Mario Monicelli se suicide (1915-2010)

Posté par vincy, le 29 novembre 2010

Mario Monicelli, 95 ans, s'est suicidé en se jetant par une fenêtre de l'hôpital San Giovanni de Rome où il était soigné. Né le 15 mai 1915 à Viareggio, en Toscane,il était devenu l'un des maestro de la comédie à l'italienne, tournant avec les plus grandes stars, y compris françaises (Philippe Noiret, Catherine Deneuve, Bernard Blier...).

"La mort ne me fait pas peur, elle me dérange. Cela me dérange par exemple que quelqu'un puisse être là demain et que moi je n'y sois plus. Ce qui m'ennuie c'est de ne plus être vivant, pas d'être mort" confessait-il il y a trois ans.

Il a commencé sa carrière en 1934, passant par tous les métiers : scénariste, co-réalisateur, assistant réalisateur. C'est en mettant en scène la star locale Totò, le "Prince du rire", qui se fera une réputation de cinéaste de films comiques.

On lui doit ainsi Gendarmes et voleurs, Pères et fils, Au diable la célébrité. En 1958, il réalise Le Pigeon (avec Vittorio Gassman, Marcello Mastroianni et Claudia Cardinale), puis l'année suivante, La grande guerre, deux gros succès. De Casanova '70 à Mes chers amis, il vadrouille entre le bon et le navet, y compris des segments de films collectifs. Mes chers amis . Ce dernier, sorti en 1975 a battu les Dents de la mer (en tête au box-office dans le monde entier, sauf en Italie). "Des producteurs d'Hollywood nous ont proposé de travailler ensemble mais aucun de nous ne comprenait un mot de ce qu'ils disaient et tout s'est terminé par un bon repas. On ne les a jamais revus", s'était-il amusé.

Un bourgeois tout petit petit en 1977 prolonge l'état de grâce, en étant sélectionné à Cannes. En 1986, il réalise Pourvu que ce soit une fille, autre gros succès transalpin. Il tournera plus rarement à partir de 1992, ne réalisant que trois films en 15 ans, dont le dernier, Les roses du désert.

Monicelli n'avait rien de réalisateur mineur. Pour un spécialiste des films légers, il avait un lourd palmarès : Lion d'or à Venise (pour La Grande guerre puis l'ensemble de sa carrière en 1991), trois fois Ours d'argent du meilleur réalisateur à Berlin (Pères et fils, Caro Michèle, Le Marquis s'amuse), quatre fois primés par les Césars italiens, les David di Donatello, en tant que metteur en scène, trois fois nommé à l'Oscar du meilleur film en langue étrangère (Le pigeon, La Grande guerre, la fille au pistolet) et deux fois pour le meilleur scénario (Casanova '70, Les camarades), cinq fois sélectionné en compétition à Cannes (de 1952 à 1985).

Il aura tourné une soixante d'oeuvres, des téléfilms comme des documentaires. Mario Monicelli, proche de la gauche, avait notamment collaboré à un documentaire sur le sommet du G8 à Gênes en 2001, où des centaines de militants alter-mondialistes avaient été blessés dans des affrontements avec la police. En juin dernier, il avait provoqué la colère du ministre de la Culture en appelant
des étudiants à "se rebeller" contre des coupes budgétaires. "Vous devez utiliser votre force pour subvertir, pour protester, faites-le vous qui êtes jeunes, moi je n'en ai plus la force", avait-il lancé à une assemblée d'élèves de l'Institut d'Etat pour la cinématographie et la télévision.

"La génération née à la fin du fascisme a reconstruit le pays, s'est retroussé les manches, était solidaire. Les générations suivantes ont transformé l'Italie en un tas de ruines; tout a été détruit et corrompu. C'est justement ce que raconte Gomorra : un pays cynique et corrompu", déclarait-il à La Stampa en juin 2008.

Chef d’oeuvre de Visconti, Le Guépard ressort en version restaurée : Mort en Sicile

Posté par Claire Fayau, le 29 novembre 2010

“ Si ?nous? voulons ?que ?tout ?reste ?comme ?avant, ?il? faut ?que? tout? change.”

