RIHL 2010 : des films animés dont l’imaginaire n’a rien de figé

Posté par Benjamin, le 13 décembre 2010, dans Critiques, Festivals, Films, Poitiers.

L’animation est un genre devenu majeur dans le cinéma actuel avec le succès des films Pixar ou de franchises telles que Shrek ou L’âge de glace mais aussi grâce à l’essor de la 3D. Les Rencontres internationales Henri Langlois l’ont bien compris et ont sélectionné pour cette 33ème édition des courts métrages animés absolument somptueux !

Il faut le dire et ne pas être avare en superlatifs tant la qualité de ces films dépasse celle de simples travaux d’écoles. Nous sommes face à des professionnels qui tiennent une idée, une véritable trouvaille, qui créent un monde qui leur est propre et développent leur propre style. Pas un film d’animation ne ressemble à un autre. Les formes sont aussi variées qu’inspirées. Le sud-coréen Wan-Jin Kim a joué sur la poésie de ses images qui ressemblent parfois à des tableaux pour retracer à la fois l’horreur de la guerre mais aussi la beauté du paysage qui assiste au massacre. C’est l’absurdité de la guerre face à la mort passive de la forêt. Seulement, il est dommage qu’il n’ait pas développé un vrai fil conducteur pour son film et qu’il se laisse emporter par sa créativité picturale.

Cependant, que ce soit les réalisateurs français du Gardien de phare ou l’allemande Verena Fels pour Mobile, c’est l’absence de parole et une durée courte (moins de 10 minutes) qui les caractérise. Le premier se rapproche plus du style de Sylvain Chomet tandis que le second donne vie à un mobile d’enfant pour une histoire à la fois drôle et irrésistible.

Mais deux films d’animation se démarquent nettement des autres dans la compétition. Le premier par son choix artistique brillant et novateur, le second pour son histoire et l’aboutissement de son projet.

Tout d'abord, l’œuvre de Pierre-Emmanuel Lyet qui a eu l’incroyable idée de réduire ses personnages à de simples yeux. Avec Parade, il traduit notre déshumanisation moderne en ne laissant apparaître de notre identité qu’un œil qui sort de l’obscurité. Le reste du corps, noir lui aussi, se fond donc dans le décor. Mais un œil, un corps se détache de ce monde si triste grâce à des « amis » (imaginaires ou non), des êtres de couleur de toutes les formes qui le suivent partout et perturbent ce monde si réglé. L’invention est splendide et par un jeu avec la musique, il nous fait rire sur ce monde hiérarchisé où chacun se cache. Parade est un film qui possède une identité très forte qui lui permet de sortir très largement du lot.

Le second, A lost and found box of human sensation (photo) conforte l’idée que les films d’animation ne sont pas forcément pour les enfants, et il aborde un thème grave, la dépression, le vide qui suit la perte d’un être cher. L’expérience de la maladie et de la mort, la perte des repères. L’incapacité d’avancer après une telle épreuve et puis, doucement, la renaissance, le nouveau départ et les cicatrices qui se forment et que l’on garde sur soi. Les deux allemands Martin Wallner et Stefan Leuchtenberg créent un univers riche, loufoque et varié. Leur film a une forme assez classique mais ils tiennent une histoire solide, leur film a un but (d’autres n’en ont pas et ne sont qu’une succession de plans vident de sens), quelque chose à dire au spectateur. Et puis, tout de même, les deux gaillards ont la chance de s’être offert les services de deux immenses comédiens pour assurer les voix-off. La voix du personnage principal est assurée par Joseph Fiennes et celle du narrateur par Sir Ian McKellen, excusez du peu !

Les films d’animation font preuve d’une véritable présence artistique à Poitiers. Certains optent pour le rire et la tendresse, tandis que d’autres s’orientent sur des sujets plus graves. La vitalité et la diversité en font un cinéma plein de promesses.

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