Arras 2013 : la famille et les êtres solitaires au coeur de la compétition

Posté par MpM, le 17 novembre 2013

arras 2013Pour sa 14e édition, l'Arras Film Festival proposait une compétition européenne composée de neuf longs métrages inédits venus d'Europe du Nord et de l'Est. Curieusement, la famille semble cette année au cœur des préoccupations des cinéastes qui représentent la cellule familiale dans tous ses états, et notamment dans ce qu'elle a de plus dysfonctionnel.

On retrouve ainsi à plusieurs reprises la figure du père indigne, soit tyran, soit faux démiurge, soit tout simplement absent. Dans The disciple d'Ulrika Bengts (Finlande), par exemple, le gardien de phare terrorise ses enfants et sa femme avec sa rigueur extrême et son autorité implacable.

Dans Terku d'Ilmar Raag (Estonie), le père de la jeune héroïne utilise un mélange de violence et de fausse douceur pour l'amener à lui obéir pleinement. Ces hommes ne sont pas présentés comme des monstres, mais simplement comme des êtres qui ne supportent aucune contradiction. Persuadés de savoir ce qui est bon pour leurs enfants, ils tracent pour eux un avenir tout écrit.

Impardonnables absents

Les pères absents ne sont pas plus idéalisés : celui de Miracle de Juraj Lehotsky (Slovaquie) a quitté sa famille peu de temps après la naissance de sa fille, celui de West de Christian Schwochow (Allemagne) est soupçonné d'être un traître. Dans Chasing the wind de Rune Denstad Langlo (Norvège), le père mort a laissé à sa fille un immense sentiment de culpabilité. Le personnage de The japanese dog de Tudor Cristian Jurgiu (Roumanie), lui, ne pense même pas à prévenir son fils, parti vivre au Japon, que sa mère est morte.

Dans The priest's children de Vinko Bresan (Croatie), les pères ne veulent tout simplement pas être pères, mais se retrouvent mis devant le fait accompli à cause des manipulations d'un prêtre nataliste. Quant au père des deux jumeaux mis en scène dans Le grand cahier de Jonas Szasz (Hongrie), il veut éloigner ses enfants pour les protéger, mais ne fait que les livrer à la violence la plus absolue. Absent lorsqu'ils ont le plus besoin de lui, il finit par devenir pour eux un parfait étranger.

A la dérive

Car l'autre thématique qui traverse la compétition est la description de personnages à la dérive, solitaires ou franchement paumés, qui recréent à leur manière une famille d'adoption à leur image. Au centre de Kertu, il y a ainsi cette rencontre lumineuse entre une jeune femme psychologiquement fragile et un coureur de jupons invétéré, alcoolique et atteint d'un cancer. Leur histoire d'amour, désarmante de simplicité et de sincérité, balaie les préjugés, et, malgré une certaine facilité de scénario, renvoie surtout à l'idée que ce qui réunit est toujours plus fort que ce qui sépare.

The girl from the wardrobe de Bodo Kox (Pologne) montre aussi la communion d'esprit entre un jeune homme atteint de graves troubles neurologiques et une jeune femme suicidaire. La poésie troublante du film, qui mêle l'ultra-réalisme du décor à des touches de fantastique issu des hallucinations de l'héroïne, rend palpable la connexion muette qui se fait entre ces deux êtres hors du monde.

Dans le même esprit, la jeune orpheline de Chasing the wind renoue après dix ans d'absence avec son ancien petit ami, veuf et désabusé ; les deux adolescents de The disciple s'unissent contre l'adversité ; les deux frères du Grand cahier sont reliés par un lien si fort qu'il en devient terrifiant ; le petit garçon de West, qui vient de quitter la RDA pour la RFA, cherche auprès d'un compatriote accusé d'espionnage la figure paternelle qui lui manque.

Un autre mode de communication

Un certain espoir semble ainsi émerger de ces différents films qui montrent, malgré une incommunicabilité presque endémique (le père de The japanese dog ne parle plus à son fils depuis dix ans, le grand père de Chasing the wind n'adresse pas la parole à sa petite fille, le frère malade de The girl from the wardrobe ne peut plus s'exprimer, les enfants de Kertu ou The disciple n'ont pas le droit à la parole face à leur père...), qu'il est toujours possible d'atteindre l'autre, même par un biais atypique. Le prêtre zélé de The priest's children ne finit-il pas par trouver (très ironiquement) des complices prêts à l'aider dans son entreprise de repeuplement de l'île ?

La dominante humaine de ces différents longs métrages est comme le révélateur à la fois d'un repli sur l'intime (peu de grands sujets de société sont abordés, au contraire des festivals habituels) et d'une volonté de remettre l'individu en tant qu'être social au centre du récit. L'exemple du Grand cahier est à ce titre éloquent : privé de reconnaissance et de chaleur humaine, les personnages se replient sur eux-mêmes et sombrent dans une violence pire que celle qui leur est infligée.

La fenêtre ouverte sur le monde par la compétition 2013 semble alors le reflet saisissant d'une société qui aspire à se recentrer sur l'essentiel (sa propre humanité) avant d'affronter les mutations et les révolutions d'un monde qui lui échappe.

Une productrice ouvre une galerie d’art dédiée au cinéma

Posté par vincy, le 17 novembre 2013

la galerie cinémaLa productrice Anne-Dominique Toussaint (Les Films des Tournelles) a ouvert au début de l'automne la Galerie Cinéma à Paris. Située en plein Marais, au 26 rue Saint-Claude (Paris 3e), cette galerie est dédiée aux artistes liés ou issus du cinéma.

Ce nouvel espace veut offrir "un regard singulier et moderne sur l'influence du 7e art dans les champs de la création artistique contemporaine". Première invitée, Kate Barry, fille de Jane Birkin et du compositeur John Barry, y présente Point of View,, exposition qui a déjà tourné dans quelques festivals. Sa série Actrices ainsi que quelques clichés inédits sont visibles du mardi au samedi, de 11h à 19h.

Les films des Tournelles ont récemment produits Alceste à bicyclette, Et maintenant on va où ?, Le hérisson, Les beaux gosses, Miele, Rengaine...