Cannes 2011 : Les affinités électives de son excellence Bertolucci

Bernardo Bertolucci est l’une des vedettes de cette journée d’ouverture du 64e Festival de Cannes, aux côtés de Robert de Niro, Woody Allen et George Méliès. Le cinéaste italien va recevoir une Palme d’or d’honneur, qui sera désormais décernée chaque année le premier jour du festival à un réalisateur n’ayant jamais obtenu la récompense suprême.

Il est venu à quatre reprises sur la Croisette et se souvient avec émotion de cette première fois en 1964 où Prima della Rivoluzione était sélectionné à La Semaine de la Critique. « Les critiques italiens ont massacré, et même tué mon film. Les critiques français l’ont bien aimé. Je me sentais comme un réalisateur français… »

En 1976, il a présenté 1900, avec Robert de Niro. Hors-compétition. « Gilles Jacob avait dédié une journée au film. La première partie était diffusée l’après midi et la seconde après le dîner. » C’est « un film monstre, je ne le voyais pas en compétition. » Plus tard, il croise le Président du jury de cette édition, Costa-Gavras, qui lui avoue ne pas comprendre pourquoi le film n’est pas en compétition. Il confie à Bertolucci qu’il aurai pu recevoir la Palme d’or. Celle-ci reviendra à Taxi Driver, avec De Niro.

C’est d’ailleurs l’acteur américain, président du jury cette année, qui devrait remettre la Palme d’or d’honneur à un Bertolucci venu en fauteuil roulant. « Bob est très laconique. Il ne parle pas beaucoup. Il va peut-être dire quelques mots, ce serait bien. »

Le réalisateur du Dernier tango à Paris présentera demain dans le cadre de Cannes Classics une copie restaurée du Conformiste (1970). « Au lieu de restaurer mes films, les Cinémathèques devraient me restaurer, moi. »

Si Bernardo Bertolucci refuse d’être pris en photo sur son fauteuil roulant, pudeur apparemment partagée avec Jean-Paul Belmondo, il a conscience à 71 ans d’être proche de l’épilogue de son propre film. « Depuis cinq, six ans, j’étais convaincu de ne plus tourner de films. Mon état, comme vous l’avez constaté, me disait que c’était la fin. Je suis comme mes caméras : sur un chariot. »

Pourtant, après avoir vu Avatar, qui l’a fasciné, il est convaincu que la 3D n’est pas réservé aux films d’horreur, de science-fiction ou de grand spectacle. Il a une idée en tête, fait quelques essais, dialogue avec Wenders et Herzog. « On est tous attirés par la 3D ». Et il se met à rêver d'un Persona d'Ingmar Bergman avec le visage des deux actrices en relief. Il va tourner Toi et moi, une histoire en sous-sol, avec ce procédé (voir actualité du 11 avril).

Bertolucci est ancré dans le présent aime les nouvelles vagues : celles du Brésil dans les années 60, celles de la Chine dans les années 80, ou encore les nouveaux talents italiens contemporains comme Crialese ou Sorrentino : « ils s’intéressent à la structure, à l’esthétisme, pas seulement au scénario

A l’écouter, en français, en anglais, en italien, faisant des références à Bazin ou Bataille, on aurait pu s’attendre à un vieil homme regrettant le passé. Mais il n’y a aucune nostalgie chez lui. Le temps est une valeur subjective. « Il y a des films qui vieillissent bien, des films qui vieillissent mal. Il n’y a pas de règles, ce n’est pas comme pour le vin. Le passage du temps ne fait pas toujours du bien aux films. Mais ce n’est pas forcément à cause du film, qui est en fait lié à une réalité de l’époque. En fait, la réalité vieillit aussi… »

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