Cannes 2012 : Qui est Koji Wakamatsu ?

Posté par MpM, le 25 mai 2012, dans Cannes, Films, Personnalités, célébrités, stars.

La vie de Koji Wakamatsu mériterait un film à elle seule : tour à tour yakuza, réalisateur de films érotiques (les fameux pinku eiga japonais) et cinéaste politique radical encensé dans les festivals internationaux, cet artiste japonais né en 1936 a à son actif plus d’une centaine de films… et quelques démêlés avec la justice du fait de sa sympathie pour l’extrême gauche japonaise et la cause palestinienne.

Son cinéma porte logiquement la marque d’un tel engagement, et s’avère parcouru par la question de la domination, qu’elle soit sociale, sexuelle ou étatique. On trouve en effet dans ses films des personnages humiliés, violés, séquestrés ou encore torturés, à l’image de la jeune femme de Quand l’embryon part braconner, qui devient l’esclave sexuelle de son supérieur hiérarchique.

Dès ses débuts, le jeune cinéaste utilise ainsi le prétexte du pinku eiga pour aborder les thèmes qui lui sont chers comme l’impuissance de l’individu, la déliquescence de la société ou la perversion du pouvoir. Au milieu des années 60, il fonde sa propre maison de production et s’abstrait du cinéma pink pour se concentrer sur des films d’avant-garde, tournés sans moyens, dans l’urgence, et dans une radicalité furieuse. C’est de cette époque que datent notamment Les anges violés (qui suit un homme passant du statut de voyeur impuissant à celui de meurtrier féroce) et Sex Jack (racontant comment un groupe d’étudiants révolutionnaires contraints à la réclusion tuent le temps en fumant, en buvant et en faisant l’amour), tous deux présentés à la Quinzaine des Réalisateurs en 1971.

En 1972, Koji Wakamatsu réalise L’extase des anges, un brûlot anti-système sur la faction armée d'un groupe révolutionnaire qui sombre dans le terrorisme individuel. Le film lui vaut d’être inquiété par la police, qui le soupçonne d’autant plus d’intentions terroristes qu’éclatent peu après les excès réels d’un groupe de jeunes révolutionnaires impliqués dans une prise d’otages sanglante. Ces événements, qui signèrent la fin de l’extrême gauche japonaise, sont d’ailleurs à l’origine de l’un des films les plus célèbres de Wakamatsu, United Red Army, réalisé 25 ans plus tard.

Peu à peu, le cinéaste tourne moins. Il s’oriente vers des œuvres que lui-même qualifie de "plus commerciales" et "moins érotiques", même s’il revendique toujours leur aspect politique.

Après la présentation d’United Red Army à Venise en 2008, qui marque son retour au plan international, Koji Wakamatsu tourne Le soldat Dieu, l’histoire d’un soldat de la deuxième guerre mondiale qui rentre chez lui après avoir perdu ses deux bras et ses deux jambes. Incapable de bouger ou même de s’exprimer, il est une charge permanente pour sa femme, contrainte de s’occuper de lui avec l’abnégation et l’humilité due à un héros de cette trempe...  Le film est présenté à Berlin, où il vaut un Ours d'Argent de la meilleure actrice à son interprète Shinobu Terajima. Il prouve surtout que Wakamatsu n’a pas perdu la main lorsqu’il s’agit de dénoncer les absurdités de la société japonaise et de mettre à mal les fondements du système. On est d’autant plus impatient de découvrir son nouveau brûlot, 11.25 the day he chose his own fate, inspiré des derniers jours de la vie de l'écrivain japonais Yukio Mishima, et présenté dans la section Un certain Regard.

Tags liés à cet article : , , , , , , .

exprimez-vous
Exprimez-vous

Vous devez être connecté pour publier un commentaire.