Arras 2012 : rencontre avec Fernando Trueba

Posté par MpM, le 11 novembre 2012

Au 13e Arras Film Festival, le cinéaste espagnol Fernando Trueba, fraîchement récompensé à San Sebastian d'un prix de mise en scène, est venu présenter aux festivaliers arrageois son dernier long métrage.

L'artiste et son modèle met en scène Jean Rochefort dans le rôle d'un sculpteur retrouvant son énergie créatrice après avoir trouvé un nouveau modèle. Situé dans le contexte difficile de la seconde guerre mondiale, c'est une fable poétique et pleine d'espoir sur la création, la vie, la vieillesse et la nature.

Ecran Noir : Comment situez-vous L'artiste et son modèle dans votre filmographie ?
Fernando Trueba : C'est le premier film de ma vieillesse (rires) ! Non, mais c'est un film que j'ai porté en moi pendant pas mal d'années. Je rêvais toujours de le faire mais à chaque fois j'arrivais à trouver un autre projet à faire avant parce que je trouvais qu'il fallait attendre plus longtemps pour comprendre un personnage comme Marc Cros, le sculpteur joué par Jean Rochefort. D'ailleurs, les gens qui me connaissent me reconnaissent dans le film. Pas nécessairement dans le personnage, mais dans le film, dans l'addition des choses de la vie.

EN : Quel a été le premier élément qui s'est imposé à vous et vous a donné l'envie de faire le film ? Le personnage du sculpteur ?
FT : Je ne saurais pas dire exactement. Je crois que ce n'est pas une chose mais plusieurs choses. C'est le rapport entre un personnage vieux et un personnage jeune qui est un sujet que j'ai traité pas mal de fois dans mes films, de façon complétement différente. En même temps, l'atelier comme endroit, comme décor où il se passe quelque chose, où l'artiste travaille, ça m'attirait beaucoup. Lorsque j'étais enfant, je rêvais de peindre, ce que j'ai abandonné à la fin de mon adolescence parce que déjà le cinéma avait pris la place, mais à l'époque j'étais fasciné par les ateliers d'artistes. Toutes ces photos de Brassaï, de Cartier-Bresson, tous ces photographes des années 30-40 qui comme moi et avant moi aimaient l'atelier de l'artiste comme un endroit presque magique où l'on voudrait passer une partie de sa vie ! Alors je voulais raconter une histoire dans cet atelier magique. Et puis il y a cette espèce de fondu enchaîné entre une vie qui se termine et une vie qui commence.

EN : Comment s'est fait le choix de Jean Rochefort pour le rôle principal ?
FT : Dès le début, Jean Rochefort était pour moi le personnage principal. Il était le premier de ma liste. Il a accepté de jouer dans le film et ç'a vraiment été un moment exceptionnel. D'un point de vue professionnel mais d'un point de vue humain aussi. Au niveau de l'humour, de l'amitié, de tout ce qui s'est passé. Qu'est-ce qu'on a pu rire ! On s'est raconté nos vies... C'est une chose formidable du cinéma, les rencontres qu'on peut faire. Chaque fois qu'on se voit depuis, c'est une nostalgie... on aimerait recommencer lundi prochain !

EN : Comment avez-vous travaillé avec Daniel Vilar, le directeur de la photographie, qui a fait un travail magnifique sur les images ?

FT : Ca a été très joli. J'avais travaillé avec lui comme assistant à la caméra puis comme opérateur, et finalement je lui ai proposé d'être le directeur de la photo du film. Il est très cinéphile, il aime beaucoup le cinéma mais il est jeune donc il connaissait très bien le cinéma moderne, les films indépendants, tout ça. Mais à un moment donné je me suis rendu compte qu'il y avait beaucoup de références que je lui donnais qui appartenaient à un cinéma plus classique qu'il ne connaissait pas. Ca a été très joli de l'inviter à connaître ce cinéma et à lui montrer notamment beaucoup de films français. Des films de Renoir, de Bresson, de Truffaut. Maintenant il adore voir ces films ! Donc pour lui ça a été un joli voyage d'inititation dans le cinéma classique. Suvent les jeunes ne voient que les films contemporains et ils ne connaissent pas assez le cinéma classique. Or c'est très important, il y a plein de trésors dans ce cinéma. On découvre un monde dont on ne veut plus sortir. Ca a été très intéressant de travailler avec Daniel car il était très ouvert. J'aurais pu appeler un grand directeur de la photo espagnol avec qui j'avais déjà travaillé mais je voulais quelqu'un de frais, sans préjugés.

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