Sundance succombe au charme de Louise-Michel

Posté par vincy, le 25 janvier 2009

sundanceLe festival du film indépendant de Sundance, créé par Robert Redford en 1978, s'est achevé sur la rituelle cérémonie de prix. Du 15 au 25 janvier, Sundance a montré, encore une fois, la vitalité d'un cinéma mondial, toujours davantage préoccupé par les relations humaines complexes et les conditions sociales contemporaines.

Le grand vainqueur, et donc le film dont on parlera dans les prochains mois, s'intitule Push, d'après le roman de Sapphire, réalisé par Lee Daniels. Il emporte le prix du public et le Grand prix du jury (fiction). Un doublé qui n'avait pas eu lieu depuis 2006 avec Echo Park, L.A.. Push emporte aussi un prix spécial pour l'interprétation de Mo'Nique, star cathodique américaine. Notons aussi, dans ce film, la présence du chanteur Lenny Kravitz, dont c'est la première apparition sur le grand écran.

Dans ce palmarès, un seul film français, sur les quatre engagés, s'y glisse. Louise-Michel, complètement snobbé par les César, a été reconnu avec une mention spéciale du jury "cinéma du monde" pour son "originalité". Une originalité qui séduit en france, d'ailleurs, puisque le film a déjà attiré 350 000 spectateurs. Kassovitz, producteur, était aussi présent dans la catégorie Spectrum avec Johnny Mad Dog. Les deux autres films français en sélection sur les pentes neigeuses de l'Utah étaient Cliente, de Josiane Balasko, et Zion et son frère, film franco-israélien de Eran Merav.

sundance jodie fosterAprès une orgie de dix jours où 120 films étaient présentés, Sundance tire un bilan moins pessimiste que prévu. Trois films ont cartonné au marché : le biopic Black Dynamite, de Scott Sanders, la comédie gay Humpday, de Lynn Shelton, le film d'horreur norvégien, Dead Snow, de Tommy Wirkola. Thématiquement, le cinéma s'est emparé de trois grands thèmes : la sexualité (dans tous ses états), l'environnement et les luttes sociales (quelque soit l'époque). Les stars étaient présentes (Jim Carrey, Ashton Kutcher, Susan Sarandon, Sam Rockwell, Ethan Hawke, Jodie Foster, Uma Thurman...) pour des films indépendants calibrés pour les festivals et les salles art et essai.

L'ambiance était plus conviviale, moins stressante. Tout était moins cher, plus chaleureux. La crise économique n'est pas seule responsable. L'investiture de Barack Obama a vidé le Festival dès le 21 janvier... Les ventes de billets ont ainsi chuté durant les quatre derniers jours. A cela s'ajoutait une révolution plus souterraine : les formes de distribution des films indépendants. Les salles de cinéma ne sont plus la seule possibilité pour vendre un film à un distributeur. Le numérique (VoD, Internet...) bouleverse tous les contrats. Le modèle économique que l'on a toujours connu est officiellement révolu.

Malgré tout, Redford essayait de rassurer tout le monde lors du discours inaugural : "La manière dont avons programmé ce festival est la même que lorsque nous avons débuté. C'est lo monde qui a changé."

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sundance lee daniels pushPrincipaux prix de Sundance 2009 :

Grand prix du jury : We Live in Public (documentaire américain) ; Push: Based on the Novel by Sapphire (fiction américaine) - photo du réalisateur Lee Daniels

Prix du jury cinéma du monde : Rough Aunties (documentaire), La Nana (fiction)

Prix du public : The Cove (documentaire américain), Push: Based on the Novel by Sapphire (fiction américaine), Afghan Star documentaire du monde), An Education (fiction du monde)

Prix de la mise en scène : Natalia Almada, El General director (documentaire américain), Cary Joji Fukunaga, Sin nombre (fiction américaine), Havana Marking, Afghan Star (documentaire du monde), Olivier Hirschbiegel, Five minutes of Heaven (fiction du monde)

Meilleur scénario (cinéma du monde) : Guy Hibbert, Five minutes of Heaven

Prix spécial du jury cinéma du monde : Louise-Michel (originalité), Tibet in song (documentaire), Catalina Saavedra (interprétation dans La Nana)

Prix spécial du jury : Good Hair (documentaire), Humpday (pour l'esprit d'indépendance), Mo'Nique (interprétation dans Push : Based ont the Novel by Sapphire)

Le dilemme des récompenses posthumes

Posté par vincy, le 25 janvier 2009

ledger_williams_oscarsHeath Ledger dans la catégorie second rôle masculin aux Oscars, Guillaume Depardieu en lice pour le César du meilleur acteur... deux comédiens "cultes" cités de manière posthume. Ce n'est pas une première.

Peter Finch avait été récompensé par un Oscar du meilleur acteur en 1977. Sa veuve était venue chercher la statuette. De nombreux artistes - le scénariste Sidney Howard, le chef opérateur Conrad Hall, le musicien Bernard Herrmann - ont reçu des nominations posthumes aux Oscars. Edward G. Robinson et Audrey Hepburn ont même été primés par un Oscar humanitaire quelques mois après leur décès. Le cas le plus connu est évidemment James Dean, décédé en 1955 et cité aux Oscars de 1956 et 1957.

Les César ne sont pas en reste. Jean Gabin fut césarisé d'honneur en 1987, après sa mort. De même Gérard Philipe en 1990, en guise d'hommage. Serge Gainsbourg fut primé en 1996 pour la musique d'Elisa, et Geoffrey Unsworth ne pu jamais recevoir son César pour la photo de Tess en 1980.

Le dilemme est double : la récompense est-elle un hommage déguisé et donc fausse-t-elle l'intention du collège électoral? Qui peut s'approprier dignement un tel prix? Si, par exemple, Cassel, archi-favori, perd contre Guillaume Depardieu, n'y verra-t-on pas un subterfuge?

Pour Heath Ledger, il semble que les producteurs ont déjà tout prévu. L'ex-compagne de l'acteur, l'actrice Michelle Williams, et leur fille, Matilda, pourraient monter sur scène s'il gagne l'Oscar. Pour Michelle Williams, la victoire serait d'autant plus amère, qu'elle figurait parmi les favorites dans la catégorie actrice pour sa performance dans Wendy and Lucy. Elle n'a finalement pas été nommée.

On voit mal Christopher Nolan, le réalisateur du film pour lequel il est cité, Batman The Dark Knight, aller chercher l'Oscar. Lui a été clairement snobbé par l'Académie, alors que nombreux sont ceux qui considèrent ce Batman comme l'un des meilleurs films de l'année.

D'autres solutions s'offent aux producteurs : les parents de l'acteur, Christian Bale ou le producteur du film.

Aux César, si Guillaume Depardieu l'emporte sur Vincent Cassel, le clan Depardieu devrait faire l'affaire. Le père, la mère, la soeur. Mais la tradition française, qui déteste tant l'émotion pré-fabriquée, est de convier sur scène, en cas d'absence, le réalisateur, Pierre Schöller, ou le producteur du film (Géraldine Michelot). Le problème se posera surtout s'il ne gagne pas : comment ne pas faire doublon en cas de victoire, ne pas le passer sous silence en cas de défaite? La grande classe serait que Carax, Salvadori et Rivette viennent juste parler de lui...

Que ce soit le 22 février aux Oscars ou le 27 février aux César, cette année, les soirées glamour seront hantées par des fantômes.