Le gouvernement britannique ferme le UK Film Council

Posté par vincy, le 27 juillet 2010, dans Business, Films.

Nouveau gouvernement britannique. Nouvelle politique. Il semble que le Ministre de la Culture, des Médias et du Sport (et des Jeux Olympiques) préfèrent consacrer son budget au sport (et aux JO de 2012 à Londres) qu'à la culture. Après avoir proposé des coupes sévères  - soit 35 à 50% des postes du Ministère en moins, 200 sur 850 associations culturelles qui ne recevront plus aucune subventions, 40% du budget global - et envisagé d'installer le reste du personnel dans un bâtiment public de taille plus modeste, Jeremy Hunt, ex consultant en communication et publiciste, a annoncé avec fracas la suppression du UK Film Council.

Cette décision, dans le cadre de sa politique de réduction des dépenses publiques,  a été prise sans aucune évaluation préalable, sans aucun audit, sans aucune consultation, un mois à peine après l'arrivée du gouvernement de David Cameron au pouvoir.  Brutal.

En 2010, le UK Film Council (75 employés) avait prévu de dépenser 28 millions d'euros dans la production de films (un tiers de son budget total). Au total, en dix ans d'existence, le Conseil a investit près de 300 millions d'euros dans 900 films. Depuis sa création, la part du cinéma anglais au box-office a augmenté de 62%. Créé sous le gouvernement de Tony Blair, l'organisme a permit au cinéma britannique d'avoir une bouffée d'oxygène dans un pays où l'industrie cinématographique était relativement atone.

Grâce au UK Film Council, des films comme La jeune fille à la perle, My summer of love, Dear Frankie, Millions, Happy-Go-Lucky, White Lightnin', Chéri, Fish Tank, Bright Star, Nowhere Boy ou le récent Another Year ont trouvé un financement utile pour exister, voyager dans de prestigieux festivals, toucher un large public de cinéphiles et recevoir de nombreux prix. On pourrait ajouter Tamara Drewe ou Chatroom, sélectionnés cette année à Cannes. On notera qu'il y a des films de cinéastes prestigieux comme Campion, Leigh, Boyle ou Frears.

Tim Bevan, le producteur de Working Title, condamne évidemment cette arbitrage : "Abolir l'organisation de soutien au cinéma qui rencontre le plus de succès que le Royaume-Uni ait jamais eu est une mauvaise décision."

Le UK Film Council gardera deux responsabilités : la répartition des fonds issus de la Loterie britannique destinés aux financements des films et la certification des films pouvant être éligibles aux crédits d'impôts britanniques. Quid de la promotion du cinéma britannique à l'étranger, du plan d'équipement de 240 écrans numériques ?

Cet achèvement reste une surprise, et une mauvaise nouvelle pour le cinéma anglais indépendant. Chaque année, l'institution recevait 200 demandes de financement. Pourquoi détruire un système qui fonctionnait, et qui obtenait de bons résultats? D'autant que ça stimulait fortement l'industrie cinématographique mais aussi celle des jeux vidéos.

La fermeture définitive est prévue pour le printemps 2012. Le British Film Institute, qui a été épargné, pourrait prendre, en partie, le relais. A condition que le lobbying en faveur de cette "transmission" fonctionne... Mais pour les professionnels, cela complique pas mal leur job : cette perte soudaine de ressources (humaines et financières) va être longue à digérer. Ils attendent aujourd'hui une politique cohérente, entre divers interlocuteurs qui étaient souvent reliés par le UK  Film Council. Les productions en cours ne devraient pas être touchées.

L'abandon en rase campagne est un mauvais signal. Mais il n'a rien d'étonnant dans un pays où le désengagement de l'Etat est constant depuis 30 ans. Il était difficile de faire des films au Royaume Uni. Aujourd'hui, ça semble encore plus compliqué.

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