Le Guépard de ?Luchino ?Visconti ressort en? salles, ?DVD? et? Blu-ray ?le? 1er? décembre ?2010 dans une version? remasterisée ?par ?The ?Film ?Foundation (Martin Scorsese), présentée en exclusivité au récent Festival du Film de Rome. Contrairement à la célèbre réplique du film, rien n'a changé, à part la qualité de l'image, vraiment somptueuse. Le film ressort de l'ombre, pour entrer en pleine lumière, 47 ans après, et la magie opère toujours.

Pour ceux qui ne savent pas qui est ce Guépard, voici l'histoire. En mai 1860, lorsque Garibaldi et ses chemises rouges débarquent en Sicile pour renverser la monarchie des Bourbons de Naples et l’ancien régime, le Prince Don Fabrizio Salina (Burt Lancaster, lion fatigué), sa famille et le Père Pirrone (Romolo Valli), quittent  Palerme pour son palais urbain de Donnafigata, tandis que son neveu Tancrède (Alain Delon, beau comme une statue de la Renaissance) rejoint les troupes de Garibaldi. Période troublée qui conduira in fine à l'unification de l'Italie. Le désargenté Tancrède, d'abord chemise rouge puis faisant partie de l'armée, s’éprend d’Angelica, (Claudia Cardinale, sublissime), la fille de Don Calogero,  le riche maire de Donnafigata. Contre toute attente, le Prince Salina décide d'arranger leur mariage, se sachant dépassé (vaincu ?) par le temps qui passe et par les événements de la petite et de la Grande Histoire.

Ce film fleuve est l'adaptation d'un roman écrit en 1957 par Tomasi di Lampedusa,  Le Guépard. C'est aussi, sans doute, la réalisation la plus critiquée des 14 films de Visconti. Oeuvre charnière loin d'être damnée, ce septième film a remporté une Palme d'Or à l'unanimité lors du festival de Cannes en 1963.

Trois heures (et quelques) comme un rêve atemporel remises valeur par une image restaurée magnifique.

Une scène de bal légendaire, des dialogues inspirés, drôles ou quasi-philosophiques, la musique somptueuse de Nino Rota, le travail minutieux des couleurs (la séquence la plus symbolique est le visage blanc de poussières des aristocrates  à la messe donnée lors de leur arrivée. On dirait un masque mortuaire... ) : ce n'est pas un film qui se raconte, c'est une expérience à vivre. Et  à revivre, tant le film est complexe, et finement détaillé.

Le travail de restauration lui rend un digne hommage. Il suffit de comparer deux images pour constater l'ampleur de la restauration et le formidable travail qui a été fait. Le Guépard a été restauré en association avec la Cineteca di Bologna, L'Immagine Ritrovata, The Film Foundation, Pathé, la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, la Twentieth Century Fox et le Centro Sperimentale di Cinematografia-Cineteca Nazionale. Restoration funding provided by Gucci and The Film Foundation.

« Nous étions les guépards, les lions, ceux qui les remplaceront seront les chacals, les hyènes, et tous, tant que nous sommes, guépards, lions, chacals ou brebis, nous continuerons à nous prendre pour le sel de la terre ». À méditer.

Toscan : un portrait plus proche du requiem que de l’opéra

Posté par vincy, le 29 novembre 2010

L'histoire : Daniel Toscan du Plantier. Producteur infatigable, notamment de Fellini, Pialat, Antonioni, Scola, Wajda, Deville, auteur de quatre livres, chroniqueur, directeur d’une maison de disques et d’une maison d’édition, président d’Unifrance… Impossible de réduire Daniel Toscan du Plantier à une fonction ou à son image médiatique. A sa disparition, quarante ans de vie par et pour le cinéma et l’opéra s’envolent.  Sous des dehors de baladin flamboyant qui célébrait l’art et la vie comme une fête, l’homme rayonnait par son esprit et son talent pour transmettre sa passion à chacun. En reconstituant à partir de plusieurs centaines d’interviews réalisées sur près de 30 ans le puzzle de cette pensée si fidèle à elle-même, ce documentaire souhaite souligner combien la conviction et l’enthousiasme de Daniel Toscan du Plantier restent décidément indispensables.

