Le voleur de lumière : fable sensible et juste sur la modernité

Posté par kristofy, le 2 mars 2011

voleur de lumièreL’histoire : On l'appelle Monsieur Lumière. Dans ce village perdu au milieu des montagnes Kirghizes, il entretient les lignes, trafique parfois les compteurs pour venir en aide aux plus démunis.

Cœur ouvert et généreux, il écoute, conseille, conforte les peines et tempère les disputes conjugales de ces villageois oubliés par la civilisation moderne.  Il a un rêve : construire sur les montagnes des éoliennes pour alimenter toute la vallée en électricité. Mais il va devoir faire face à des hommes puissants et corrompus qui sont les nouveaux maîtres du pays.

Notre avis : Une petite merveille qui vient du Kirghizistan, aussi peu facile à situer sur une carte que peu visible sur grand écran, un pays où les films produits chaque année se comptent sur les doigts de la main. Le voleur de lumière réussit pourtant à embrasser à la fois l'émouvant portrait d'un homme qui pense au futur et les changements en cours dans son pays qui bouleversent le présent.

Dans un petit village reculé au fin fond des montagnes du Kirghizistan, les habitants sont particulièrement isolés du monde moderne, beaucoup n’ont pas les moyens d’avoir l’électricité. Il y en a un que les autres surnomment Monsieur Lumière parce qu' il trafique les compteurs électriques pour ceux qui ne peuvent pas payer. Comme d’autres, il participe à sa manière à rendre la vie plus facile dans cet endroit perdu. Et il a une grande idée : et si le village produisait sa propre électricité en installant des éoliennes ?

Le voleur de lumière montre avant tout un homme qui veut agir pour le bien de son village mais qui va se heurter à des intérêts supérieurs… Car le personnage principal est apprécié de tout le monde sauf des autorités, à cause justement de ses raccordements électriques pirates. Mais les temps changent et la vaste terre commune aux villageois est l’objet de la convoitise d’un groupe étranger d’investisseurs chinois. A l’image du célèbre combat de David contre Goliath, on décèle dans cette intrigue la menace du profit économique destiné à un petit nombre à l’encontre d’un progrès social partagé. Il y a alors le dilemme de partir loin en ville pour un avenir hasardeux ou de rester au village sans beaucoup d’espoir.

Aktan Arym Kubat avait déjà fait rayonner le cinéma Kirghize avec ses films Le fils adoptif et Le singe. Celui-ci a même été sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes 2010, et il a aussi été choisi comme film d’ouverture du dernier  Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul. A l’occasion de cette première, le réalisateur avait échangé quelques mots avec les spectateurs, dont voici un condensé à destination du public qui est maintenant invité à découvrir ce beau film en salles.

En plus d’être le réalisateur vous êtes là aussi l’acteur principal ?

Aktan Arym Kubat : C’est un hasard, jamais je n’ai pensé à jouer dans un film. Mais à force de chercher quelqu’un qui correspondeAktan Arym Kubat au personnage et que je ne trouvais pas, alors mon équipe à commencé à me taquiner en me disant de le faire moi-même, et puis je l’ai fait. Avec la technologie du retour vidéo, je regardais sur l’écran si je me satisfaisais comme acteur ou pas.

Le film est représentatif du Kirghizistan d’aujourd’hui ?

Aktan Arym Kubat : C’est un pays d’Asie centrale avec un début de processus démocratique qui connaît des accidents, mais il y a eu deux révolutions du peuple. Il y a toujours des volontés de se saisir de la terre pour l’exploiter et faire des profits. Si quelqu’un se met en travers du chemin de quelqu’un qui veut le pouvoir, c’est possible de l’écarter. Il y a eu des meurtres non élucidés, la vie d’un être humain ne vaut pas grand-chose...

Quand votre film a-t-il été tourné ?

Aktan Arym Kubat : Mon film a été tourné entre les deux révolutions. Mais ce qu’on avait cru acquérir après la première, ce n’était pas réel. On a terminé le tournage en mars 2010, et en avril il y a eu une autre révolution qui est arrivée, plus violente que la première. D’ailleurs, aujourd’hui, notre président est une femme. Toutefois, Le voleur de lumière n’est pas un film folklorique ou ethnique, c’est surtout un film humaniste, et ce qu’il montre va au delà des frontières.

Crédit photo de droite : Michel Mollaret

Lauréats 2010 de la Fondation Groupama Gan pour le cinéma : la relève est assurée !

Posté par MpM, le 2 mars 2011

laureatsDepuis 1987, la Fondation Groupama Gan pour le cinéma soutient et accompagne chaque année plusieurs jeunes cinéastes dans l'élaboration et la réalisation de leur premier long métrage. Les lauréats reçoivent une aide financière à la production (60 000 € pour le producteur, 7500 € pour le réalisateur) et bénéficient du label de la Fondation, synonyme de sérieux et de qualité.

Un coup de pouce qui peut devenir un véritable tremplin, à une époque où monter des projets ambitieux et confidentiels tient du parcours du combattant. Les producteurs présents lors de la soirée de présentation des Lauréats 2010 ont d'ailleurs souligné le rôle primordial joué par la Fondation. "C'est un encouragement plus grand que vous ne l'imaginez", a ainsi déclaré le producteur Jacques Bidou (JBA Productions), avouant qu'il est "de plus en plus difficile de soutenir ce genre de projets". Pour Jean des Forêts (Petit Film) c'est un '"engagement décisif" qui permet l'entrée en production.

Les six projets  retenus pour 2010 (parmi les 150 reçus) viennent du monde entier et abordent chacun à sa façon la réalité sociale de son pays. Il y a ainsi une jeune fille ouzbek qui a refusé d'épouser celui que ses parents avaient choisi pour elle, une jeune femme iranienne qui découvre par hasard la situation difficile de deux immigrés des quartiers pauvres ou encore un jeune Bédouin accusé de trahison parce qu'il travaille pour les Israéliens. Des destins douloureux qui reflètent les enjeux majeurs des sociétés contemporaines : poids des traditions, sort des minorités, changements historiques...

Et même si ces films n'existent pas encore (à l'exception du film français, Après le sud de Jean-Jacques Jauffret, et du film bédouin, Le poste Sud-Est d'Ami Livne, terminés depuis peu), on a déjà très envie de les voir, ne serait-ce qu'à cause des yeux brillants de leurs futurs réalisateurs, et de la passion qui couve dans leur voix lorsqu'ils en parlent. Ca tombe bien, 75% des films lauréats de la Fondation sortent moins de deux ans après le dépôt du scénario : quelle meilleure manière de prendre le relais de ce lent processus d'accompagnement et de soutien que d'aller les voir en salles ?

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Les lauréats 2010

- Massoud Bakhshi (Khorramshahr) - Iran
- Bani Khoshnoudi (Ziba) - Iran
- Alexandra Gulea (L'enfant des mines) - Roumanie (photo de droite)
- Saodat Ismailova (40 jours de silence) - Ouzbékistan
- Jean-Jacques Jauffret (Après le sud) - France
- Ami Livne (Le poste Sud-Est) - Israël (photo de gauche)