottais les sous-vêtements de Rihanna : je n'y ai pas été invité !" Voilà qui était dit. Pendant 3 heures, les références au manque de diversité n'ont fait que s'enchaîner pour le bonheur de certains - mais pas de tous. En effet, en faisant chacun de ses discours sur le ton de l'humour, il se pourrait bien que Chris Rock soit passé à côté du propos. La présidente de l'Académie, Cheryl Boone Isaacs, en a profité pour venir sur scène rappeler à tous que "Les Oscars célèbrent les conteurs qui ont la chance travailler sur ce médium puissant qu'est le film" avant d'évoquer les réformes déjà entreprises.

Grâce aux apparitions de Stacey Dash, Kevin Hart, Kerry Washington, Priyanka Chopra ou encore Michael B. Jordan, la cérémonie a fait son possible pour montrer qu'elle allait de l'avant, se parant de couleur parmi les présentateurs à défaut de le faire du côté des nommés. Malheureusement, on passera difficilement outre certaines vannes de Chris Rock un peu trop osées pour l'assistance. On pense notamment à la vente de cookies pour l'association de sa fille qui lui ont surtout permis de balancer à Leonardo Dicaprio : "Allez, t'as gagné 30 millions !" rappelant ainsi les inégalités salariales qui touchent le secteur. Déplacés, culottés ou juste couillus, les efforts de celui qui a joué dans Two Days in New York n'ont pas éclipsé la talent de Neil Patrick Harris et Ellen DeGeneres, ses deux prédécesseurs. Dommage.

A côté, bien qu'elle n'ait pas remporté l'Oscar de la meilleure chanson originale avec "Till It Happens To You", Lady Gaga a tout de même livré un live digne de ce nom ! Introduite par Joe Biden, l'actuel vice-président des Etats-Unis, la chanteuse révélée par "Just Dance" était accompagnée de "survivants" de viols et a dédié sa prestation à Kesha Rose. Oscarisé pour "Writing's On the Wall", Sam Smith a dédié son prix à la communauté LGBT. On vous l'a dit, il y avait beaucoup de politique lors de ces Oscars ! D'ailleurs, nous serions tentés de dire que choisir Spotlight comme Meilleur film n'est pas anodin… Venu chercher son prix, le réalisateur Adam McKay a déclaré : "Cet Oscar est un mégaphone, j'espère que notre message résonnera jusqu'au Vatican : il faut protéger les enfants !"

Mais bien évidemment, tout ce qu'il faut retenir de ces Oscars, c'est le sacre de Leonardo DiCaprio. Annoncé comme grand favori, l'interprète de Hugh Glass dans The Revenant a enfin pu rentrer chez lui avec la fameuse statuette dorée qu'on lui promet depuis deux décennies ! D'ailleurs, il n'a pas hésité à remercier Martin Scorsese "qui [lui a] appris tant de choses sur le septième art" lors de son discours de remerciements. Vous noterez qu'après Le Loup de Wall Street, les deux hommes se retrouveront en 2017 pour The Devil in the White City, leur sixième collaboration.

Pour le reste, il convient d'évoquer les 6 prix techniques décernés à Mad Max : Fury Road qui n'ont fait que rappeler le génie de George Miller, à qui les votants ont préféré Alejandro G. Inarritu. Face à Mustang, Le Fils de Saul a su se montrer à la hauteur, confirmant ainsi les pronostics de la presse spécialisée. Enfin, et parce qu'il est toujours bon de finir sur un peu d'optimisme, félicitons Brie Larson et Alicia Vikander. Dans Room, le nouveau film de Lenny Abrahamson, la première excelle et s'est vue attribuer l'Oscar de la Meilleure actrice, coiffant Cate Blanchett et Carol au poteau. La seconde, très appréciée outre-Atlantique, est repartie avec l'Oscar du Meilleur second rôle féminin. Et parce qu'elle sauve complètement The Danish Girl, il va sans dire que c'était amplement mérité !

Pour découvrir le palmarès complet, c'est ici.

Oscars 2016: Spotlight, DiCaprio et Mad Max sacrés par Hollywood

Posté par vincy, le 29 février 2016

Toutes les nominations et le live en direct sur notre compte twitter.

