Le cinéma, le sexe et le Moyen-Orient…

D'abord allons à Dubaï. La nouvelle Vegas de la planète est en quête de reconnaissance : festivals culturels, démesure architecturale, icône visuelle et commerciale des magazines de mode et de "business". Mais voilà, à Dubaï, comme dans toute la région, l'inégalité des hommes et des femmes, l'écart entre riches et pauvres, le taux d'analphabétisme et l'impossibilité d'avoir accès au Savoir sont toujours aussi immenses. La vilel de Dubaï qui cherche donc des événéments et des coups marketings pour devenir la destination touristique de rêve, en concurrence avec Doha et Abu Dhabi, a gaché une belle opportunité en refusant une autorisation de tournage pour des séquences de la suite de Sex and the City, après en avoir examiné le scénario.

Dubai Studio City (DSC), qui vise à attirer la production audiovisuelle internationale, a indiqué que la demande avait été rejetée sur recommandation des autorités. Le script du film a été soumis aux autorités concernées pour être examiné "en prenant compte du tissu social multi-culturel et de ses perceptions."

En fait Dubaï n'aimait rien : ni le titre du film, qui ne peut que blesser les sensibilités du monde musulman, ni la philosophie du film, qui vante davantage l'épanouissement par la sexualité que la frénésie bienfaitrice du shopping. Car l'émirat est soucieux de ne pas froisser ses citoyens, même s'ils ne représentent que 20% d'une population cosmopolite et multiconfessionnelle.

Déjà la première édition du film avait été interdite dans les cinémas. Plus généralement, l'AFP rappelle que "les scènes de sexe explicites des films étrangers sont systématiquement censurées dans les cinémas de Dubaï, alors que les sous-titres en arabe évitent de rendre compte de la crudité du langage. Les DVD contenant ce genre de scènes sont également censurés, et l'accès aux sites internet de sexe bloqué."

La première projection en 30 ans

Un peu plus loin en Arabie Saoudite. Ce dimanche 9 août, le gouvernement de Ryad annonce la fremeture des bureaux en Arabie de la chaîne satellitaire basée au Liban LBC à cause de son émission "Ligne rouge", dans laquelle un Saoudien, Mazen Abdel Jawad, se vantait de sa vie sexuelle et notamment d'avoir eu sa première expérience sexuelle à l'âge de 14 ans. Il avait également raconté comment il utilisait la fonction Bluetooth de son téléphone portable pour tenter d'entrer en contact avec des Saoudiennes disposant également de cette fonction et obtenir des rendez-vous galants, dans un pays où la mixité est strictement interdite. Une centaine de plaintes plus tard, la chaîne, qui appartient à un milliardaire saoudien, doit fermer ses bureaux, mais, première hypocrisie, peut continuer à être diffusée.

On peut s'interroger sur les réelles intentions du gouvernement à l'égard de ce milliardaire, le prince Walid ben Talal (ou Al-Walid Ibn Talal, un neveu du roi Abdallah), dont le groupe multimédia, Rotana, tente de réintroduire le cinéma en Arabie saoudite. Il y a deux mois, il avait lancé une projection publique commerciale à Ryad, la première en plus de trente ans. Plus de 300 spectateurs, uniquement des hommes, rassemblés dans le vaste centre culturel du Roi Fahd ont "acclamé, sifflé et applaudi à tout rompre", selon l'AFP, "lorsque les premières images du film Manahi sont apparues à l'écran et que la musique a retenti dans la salle". Des manifestants ultra-conservateurs avaient tenté d'empêcher la projection. Le clergé ultraconservateur considère le cinéma, la musique et toutes les autres formes de loisirs comme des atteintes à l'islam. L'AFP avait rapporté alors que ces manifestants pensaient que le cinéma était une cause de désastre, avec comme preuve, cette "récente série de secousses telluriques de faible intensité dans l'ouest du royaume. "Allah nous punit à cause du cinéma. C'est contraire à l'islam", a lancé l'un d'eux!"

La comédie Manahi (d'Ayam Makram) avait été projetée en décembre dans des salles combles à Djeddah, la capitale économique du pays. Dans la salle, les femmes étaient présentes mais séparées des hommes. Il a fallu cinq mois pour obtenir l'autorisation du gouvernement et diffuser le film à Ryad. Il a aussi été montré à Taif et Jazan.

La promesse d'un espoir pour que l'ignorance cesse et que le Moyen-Orient évolue vers davantage de Savoir, d'égalité, de liberté?

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