Des acteurs britanniques mobilisés contre la loi anti homosexuels russe

Posté par vincy, le 11 août 2013

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Tilda Swinton, Sir Ian McKellen puis Stephen Fry ont alerté, chacun à leur manière, les citoyens et les dirigeants politiques à propos du climat homophobe, et de ses conséquences, qui règne en Russie.

Au départ, il y a une Loi votée en Russie, le 11 juin dernier. cette Loi criminalise la «propagande auprès des mineurs» des «relations sexuelles non traditionnelles». En creux, la Russie bannie toute visibilité des relations sexuelles homosexuelles. Face à une Europe de plus en plus "gay-friendly", le président Vladimir Poutine flatte ainsi une population majoritairement homophobe. Cela a rapidement entraîné une chasse aux homos, avec passages à tabac et autres violences impunies, de la part d'une frange de la population ultra-nationaliste. Des associations ne peuvent plus faire leur travail. Quant aux artistes, même les plus célèbres, ils peuvent vivre leur sexualité, à condition qu'ils la cachent.

Cette atteinte aux libertés fondamentales (orientation sexuelle, liberté d'expression) a entrainé au fil des semaines des réactions, des manifestations (à Anvers hier, à Londres), des pétitions et beaucoup d'émotion sur les réseaux sociaux. Le phénomène prend de l'ampleur : avec l'organisation des Mondiaux d'Athlétisme (en ce moment même) et celle des Jeux Olympiques d'hiver début 2014, la Russie est sous les feux des projecteurs. Selon la Loi, les sportifs homosexuels ne sont pas les bienvenus. Or cette Loi va à l'encontre des valeurs du Comité International Olympique (CIO), bien embarrassé quand on lit les communiqués et déclarations contradictoires de son Président, Jacques Rogge. Des appels au boycott (JO, biens et services russes...) qui circulent attirent des dizaines de milliers de signatures. Désormais ce sont les athlètes qui sont interpellés pour qu'ils soutiennent les droits des homosexuels d'une manière ou d'une autre.

Tout a commencé avec Tilda Swinton, de passage à Moscou, qui a brandit un drapeau arc-en-ciel, symbole des populations LGBT, sur la Place Rouge. La photo, postée par son agent Christian Hodell sur Twitter, était accompagnée d'un message sans équivoque : "En solidarité. Bons baisers de Russie."

Et puis le 6 août, c'est le blogueur et activiste américain Michael Petrelis à l'occasion d'une représentation de No Man's Land, la pièce d'Harold Pinter, au Berkeley Repertory Theatre en Californie, qui a demandé à Sir Ian McKellen, éternel Gandalf et Magneto, d'être pris en photo avec une pancarte indiquant "Solidarité avec les homos russes". Gay lui-même, défenseur actif des droits des homosexuels depuis 25 ans, McKellen a accepté. La photo a été postée sur le blog de Michael Petrelis.

Enfin, le lendemain, Stephen Fry a publié un courrier (la version intégrale suit après l'article) destiné au Premier ministre britannique, David Cameron, au patron du CIO, Rogge, et aux membres de ce même CIO. "Passages à tabac, meurtres et humiliations sont ignorés par la police. Défendre ou discuter sainement de l'homosexualité est contraire à la loi. Dire, par exemple, que Tchaïkovsky était gay et que son oeuvre et sa vie reflètent sa sexualité et ont inspiré d'autres artistes gay serait sanctionné par une peine d'emprisonnement"" écrit-il. Stephen Fry est en colère face à "la banalité du mal" chère à Hannah Arendt qu'il voit dans les yeux des dirigeants russes. Il demande "une interdiction absolue des Jeux olympiques d'hiver 2014 en Russie à Sochi est tout bonnement essentielle." Et propose de les installer ailleurs, "dans l'Utah, à Lillehammer, où vous voulez [certains ont évoqué Vancouver également, ndlr]." Il ajoute qu'il "faut à tout prix que Poutine ne puisse pas avoir l'approbation du monde civilisé."

Faudra-t-il appeler au boycott d'autres manifestations, comme le Festival du film de Moscou?

David Cameron a répondu hier au comédien, par Twitter : "Merci de votre message @stephenfry. Je partage votre profonde inquiétude sur les mauvais traitements dont font l'objet les homos en Russie. Néanmoins, je crois qu'il vaut mieux combattre les préjugés en participant, plutôt que boycotter les Jeux d'hiver."

En France, c'est le néant politique. Aucun artiste, aucun grand élu n'a (ré)agit. C'est d'autant plus désolant que Merkel et Obama se sont émus publiquement de cette Loi. Dans l'Hexagone, les cinéastes continuent de débattre de leur convention collective, de l'insuccès des comédies ou encore de l'exception culturelle, noble en cause en soi. Les comédiens se revendiquent apolitiques. Et un Depardieu sert même d'ambassadeur à la politique de Poutine. Elle est loin cette époque où ces artistes "éclairés" étaient prompts à défendre les grandes causes internationales. Dorénavant, ce sont les Britanniques qui donnent une leçon de démocratie et de liberté.

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