Nymphomaniac à la Berlinale : du buzz viral au flop dans les salles

Posté par vincy, le 8 février 2014

Lars Von Trier. Haine et passion. Ce coup-ci, le rejet l'a emporté. On l'avait quitté alors qu'il était chassé du festival de Cannes pour avoir dérapé lors de la conférence de presse de Melancholia (lire notre actualité du 18 mai 2011). Il s'était excusé mais avait été désigné persona non grata. Von Trier et Cannes, ce fut une longue et belle histoire, un parcours sans faute : 9 de ses films ont été en compétition entre 1984 et 2011. Il a obtenu une Palme d'or, un Grand prix du jury, un prix du Jury.

Aussitôt après ce Festival 2011, le cinéaste danois avait lancé son nouveau projet, Nymphomaniac. Il lui fallait rebondir, ne pas sombrer dans la dépression. Il écrit rapidement un synopsis. Trop rapidement sans doute. L'esprit est embrouillé par cette éviction du Festival de Cannes, par ses obsessions, par ses névroses. Mais il se lance dans l'exploration du sexe féminin.

Cartes postales

Durant deux ans, il alimentera lui-même le buzz, avec une campagne virale maligne : dévoilant par petites touches un film qu'on devine provocateur (scènes pornographiques, casting de stars, le sexe comme sujet). Au fil des mois, on apprend que le projet sera divisé en deux films, on découvre des photos où la nudité et l'érotisme ne font aucun doute, on nous révèle un poster digne d'une photographie de magazine de mode... Ca clique, ça like, ça retweete, ça se propage (lire nos actualités sur le film).

Nymphomaniac change alors plusieurs fois de dates de sortie. Finalement, le réalisateur choisit une avant-première dans son pays plutôt que d'attendre un grand festival pour accompagner la sortie. Sans doute persuadé que sur son seul nom et avec la dose de marketing insufflée depuis plus de deux ans, la curiosité l'emportera. La censure ne lui fait pas peur. En France, ça n'empêche pas le premier volet d'être interdit aux moins de 12 ans et le second aux moins de 16 ans (depuis il a changé de classification, suite à une décision de justice, il est désormais interdits aux moins de 18 ans, NDLR).  Ces interdictions suggèrent un aspect sulfureux, forcément vendeur donc, à un film pourtant très "frigide", dont les propos sans queue ni tête déroutent la critique habituellement très aimable avec lui.

Boomerang

Car, les critiques sont mitigées après la projection unique du premier épisode. Elles deviennent mauvaises, voire en colère, avec le second volume. Von Trier, traditionnellement protégé avec le Festival de Cannes, est à nu. Aucun grand média ne décide de mettre son nouveau film à la une ou en ouverture d'un cahier cinéma. L'indifférence est palpable.

Qui a pu croire qu'un cinéaste aussi singulier pouvait s'épargner la fastidieuse aide d'un grand festival? Surtout, et ça n'aide pas, le réalisateur a approuvé l'idée qu'on diffuse dans les salles une version coupée, censurée, pas trop choquante du premier volume. De quoi décevoir les attentes et repousser les curieux pornophiles. On s'attendait à une orgie, on a le droit à une analyse sur un divan, ponctuée de fantasmes clichés. Sans doute, tout cela a-t-il été écrit trop vite. Ou les médocs que le réalisateur avalent commencent à faire leur effet. Mais le résultat est clair : tout est brouillon.

nymphomaniacMoins bien qu'Antechrist

Pas étonnant dans ce cas que le premier film n'ait séduit que 130 000 spectateurs en France, après un démarrage moyen (49 000 entrées en 5 jours dans 109 salles). Le second a péniblement séduit 26 000 spectateurs en 5 jours. Il faut dire qu'entre l'échec du premier film, sorti il y a un mois, et l'interdiction aux moins de 16 ans du second, le distributeur a réduit la voilure : 72 copies uniquement.

On est donc très loin de Melancholia (410 000 entrées) et même d'Antechrist (150 000 entrées malgré son interdiction aux moins de 16 ans). Certes le film fait mieux que Manderlay (à peine 40 000 spectateurs). Mais avec autant de bruit, Nymphomaniac aurait pu espérer séduire davantage de spectateurs, dans un contexte où la fréquentation en janvier 2014 est repartie à la hausse.

4h30 pour un orgasme qui n'aura pas lieu

La version non censurée du premier volume va être projetée ce dimanche 9 février, hors-compétition, au Festival de Berlin. 145 minutes au lieu de 110. Les 35 minutes supplémentaires feront-elles la différence? Doit-on s'attendre à découvrir une version plus longue que les 124 minutes du volume 2 au prochain festival de Cannes?

Reste que ça ne comblera pas les pertes financières du studio Zentropa. D'autant que Nymphomaniac n'a pas été vendu partout dans le monde. Ironiquement, le 64e Festival de Berlin a invité Louise Vesth, la productrice de Von Trier, a discuter sur la difficulté de vendre des films qui ne sont pas accessibles au plus grand nombre de spectateurs. Cette discussion intitulée "How To Sell Uneasy Films?" aura lieu mercredi matin.

L’instant Court : Matriarche réalisé par Guillaume Pierret

Posté par kristofy, le 8 février 2014

matriarcheComme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après le court-métrage La veille du premier jour de tournage avec Laurent Capelluto, voici l’instant Court n° 129.

Le réalisateur Fred Cavayé a de la suite dans les idées : après Vincent Lindon dans Pour Elle et après Gilles Lellouche dans A bout portant, il a réuni Vincent Lindon et Gilles Lellouche dans son nouveau film Mea Culpa à l’affiche en ce moment. Comme s'il voulait continuer à creuser le sillon du film d’action "bagarres et cascades contre des méchants" fabriqué en France dont il semble l’unique représentant aujourd’hui.

C’est pourtant le genre de film pour lequel les spectateurs se déplacent par millions, surtout quand une star y imprime son rythme : Bruce Willis et Piège de Cristal, Harrison Ford et Le Fugitif, Matt Damon et la trilogie Jason Bourne… En France il ne se passe plus rien depuis que Jean-Paul Belmondo Le Guignolo est à la retraite, et seul Luc Besson produit ce genre de film comme par exemple Taken avec Liam Neeson.

Le film d’action français va-t-il renaître ? A signaler la réussite de La proie avec Albert Dupontel filmé par Eric Valette, et donc Fred Cavayé. Et pourquoi pas l’année prochaine un film de Guillaume Pierret ? Ses différents courts-métrages vont dans ce sens, comme par exemple Matriarche qui fait le tour des festivals autant en France qu'aux Etats-Unis, avec un prix de meilleur réalisateur au New York City International Film Festival.

Voici donc le court-métrage Matriarche réalisé par Guillaume Pierret : Un braquage tourne mal, une fusillade éclate... Dans un parloir de prison, le face à face entre une mère et son fils va permettre d'éclairer les événements passés…