La fin du rêve de Michel Gondry ?

Posté par vincy, le 17 juillet 2014

michel gondry à aubervilliers l'usine à rêves

Dans un premier temps, début juillet, la ville d'Aubervilliers (en Seine-Saint-Denis) a annoncé  l'abandon du projet d'"usine des films amateurs" imaginé par Michel Gondry, "pour des questions budgétaires". Il s'agissait d'un espace gratuit et ouvert à tous qui devait voir le jour en 2016.

Porté depuis trois ans, et annoncé au mois de janvier par l'ancienne municipalité socialiste, le projet devait financer la réhabilitation de l'ancienne manufacture des allumettes - bâtiment industriel de 1000 m2 à la cheminée classée aux monuments historiques - pour que "l'usine de films" puisse permettre de créer une histoire et de la tourner en trois heures dans des décors de cinéma créés grâce à des objets de récupération.

Pas d'argent selon la nouvelle équipe municipale

La nouvelle municipalité argue qu'aucun financement n'avait été acté au moment des annonces. A la surprise générale, elle s’est opposée au projet. Evalué à 1,8 millions d'euros, l'usine coûterait en fait 2,7 millions d'euros, hors budget de fonctionnement, selon la ville désormais communiste. Aubervilliers ne s'était engagée qu'à hauteur de 500 000 euros. « .D'autres financements sont plus importants pour la commune. L'idée était superbe, mais ce n'est pas faisable, pas viable, et le maire a simplement pris ses responsabilités » se défend la mairie.

Une fois l'information publiée sur le site du Parisien, et confirmée par l'AFP, l'emballement médiatique "local" a suivi.

La Fondation du patrimoine, qui a soutenu le projet, s'est dite consternée. Son porte-parole rappelait que « cette usine des films amateurs proposait d'ouvrir la culture à des gens qui n'y ont pas forcément accès, tout en réhabilitant un bâtiment industriel extraordinaire pour lui offrir une seconde vie. »

Un projet parmi les moins coûteux selon la région

Mais la Fondation a été incapable de récolter plus de 515 euros par le biais de la souscription lancée sur son site web. Mais Safia Lebdi, élue Europe Ecologie-Les Verts au Conseil Régional, confirme que « c'est un des projets de réhabilitation les moins coûteux en Ile-de-France. Et il y a plein de moyens de financement, divers fonds, c'est seulement une question de volonté politique. » En charge de la commission culture en Ile-de-France, elle rappelle, au journal Le Monde, qu'une « convention de mécénat a été signée à la mi-janvier pour la restauration, avec le département et la région, et des acteurs privés : la fondation du patrimoine et la Fondation du Crédit coopératif »

Aubervilliers  avait acquis le site en 2011 pour 8 millions d'euros. En manque de terrains, elle en avait besoiin pour construire une nouvelle école élémentaire avant de revendre le reste à un promoteur de locaux d'entreprises, Sirius. Pour 8 millions d'euros. Sirius voulait faire du projet de Gondry une tête de gondole pour attirer des sociétés culturelles et audiovisuelles.

Des chiffres farfelus selon l'ancienne équipe municipale

Vendredi 11 juillet, Michel Gondry a rencontré le maire, Pascal Beaudet. Il a obtenu un délai, selon l’AFP, avant un abandon définitif afin que la ville puisse trouver le financement. Une prochaine rencontre aura lieu à l’automne. Une nouvelle hypothèse serait de trouver un autre lieu, moins coûteux. « J'étais très touché de pouvoir investir ce lieu, qui est super. Mais ça peut être ailleurs, l'important c'est que ça existe », a déclaré Michel Gondry, lors d'une rencontre avec la presse. Il ne veut pas que son usine soit dans une banlieue chic, mais bien dans un endroit populaire, ouvert aux jeunes et aux scolaires : « L'usine de films amateurs doit être l'endroit de la mixité, des rencontres, de l'amusement. »

Mais la polémique a déjà enflé et dérape dans des querelles de clochers rancunières entre l’ancienne et la nouvelle équipe municipale. Au journal Le Monde, Anaïs Bouhloul, membre du cabinet de l’ancien maire, conteste les affirmations financières de la société. « L'étude de programmation financée par le conseil régional du tourisme proposait deux options, l'une à 2 millions avec une salle de projection et un aménagement des espaces extérieurs, une autre à 1,5 million. Je ne sais pas sur quoi se base ce nouveau chiffre. » Quant au budget de fonctionnement, il incombe aux équipes de Gondry qui doivent juste engager « un directeur, un administrateur et une personne chargée du public, et embaucher des étudiants en cinéma pour guider les tournages, comme c'était le cas à Beaubourg ».

En effet, l’usine à rêves a déjà existé de manière itinérante au Centre Pompidou, à Paris mais aussi à New York ou au Brésil. Désormais Lille, Maubeuge, Créteil, Tokyo l’attendent pour une durée toujours déterminée.

Quant à Gondry, il se fait fataliste : « nous serons également très heureux d'être accueillis dans une autre commune qui pourrait être intéressée ». Avis aux communes intéressées.