Box office, production : le cinéma français entre rires et larmes

Posté par vincy, le 13 juillet 2014

qqu'est-ce qu'on a fait au bon dieu?

Le cinéma français peut pousser un grand cocorico national à la veille du 14 juillet. Le premier semestre a rassuré tout le monde : les spectateurs sont revenus, après une année 2013 décevante. Juin n'a pas été un bon mois (soleil et mondial ont été fatals): les blockbusters américains n'ont pas répondu aux attentes, les gros films français n'étaient pas vraiment bons et les films d'art et essai ont de plus en plus de mal à séduire un large public. Pourtant, 106,2 millions de spectateurs sont venus voir un film durant les six premiers mois de l'année. C'est une progression de 11,4% par rapport au premier semestre 2013.

Un spectateur sur deux est allé voir un film français

Mieux, la part de marché des films français est passée de 33,8% pour l'année 2013 à 48,5% pour le premier semestre 2014, surclassant ainsi un faible cinéma américain. 11 des 27 films ayant séduit plus d'un million de spectateurs sont nationaux. Un a dépassé les 10 millions d'entrées il y a quelques jours (Qu'est-ce que j'ai fait au Bon Dieu?, 8ème film français le plus populaire depuis la seconde guerre mondiale) et un autre les 5 millions d'entrées (Supercondriaque). Les comédies françaises ont le vent en poupe. Le Top 10 provisoire de l'année en compte 5 : outre les deux cités auparavant, on compte aussi Les 3 frères : le retour, Babysitting et Fiston. Un sixième film français se classe dans ce Top 10, La belle et la bête. Côté comédies, ajoutons les beaux scores de Barbecue, du Crocodile du Botswanga et de Sous les jupes des filles.

Les franchises, valeurs sûres américaines

Les films américains semblent bien en retrait. Même s'il ne faut pas oublier les cartons en janvier de films sortis à la fin 2013 (La Reine des neiges, Le Loup de Wall Street, Le Hobbit 2), Hollywood n'a eu que deux films franchissant les 3 millions de spectateurs (Rio 2 et X-Men : Days of Future Past, qui a réalisé un score supérieur à tous les épisodes de la franchise). Deux autres films, des produits Marvel, se classent dans le Top 10 : Amazing Spider-Man 2 et Captain America 2. Dans les semaines à venir, Dragons 2, et sans doute Transformers 4 et la suite de la Planète des singes devraient rééquilibrer le rapport de force France/USA.

La diversité de l'offre, facteur dynamique

En fait, les Américains ont surtout fait des étincelles avec des films d'auteur comme The Grand Budapest Hotel, 12 Years a Slave et Monuments Men qui ont compensé des grosses déceptions et des fiascos.

Tout comme l'animation reste une valeur sûre avec des succès comme La grande aventure Lego, M. Peabody ou Clochette et la fée pirate. N'oublions pas le film français Minuscule ou les succès japonais Le vent se lève et Albator, sorti à Noël. La diversité continue de payer : des films comme Yves Saint-Laurent, Philomena ou Deux jours, une nuit ont trouvé écho auprès d'un large public, qui, hélas n'a pas effacé les nombreuses déconvenues...

Le cinéma français, industrie "low cost"

Pourtant, des risques d'inquiétude pointent. Contre-coup de la crise économique, des mauvais résultats de l'année 2013 qui ont fragilisé les distributeurs, les investissements sont en chute libre au cours de ce premier semestre. -13%, ce n'est pas rien. Même s'il est trop tôt pour faire un bilan, on note qu'à nombre de films quasiment égal (114 en 2014 versus 133 en 2013), les budgets sont en baisse. Le devis moyen est ainsi passé de 4,37M€ au premier semestre 2013 à 3,08M€ au premier semestre 2014. Un seul film (contre quatre l'an dernier) dépasse les 15M€ de budget, Taken 3.

Alors que le gouvernement menace une fois de plus de ponctionner de l'argent dans les caisses du CNC, ces chiffres ne rassurent pas pour l'avenir du cinéma français, qui vire à l'économie low cost. L'an dernier, les deux tiers des projets déposés affichaient un budget de moins de 4 millions d'euros : désormais cette proportion est passée aux trois quarts. Certains évoquent la nouvelle convention collective avec un régime dérogatoire qui "profite" aux très petits films. Mais peu importe les causes. Si les producteurs n'investissent que dans des petits films destinés au festival ou des comédies populaires avec des stars de la scène ou de la télé, c'est bien la qualité française qui y perdra. Et au final, l'embellie du premier semestre ne sera alors qu'un chant du cygne pour un cinéma schizophrénique entre les films d'auteurs acclamés par la critique et les films que vont voir les français dans les salles de cinéma.

On en revient toujours aux "films du milieu", qui ont de plus en plus de mal à exister dans ce panorama entre fanfare et déprime.