Palmarès très équilibré cette année aux Oscars, avec trois gagnants très différents. Spotlight a remporté le titre de meilleur film, amplement mérité, dans une course très ouverte. Avec deux Oscars, le film a su déjouer les pronostics et démontre une fois de plus qu'on peut faire un cinéma populaire et intelligent, même si le box office n'est pas phénoménal.  Et finalement quoi de mieux pour cette 88e cérémonie très très engagée politiquement, et menée brillament par Chris Rock que de couronner un film lui-même très politique?!

Mad Max Fury Road a triomphé par le nombre et fait une importante razzia dans les catégories techniques avec six Oscars. Le festival de Cannes, qui l'avait présenté en avant-première mondiale, a aussi pu compter sur trois autres prix prestigieux: Le fils de Saul (film en langue étrangère), Vice-Versa (animation) qui fait gagner un 8e Oscar à Pixar et un 10e au groupe Disney dans cette catégorie et Amy comme meilleur documentaire. Pour Le Fils de Saul, c'était la 9e fois que la Hongrie était nommée dans cette catégorie. Le cinéma hongrois n'avait remporté l'Oscar qu'une seule fois, en 1981, avec Mephisto de István Szabó.

Les Oscars ont pour l'instant récompensé de nombreux professionnels non américains, de la danoise Alicia Vikander aux britannique Mark Rylance et Sam Smith (qui fait une fois de plus gagner l'Oscar de la meilleure chanson à James Bond). Sans oublier la pakistanaise Sharmeen Obaid-Chinoy, le chilien Gabriel Osorio Vargas (c'est seulement le 2e Oscar pour ce pays) et bien sur le mexicain Emmanuel Lubezki qui rentre dans l'histoire avec un troisième Oscar consécutif dans sa catégorie (directeur de la photographie) après ceux de Gravity et Birdman. Pour l'italien et la légende de la musique de film Ennio Morricone, la sixième nomination aura été la bonne (même s'il avait déjà reçu un Oscar d'honneur en 2007).

Evidemment on retient surtout le deuxième Oscar consécutif du réalisateur mexicain Alejandro G. Innaritu, un an après Birdman. C'est le troisième cinéaste à réussir cet exploit après Joseph L. Mankiewicz (1948-1949) et John Ford (1940-1941). Il offre surtout l'Oscar tant attendu pour l'un des plus acteurs de ces 20 dernières années: Leonardo DiCaprio. Il l'a enfin eu. C'était le couronnement attendu autant pour la cérémonie que pour la star. Avec trois Oscars "historiques", The Revenant n'aura pas tout perdu.

Film: Spotlight de Tom McCarthy
Réalisateur: Alejandro G. Inarritu (The Revenant)
Acteur: Leonardo DiCaprio ( The Revenant)
Actrice: Brie Larson (Room)
Second-rôle masculin: Mark Rylance (Le Pont des Espions)
Second-rôle féminin: Alicia Vikander (The Danish Girl)
Film d'animation (long métrage): Vice-Versa (Inside Out)
Film documentaire (long métrage): Amy d'Asif Kapadia & James Gay-Rees
Film en langue étrangère: Le fils de Saul de Laszlo Nemes
Court métrage: Stutterer de Benjamin Cleary
Film d'animation (court): Bear Story de Gabriel Osorio Vargas (Chili)
Film documentaire (court): A Girl in the River: The Price of Forgiveness de Sharmeen Obaid-Chinoy
Scénario original: Tom McCarthy & Josh Singer (Spotlight)
Scénario (adaptation): Adam McKay & Charles Randolph, d'après sur le livre The Big Short: Inside the Doomsday Machine de Michael Lewis (The Big Short)
Musique: Ennio Morricone (Les 8 Salopards)
Chanson: Writing's On The Wall (007 Spectre) de Sam Smith et James Napier
Image: Emmanuel Lubezki (The Revenant)
Montage: Margaret Sixel (Mad Max: Fury Road)
Décors: Colin Gibson & Lisa Thompson (Mad Max: Fury Road)
Costumes: Jenny Beavan (Mad Max: Fury Road)
Maquillages et coiffures: Lesley Vanderwalt, Elka Wardega & Damian Martin (Mad Max: Fury Road)
Montage son: Mark Mangini & David White (Mad Max: Fury Road)
Mixage son: Chris Jenkins, Gregg Rudloff & Ben Osmo (Mad Max: Fury Road)
Effets visuels: Andrew Whitehurst, Paul Norris, Mark Ardington & Sara Bennett (Ex Machina)