Notre avis : Manque-t-il vraiment ? Peu importe : Daniel Toscan du Plantier était une particule noble du cinéma français. Bien sûr, des films se produisent toujours, sans lui. Le cinéma français se promeut toujours à l’étranger, sans lui. La musique classique s’écoute toujours, sans lui. Mais, à l’instar de Claude Berri, il était une sorte d’ambassadeur incontournable, représentatif de toute une époque, un défenseur d’une cinéphilie exigeante, qui elle risque de disparaître.

En voyant le documentaire d’Isabelle Partiot-Pieri, on est touché par la passion, la sensibilité, la détermination, l’engagement de ce Seigneur. Un de ces nababs, aux allures de Dandy, qui ont forgé l’idée qu’un cinéma pouvait être audacieux, que le métier était avant tout un risque, que les Rois étaient les artistes. C’est sans doute cela qui a disparu : une forme d’ambition, une volonté de se protéger, une industrialisation des méthodes. Bien sûr, on imagine bien que l’Homme, qui a toujours été patron de quelque chose, n’était pas un tendre. Il avait aussi quelques fêlures mal cicatrisées, et un attachement sans doute trop subjectif au cinéma, pour ne pas être exposé aux critiques, et même aux jalousies. Fin politique, à la fois affable pour séduire et hargneux pour défendre ses intérêts, il a su se rendre indispensable. Se stariser même. L’ego n’est jamais loin des opportunités.

Mais reconnaissons qu’en domptant un Pialat, produisant Fellini et Wajda et tant d’autres, en alliant l’opéra au cinéma, il fait momentanément taire quelques points de vue discordant sur cette vanité affichée, cette puissance désirée, et même son goût pour le champagne et les paillettes.

Le documentaire ne prend aucun point de vue. Nous sommes dans un portrait, plutôt laudateur, avec de nombreuses interviews du défunt. Visuellement, le film aurait pu aller au-delà de cette image si télévisuelle.  Quelque part, avec cette dimension cinématographique oubliée, il enterre définitivement un homme qui n’aimait que les choses en grand, comme un écran de cinéma, plus grand que la vie, aussi grand que lui.

Il n’y a plus personne pour sauver Leslie Nielsen (1926-2010)

Posté par vincy, le 29 novembre 2010

Leslie Nielsen, acteur canadien né en 1926, est mort à l'âge de 84 ans dimanche 28 novembre. Le public le connaît essentiellement pour ses gaffes et sa maladresse "gaguesque"  des films parodiques (et pour les deux premiers hilarants) de la série des Y-a-t-il un...  Commencée avec le pastiche d'Airport, avec Y-a-t'il un pilote dans l'avion ? (Airplane) en 1980, énorme succès, la saga a continué avec Y a-t-il un flic pour sauver la Reine ? (1988), Y a-t-il un flic pour sauver le président ? (1991) et Y a-t-il un flic pour sauver Hollywood ? (1994). Tous les trois étaient issus de la série télévisée "Police Squad"(1982) dans laquelle il avait créé son rôle de bon flic malgré lui.

C'est le petit écran qui l'avait fait vedette. On l'a vu dans les meilleures séries de son époque, ou les plus représentatives : "Rawhide", "Les incorruptibles", "Le fugitif, "Bonanza", "Les mytères de l'Ouest", "Hawaï Police d'Etat", "Columbo", "M.A.S.H.", "Les rues de San Francisco" ou encore "Kojak", "La croisière s'amuse", "L'île fantastique", "Vega$", Arabesque", et même "Madame est servie".

Au cinéma, le comédien s'était fait connaître dans le film de science-fiction Planète interdite en 1956. Souvent choisi comme le second rôle masculin principal, il joue à l'ombre de Glenn Ford (La vallée de la poudre, La rançon), Charlton Heston (La symphonie des héros), Gene Hackman (L'aventure du Poséidon), Richard Dreyffus (Cinglée) dans on dernier rôle dramatique.

Immense comique, il fera aussi des incursions dans d'autres genres (Creepshaw, le bal des horreurs). Mais à partir des années 90, Hollywood ne l'emploiera que pour ses talents de farceurs avec des films souvent médiocres (pour ne pas dire des navets comme Mister Magoo, Scary Movie 3 et sa suite, ou de nombreux pastiches pour divertir les soirées du samedi.