Ôde fantastique au Président John McTiernan

Posté par denis, le 28 janvier 2010, dans Festivals, Personnalités, célébrités, stars.

jmctiernan.jpgAdulé par le public de ciné de genre et souvent boudé par un grand public incapable d’apprécier le second degré, John McTiernan, Président du jury du festival du film fantastique de Gérardmer, a créé depuis plus de 25 ans des œuvres hybrides à la lisière du fantastique, où l’épopée guerrière croise le consumérisme actuel, où le survival se débat avec l’anthropologie, et où un sens inné de la mise en espace de l’action l’assoit comme l’un des derniers grands du cinéma contemporain. Car il n’est pas donné à tout le monde de refaçonner le cinéma d’action à grands coups de créatures fantastiques et d’humains tordus !
Son œuvre se divise en deux catégories distinctes : le film d’action pur et dur (Die Hard 1 et 3, Last action hero), et l’hybride entre la science-fiction et le fantastique. C’est d’ailleurs pour cette deuxième facette qu’il trouve sa place cette année en tant que Président du jury. Car le papa du chef d’œuvre Predator et du film maudit Le 13ème guerrier devait un jour ou l’autre être reconnu pour ses bons et loyaux services. Et quoi de mieux qu’un parterre de mecs férus de pelloches transgressives pour le hisser au panthéon des réalisateurs qui « en ont » aux côtés de Friedkin et Carpenter.
Dès ses débuts McTiernan déclare son amour au genre avec Nomads, film d’aventure à la contrée du fantastique où des chercheurs vont se perdre dans la découverte d’étranges créatures. Amour des grands espaces, personnages en quête d’eux-mêmes, combat de la nature humaine, fascination pour ce que l’image peut révéler : toutes ces thématiques inscrites dans ce film exploseront quelques années plus tard avec le dantesque et séminal Predator. Est-il encore nécessaire de présenter ce film, chaînon manquant entre Alien pour la créature et Conan le barbare pour la fureur barbare et la transcendance de la nature. Symbiose du survival hardcore et de la menace venue d’ailleurs, il est pour son auteur le film de la reconnaissance. Inégalable. Le 13ème guerrier aurait pu lui aussi atteindre la perfection de Predator si le producteur Crichton ne l’avait pas massacré au montage. Belliqueux, épique, incroyable mélange de finesse et de brutalité, Le 13ème guerrier brille par la capacité de son réalisateur à magnifier le monde viking puis à le confronter à une menace sourde renvoyant aux premières heures de l’humanité. Sombres et lumineuses, les scènes de combat aux multiples angles de perception sont de véritables leçons de cinéma. Sans parler des nombreux paysages crépusculaire qui émaillent le film.


Autre film présenté dans la rétrospective, Die Hard, troisième du nom, un des épisodes de la série le plus réussi et sûrement le plus drôle, où McTiernan fait balancer à Willis des punchlines toutes les deux minutes. Et vu que le réal n’est pas manchot il nous gratifie de quelques belles explosions en plein New York. Jouissif, même si l’élément fantastique n’y est pas présent. En revanche Last action hero joue sur son postulat fantastique pour mieux enfoncer les fenêtres du cinéma bourrin. Détournant les codes du cinéma d’action et du cinéma tout court, McT propose un joyeux tour de manège avec cette histoire de gamin qui rejoint son héros de film dans la réalité pour punir les bad guys. La mise en abyme est la ligne directrice de cette caricature du film d’action, tout en proposant une réflexion sur la possibilité pour le spectateur de traverser le miroir le séparant de la fiction. Ironique et intelligent, LAH est un régal pellicullé avec Schwarzy en actionman dépassé par la réalité sur fond d’AC/DC. Ou comment faire du gros cinéma qui tâche de manière ludique et décomplexé.

Autre grand moment de cinéma qui hélas fut boudé ou incompris par le public et la critique, le remake de Rollerball est une tuerie en terme de mise en scène et un incroyable pamphlet sur la société de consommation. Sur fond d’anticipation McTiernan prouve toute son étendue à ne pas manier la langue de bois et tape tout autant sur notre société de surveillance que sur la vénalité du sport et la soif de sang du spectateur. Boulimique dans sa soif d’images, moderne dans sa manière hystérique d’appréhender l’évènement, Rollerball utilise les armes qu’il combat (du chic, du vulgaire et du clinquant) avec une maestria et une ambiguïté qui frôle le génie. Et enterre pour le coup l’original de Jewison.

Il faut le dire et le répéter, McTiernan est un visionnaire incompris, un fou furieux dont on attend un jour qu’il soit reconnu à sa juste valeur. D’ici là le Festival Fantastique de Gérardmer lui fait l’honneur de présider cette édition 2010 et lui rend hommage à travers ses plus belles oeuvres. Comme dirait l’autre : « Hey dude, keep the right on ! »

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